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Les amours de Faustine : $b Poésies latines traduites pour la première fois et publiées avec une introduction et des notes par Thierry Sandre

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NOTES

Poème I

[1] Le recueil des Poemata de Joachim du Bellay se divise en quatre livres : 1o Elegiæ ; 2o Varia Epigrammata ; 3o Amores ; 4o Tumuli.

L’épigramme Ad lectorem, reproduite dans la présente édition des Amours de Faustine, se trouve en tête des Varia Epigrammata. Nous l’avons déplacée pour en faire un prologue nécessaire.

Poème II

[2] Gordes était l’un des meilleurs amis que J. du Bellay eût à Rome. C’est à lui que le poète dédie les Amours de Faustine. Il lui adressa aussi d’autres pièces des Poemata et plusieurs sonnets des Regrets (sonnets 53, 57, 61, 73, 75, 89, 92, 144. — Édition H. Chamard).

Poème III

[3] Allusion au premier vers de la Pharsale de Lucain :

Bella per Emathios plus quam civilia campos…

[4] Allusion à l’Énéide de Virgile (arma virumque cano…)

[5] Allusion au premier vers des Métamorphoses d’Ovide :

In nova fert animus mutatas dicere formas…

[6] Allusion au premier vers de l’Enlèvement de Proserpine, de Claudien :

Inferni raptoris equos…

Poème IV

[7] Enna, ancienne ville de Sicile, aujourd’hui Castro-Giovanni. C’est là que, selon la légende, eut lieu l’enlèvement de Proserpine par Pluton.

[8] Pirithoüs descendit aux Enfers avec Thésée pour délivrer Proserpine. Tous deux furent prisonniers de Pluton ; mais, tandis que Thésée fut sauvé par Hercule, Pirithoüs fut mis à mort.

Poème XI

[9] Pour se faire aimer de Calisto, nymphe de la suite de Diane, Jupiter se présenta devant elle sous les traits de Diane.

Poème XVI

[10] Les amours des « tendres colombes » inspiraient les poètes de la Pléiade. A chaque instant, ils y revenaient. Voici quelques exemples, au hasard :

Ha ! tu devrais imiter les pigeons,
Qui bec en bec de baisers doux et longs
Se font l’amour sur le haut d’une souche.

Ronsard (Sonnets pour Astrée, sonnet XIV.)

Mon plaisir en ce mois c’est de voir les coloms
S’emboucher bec à bec de baisers doux et longs.

Ronsard (Sonnets pour Hélène, sonnet XXXV.)

Vois sur cet arbre à désir
Ces tourterelles mignardes
S’entrebaisoter tremblardes…
Vois (tant leur amour est forte)
Comme se voulant mêler
El’ se tachent engouler,
Tâchant de faire de sorte
De deux une seulement.

Baif (Les Amours.)

Poème XVII

[11] Olivier de Magny, secrétaire de Jean de Saint-Marcel, seigneur d’Avanson, était à Rome l’un des meilleurs amis de Joachim du Bellay. Tandis que l’un y écrivit ses Regrets, l’autre y composa ses Souspirs, œuvre parallèle. Et Magny a tiré du Poème XVII des Amours de Faustine le sonnet que voici :

Ces jours passez, comme Amour vouloit tendre
Son arc doré pour mon ame offencer,
Il aperçeut ma Dame s’avancer,
Qui de ce coup accouroit me defendre.
Lors en tel point il se sentit surprendre,
Que plein d’effroy, je luy vey commencer
Un train qui peult tous les vents devancer,
Tant peult ma Dame inutile le rendre :
Mais en fuyant, ses traits je vey tomber,
Et tout soubdain la belle se courber,
Qui les print tous. Depuis Cupidon erre
Tout desarmé, plein d’un amer ennuy,
Et ma Cypris des despouilles de luy
Fait ore aux dieux comme aux hommes la guerre.

(Les Souspirs, sonnet CX.)

Poème XIX

[12] Allusion aux événements du sac de Troie par les Grecs, et aux violences d’Ajax qui s’empara de Cassandre, fille de Priam.

