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Le livre du chevalier de La Tour Landry pour l'enseignement de ses filles

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Comment Nostre Seigneur loue les bonnes femmes.

Chappitre CXIXe.

Dieux loue la bonne femme, la nette et la pure, comme c’est noble chose et sainte que de bonne femme ; car, quant Dieu de sa propre sainte bouche la loue, dont par bonne raison le monde et toutes gens la doivent bien amer et louer et chier tenir. Il est contenu en l’euvangile des vierges que le doulx Jhesucrist preschoit et enseignoit le peuple. Sy parla sur la matière des bonnes et des nettes femmes, là où il dist : Una preciosa margarita comparavit eam. Je vous dy, dist nostre seigneur, que femme qui est bonne et nette doit estre comparée à la précieuse marguerite. Et ce fust à merveilles dist ; car une marguerite est une grosse perle réonde d’oriant, clère, blanche et nette. Et, quant elle est clère et nette, sans nulle tache y veoir, celle precieuse pierre est appelée precieuse margarite. Et ainsi montra Dieux la valeur et la bonté de la bonne et nette femme. Car celle qui est nette et sans taiche, c’est-à-dire celle qui n’est pas mariée et se tient vierge ou chaste, et aussi celle qui est mariée et se tient nettement ou saint sacrement de mariaige, sans souffrir estre avillée que de son époux que Dieu lui a destiné et donné, et aussy celle qui nettement tient son vefvage, cestes-cy sont celles, si comme dit la glose, de qui Dieu parla en sa sainte Euvangile. Ce sont celles qui en ces iij. estas se tiennent nettement et chastement. Elles sont comparagiées, si comme dist nostre seigneur Jhesucrist, à la precieuse marguerite, qui est clère et nette, sans nulle taiche. Car, si comme dit la sainte escripture : Nulle chose n’est si noble que de bonne femme, et playst à Dieu et aux angels en partie plus que l’omme, et doit avoir plus de merite, selon rayson, pour ce que elles sont de plus foible et legier couraige que n’est l’homme, c’est-à-dire que la femme feust traitte de l’omme, et, de tant comme elle feust plus foible et elle puet bien resister aux tamptacions de l’ennemy et de la chair, et, en l’aventure, de tant doit-elle avoir plus grant merite que l’omme. Et pour ce la comparaige Dieu à la noble precieuse marguerite, qui est clère. Et aussi dit la glose en un autre lieu que, aussy comme c’est laide chose à baillier un blanc et delié cueuvrechief à un grant seigneur ouquel en lui baillant l’en espendroit grosses gouttes d’encre noire, et aussy celles gouttes noires les espandre sur une esculée de lait qui est blanc, tout ainsi celle qui doit estre pucelle, et baille son pucellaige à autre que à son espoux, et aussy la mariée qui, par sa grant mauvaistié, sa leiche et sa fausse lecherie de chair, rompt et casse son mariaige et son saint sacrement, et ment sa foy et sa loy vers Dieu et l’esglise, et vers son seigneur, et aussi celle qui se doit tenir nettement en sa vefveté, cestes manières de femmes resemblent les taiches laides qui sur le blanc lait et sur le cueuvrechief de grosses goutes noires appèrent ; elles ne sont de riens aux précieuses marguerites ; car en la precieuse marguerite n’a nulles taiches ne goutes noires. Hélas ! tant la femme se doit bien haïr et maudire sa mauvaise vie, quant elle n’est plus ou nombre des bonnes dont Dieu parla ainsi à ses appostres et au pueple. Dont, se elles pensoient bien à iij. choses, l’une, comme celles qui sont à marier perdent leur mariaige, leur honneur et acquièrent la honte et hayne de leurs amis et du monde, comme chascun les monstre au doy ; les mariées, comme elles perdent toute honneur et l’amour de Dieu et de son seigneur et de tous ses amis et de tous autres, et puis Dieu lui nuist à avoir bien et chevance ; car des diffameures et laidures que l’en en dit seroit trop long à raconter. Car telz leur feront belle chière par devant qui puis leur traira la langue par derrière, et en tendront leurs comptes et leurs moqueries, et en feront chacun jour leur parlement ; mais après jamais elles n’aymeront de bon cuer leurs seigneurs, comme j’ay dit en l’autre livre ; l’annemi leur fera plus trouver de ardeur et ardant delit en leurs ribauderies et en pechié mortel dampnable que en l’euvre de saint mariage ; car, en l’euvre de mariage, qui est euvre commandée de Dieu, n’a point de pechié mortel, et pour ce n’a l’annemy que y veoir ne que y regarder ; mais en ribauderies et en pechié mortel là a l’ennemy povoir, et y est en sa personne et eschauffe et atise le pecheur et la pecheresse au faulx delit ; aussi comme le fèvre qui met le charbon et souffle en la fournaize, ainsi le fait l’ennemy en celluy mestier, et les y tient liés et enflambez de celluy ardent delit en pechié mortel, car il le fait pour sa gaaingne, et s’il les puet faire mourir en pechié mortel, il emporte l’ame en la douleur d’enffer, et en a aussi grant joye et se tient aussi bien apayé comme le chasseur qui a toute jour chassé, et puis au soir il prent sa beste et l’emporte ; aussi fait l’ennemy de telles femmes et de telles gens ; et c’est bien rayson, si comme dit la sainte escripture, que ceulx qui euvrent de telles chaleurs de luxure et y ont prins leur puant delit de la char soyent mis et portez en la chaleur et en la flambe du feu d’enffer. Et c’est bien rayson, dit un saint hermite en la vie des Pères, que l’une chaleur soit mise avecques l’autre, et que tout se poursuive en cest monde et en l’autre ; car, si comme Dieu dit, il n’est nul bien qu’il ne soit mery ne nul mal qui ne soit pugni.

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