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Le livre du chevalier de La Tour Landry pour l'enseignement de ses filles

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Cy parle de Nostre Dame.

Chappitre CIXe.

Après vous parleray de une qui n’a point de pareille, c’est de la benoiste glorieuse vierge Marye, mère du sauveur du monde. Ceste cy est sy haulte exemplaire que nul ne la puest descripre, tant y a de bien et de bonté, et la haultesse de son chier filz l’exaulce et esliève son bien de jour en jour. Car par la renommée du filz croist la renommée de la mère. Ceste doulce vierge honnoura plus et craingnist son filz que nulle autre mère, pour ce que elle sçavoit bien dont il estoit venu ; elle fust chambre et temple de Dieu où furent faictes les espousailles de la deité et de l’umanité, qui apporta la vie et le saint sauvement du monde. Dieux voulst que elle espousast le saint homme Joseph, qui estoit vieulx et preudomme ; car Dieu voulst naistre soubz umbre de mariage pour obeir à la loy qui lors couroit, pour eschever les paroles du monde, et pour luy bailler compaignie à la gouverner, et pour la mener en Egypte, dont il avint que, quant Joseph apperceust que elle feust grosse, il la cuida laissier, et lui dist que il savoit bien que ce n’estoit pas de lui. Mais en celle nuit Nostre Seigneur lui envoya son saint ange visiblement, qui lui dist que il ne se esmaiast pas et que la groisse estoit du Saint-Esperit, pour le sauvement du monde, et lors il en eust grant joye et se pena trop plus de la honnourer que devant ; car il savoit bien par le dist des prophètes que le filz de Dieu devoit venir en une vierge qui auroit nom Marie. Sy en mercya Dieu moult humblement de la grant honneur qu’il lui avoit faite de lui avoir daingné donner sa doulce mère à la gouverner et de la veoir à ses yeulx. Et aussy la bonne vierge lui portoit honneur et obeissance, dont l’escripture l’en loe moult. Après elle est loée de ce que l’ange la trouva seule ou temple, à genoulx en prières et en oroysons, et ainsi doit estre toute bonne dame en devocion et ou service de Dieu. Après la loe l’escripture de ce qu’elle se craignoit, et en ot un pou de paour quant l’ange la saluoit, et demanda comment ce pourroit estre qu’elle conceust enffant, elle qui oncques n’avoit congneu homme charnellement, et li ange l’asseura et luy dist que elle n’eust pas paour et ne se esmerveillast pas ; car il seroit du Saint-Esperit, et que nulle chose n’estoit impossible à Dieu, c’estoit à dire que Dieu povoit faire tout à son plaisir ; et mesmement sa cousine Elizabeth estoit enceinte bien avoit vj. mois, qui estoit brahaigne et passé aage. Et lors, quant l’ange lui eut ce dist, elle se asseura et lui dist : « Veez-cy la chambrière de Dieu ; soit fait selon ta parolle. » Car elle voulst premierement sçavoir comment ce seroit. Mais ainsi ne fist mie Eve, car elle estoit de trop legier couraige, comme font aujourdui maintes simples femmes qui croyent de legier les folz, dont depuis elles viennent à la folie. Elles ne enquièrent mie ne ne regardent à la fin où elles en vendront, comme fist la glorieuse vierge Marie, qui enquist à l’ange la fin du fait que il luy anonçoit, et en fust paoureuse, et ainsi doivent faire les bonnes femmes et les bonnes dames, quant l’en leur parle de juennesse ou de chose qui puisse venir au deshonneur de elles.

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