L'ami : $b dialogues intérieurs
AVANT LE COMBAT
— Le combat sera rude. Sommes-nous en nombre, au moins ?
L’Ami. — Pour quels biens allons-nous à la bataille ? Pour des sacs de riz, de charbon ou d’argent ?
— Non ; nous défendons le bon droit, la vérité, la paix, la liberté.
L’Ami. — Dès lors, à quoi bon demander combien nous sommes ? S’il s’agit d’exercer des violences, le nombre est la grosse affaire. Jamais on n’est assez de monde. Après la bataille, le danger une fois passé, les difficultés commencent. La question se pose de faire durer ce qu’on a établi par la force, de transformer, par l’accoutumance, l’iniquité en justice, le mensonge en vérité, le rapt en possession légitime. Besogne colossale ; aucune multitude, aucune arme n’y suffit : elle est toujours à refaire.
Le bon combat se livre dans des conditions tout autres. Tant mieux s’il y a des compagnons ; mais ne nous plaignons pas d’être seuls. Il suffit d’une voix pour signaler une imposture, ou annoncer que le soleil se lève. Si cette voix se taisait, les pierres clameraient. Si elle crie, les pierres lui font écho.