Les amours de Faustine : $b Poésies latines traduites pour la première fois et publiées avec une introduction et des notes par Thierry Sandre
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SOMNIUM
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SONGE
Il faisait nuit, et tranquillement tout goûtait le repos, lorsqu’un Enfant m’apparut en songe. Il était devant moi.
Sa main gauche tient un arc ; sa droite tient des flèches relevées d’or ; à son épaule blanche pend un carquois décoré, qui fait du bruit.
Il voit bien que, loin de dormir, je roule dans ma tête des pensées douloureuses, et que mes yeux, pour avoir pleuré, sont gonflés.
Alors il vient vers moi. J’étais craintif ; il m’apostrophe amicalement et, comme mes larmes lui font pitié, il dit :
— « Arrête, jeune homme. N’épuise plus tes jours dans le chagrin, et ne te plains plus si souvent de mes caprices.
Cette femme, ce n’est pas moi, c’est un mari cruel qui par sa fourbe te l’enleva. Mais voici qu’elle va t’être rendue. »
— « Pourquoi, cruel enfant, puisqu’on m’a trompé par une fourbe méchante, faut-il que tu viennes aussi maintenant m’abuser avec tes mensonges ?
Si tu souhaites que je te croie, jure, et prends à témoin les eaux du Styx ! ou, plutôt, car je suis indécis, donne-moi un gage qui resserre ma confiance. »
— « Tiens », dit-il, et, s’arrachant une plume de ses ailes peintes : « Sois plus sûr de moi, voici mon gage. »
Mais enfin, que dois-je espérer ? Et quelle assurance tirer de ce gage, si, pour affermir ma confiance, c’est une plume qu’on me donne ?