Poème XX

[13] A la demande du pape Paul IV, une armée française, sous les ordres de François de Lorraine, duc de Guise, le vainqueur de Stenay et de Metz, fut envoyée dans le royaume de Naples en 1557, contre le duc d’Albe. Les troupes françaises furent à Rome le 2 mars. Au milieu d’elles, Joachim du Bellay rencontra Rémy Belleau, qui suivait René d’Elbeuf.

Joachim du Bellay célébra le départ des soldats français. Après le désastre de l’expédition, il écrivit un autre poème latin, à la mémoire des Français morts pour le pape Paul IV. Ce poème figure dans les Tumuli des Poemata, sous le titre : In Gallicam juventutem quæ pro Paulo IV. pont. max. bello Parthenopæo occubuit.

Poème XXI

[14] Aucun renseignement sur ce Polydore, qui semble avoir été l’un de ces « doctes esprits » de Rome que J. du Bellay se plut à fréquenter.

Poème XXIV

[15]

Nam mellita fuit…

Imité de Catulle (Épig. III, vers 6 — Sur la mort du moineau de Lesbie) :

Nam mellitus erat…

[16]

Ut vobis male sit…

Le poème étant visiblement écrit sous l’influence des souvenirs de Catulle, je pense qu’il y a lieu de considérer le ut donné par l’édition originale comme une faute d’impression, et de le remplacer par at. Ainsi se retrouvera plus exactement et plus logiquement le at vobis male sit, male tenebræ (vers 13) de Catulle.

Poème XXV

[17] J. du Bellay se souvenait probablement de ce poème de Jean Second :

Non dat basia, dat Neæra nectar,
Dat rores animæ suaveolentes,
Dat nardumque, thymumque, cinnamumque,
Et mel, quale jugis legunt Hymetti
Aut in cecropiis apes rosetis,
Atque hinc virgineis et inde ceris
Septum vimineo tegunt quasillo :
Quæ si multa mihi voranda dentur,
Immortalis in iis repente fiam
Magnorumque epulis fruar Deorum.
Sed tu munere parce, parce tali,
Aut mecum dea fac, Neæra, fias :
Non mensas sine te volo Deorum ;
Non, si me rutilis præesse regnis,
Excluso Jove, Dii deæque cogant.

(Basia, IV.)

[18] On retrouve les principales idées des Basia Faustinæ dans cet Autre Bayser des Jeux Rustiques :

Quand ton col de couleur de rose
Se donne à mon embrassement,
Et ton œil languist doulcement
D’une paupiere à demy close,
Mon ame se fond du desir
Dont elle est ardentement pleine,
Et ne peult souffrir à grand’peine
La force d’un si grand plaisir.
Puis quand j’approche de la tienne
Ma lèvre, et que si pres je suis
Que la fleur recueillir je puis
De ton haleine ambrosienne :
Quand le souspir de ces odeurs,
Ou noz deux langues qui se jouënt,
Moitement folastrent et nouënt,
Evente ces doulces ardeurs,
Il me semble estre assis à table
Avec les Dieux, tant suis heureux,
Et boire à longs traicts savoureux
Leur doulx breuvage delectable.
Si le bien qui au plus grand bien
Est plus prochain, prendre on me laisse,
Pourquoy ne permets-tu, maistresse,
Qu’encores le plus grand soit mien ?
As-tu peur que la jouissance
D’un si grand heur me face Dieu
Et que sans toy je vole au lieu
D’éternelle rejouissance ?
Belle, n’aye peur de cela,
Partout ou sera ta demeure,
Mon ciel, jusqu’à tant que je meure,
Et mon paradis sera là.

Poème XXVI

[19]

  • Lesbie : maîtresse de Catulle.
  • Délie : maîtresse de Tibulle.
  • Corinne : maîtresse d’Ovide.
  • Cynthie : maîtresse de Properce.
  • Lycoris : maîtresse de Gallus.
  • Stella : maîtresse de J.-J. Pontano.
  • Nina : maîtresse d’Actius Sincerus Sannazar.
  • Néère : maîtresse de Marulle.
  • Laure : maîtresse de Pétrarque.
  • Candide : maîtresse de Th. de Bèze.
  • Gelonis : maîtresse de Salmon Macrin.
  • Cassandre : maîtresse de Ronsard.
  • Pasithée : maîtresse de Pontus de Thyard.
  • Melline : maîtresse de Baïf.
  • Olive : maîtresse de J. du Bellay.

