Les amours de Faustine : $b Poésies latines traduites pour la première fois et publiées avec une introduction et des notes par Thierry Sandre
XIII
IN DURUM JANITOREM
XIII
CONTRE UN PORTIER INSENSIBLE
Tout de fer qu’ils soient, les verrous accueillent mes plaintes, et mes larmes font soupirer les pierres insensibles.
Mais toi, trop cruel et impitoyable prêtre, plus insensible que le fer et plus insensible que les roches,
tu ne te laisses fléchir ni par la constance de mes pleurs ni par mes prières, et c’est en vain que j’en répands devant ta porte rigoureuse.
Bien plus, tu me regardes de travers, tu me repousses avec rage, et tu m’ordonnes de rester loin de ton couvent.
Toi, du moins, ô Cerbère, tu fus pris par les vers du poète Orphée, lorsqu’en chantant il s’éplorait devant le palais des Enfers ;
les oreilles dressées, la queue en mouvement, tu fis taire ta triple gueule, dit la légende ;
et, on le raconte encore, les Mânes, les impitoyables Sœurs et Pluton se mirent à soupirer en versant des larmes pieuses.
Or l’Amour l’avait frappé d’un trait pointu qu’on ne voit pas venir, et c’est le même Amour qui m’a férocement blessé au cœur.
Mais toi, prêtre, tu l’emportes sur le monstrueux portier des morts, tu l’emportes sur les Euménides aux serpents tortueux,
tu es plus sourd que les flots de la mer Ionienne et que chacun de ses rivages, et tu te détournes, et tu dédaignes toujours mes prières.
Sans doute tu te ris des douleurs humaines, ô très impitoyable. Et tu as l’espoir que tes prières puissent émouvoir les dieux ?