On remarquera que dans ce poëme, à un moment où il subit l’influence de Jean Second, Joachim du Bellay ne nomme pas celui qui fut évidemment un de ses maîtres en poésie latine. Est-ce coquetterie ? Il nomme Néère, qui fut chantée par Jean Second dans le Livre des Baisers, et l’on s’attend que, dans sa liste des poètes, il cite un tout autre poëte que Marulle, lequel chanta bien aussi une Néère et fut d’ailleurs à juste titre un des plus réputés des poètes néo-latins. Pourquoi Joachim du Bellay escamote-t-il Jean Second ?

Appendice I. — Poème 2

[20]

Nam castum esse decet pium poetam
Ipsum, versiculos nihil necesse est.

Ces deux vers sont en effet de Catulle : poème XVI, à Aurélius et Rufus, vers 5 et 6.

[21] Gallum : les Galles, prêtres de Cybèle, étaient eunuques.

Appendice I. — Poème 3

[22] Il s’agit probablement ici de Louis Bailleul, qui s’occupait d’archéologie, et qui servit de guide à J. du Bellay à travers les ruines de Rome.

Appendice II. — Patriæ desiderium

[23] Le thème de ce long poème latin est le thème de la plupart des sonnets dont se compose le livre des Regrets. En plus d’un endroit, Joachim du Bellay répète l’idée de tel vers isolé du Patriæ desiderium en un alexandrin ou en un tercet. Ailleurs, c’est un sonnet entier qui développe ou traduit un fragment de l’élégie latine. Nous donnerons ici quelques-uns des plus beaux sonnets qu’on peut rapprocher du Patriæ desiderium. Cependant, il faut noter qu’il n’est pas certain que le Patriæ desiderium soit antérieur à tous ces sonnets. Rien ne nous permet en effet d’affirmer que la version latine formant bloc précéda la version française dispersée. C’est peut-être de tous ces sonnets successifs que le poète se divertit à construire son long poème latin. Il convient donc de réserver la question de priorité, et de s’en tenir à la seule constatation d’un parallélisme curieux.

I

Quiconques (mon Bailleul) fait longuement séjour
Soubs un ciel incogneu, et quiconques endure
D’aller de port en port cherchant son adventure,
Et peult vivre estranger dessoubs un autre jour :
Qui peult mettre en oubly de ses parents l’amour,
L’amour de sa maistresse, et l’amour que nature
Nous fait porter au lieu de nostre nourriture,
Et voyage tousjours sans penser au retour :
Il est fils d’un rocher ou d’une ourse cruelle,
Et digne qui jadis ait succé la mamelle
D’une tygre inhumaine : encor ne void-on point
Que les fiers animaux en leurs forts ne retournent,
Et ceulx qui parmy nous domestiques séjournent,
Tousjours de la maison le doulx desir les poingt.

(Les Regrets, sonnet XXX.)

II

Ce pendant que tu dis ta Cassandre divine,
Les louanges du Roy, et l’héritier d’Hector,
Et ce Montmorancy, nostre François Nestor,
Et que de sa faveur Henry t’estime digne,
Je me pourmene seul sur la rive Latine,
La France regrettant, et regrettant encor
Mes antiques amis, mon plus riche tresor,
Et le plaisant séjour de ma terre Angevine.
Je regrette les bois, et les champs blondissans,
Les vignes, les jardins, et les prez verdissans,
Que mon fleuve traverse : icy pour recompense
Ne voyant que l’orgueil de ces monceaux pierreux,
Ou me tient attaché d’un espoir malheureux
Ce que possede moins celuy qui plus y pense.

(Les Regrets, sonnet XIX.)

III

Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage,
Ou comme cestuy là qui conquit la toison,
Et puis est retourné, plein d’usage et raison,
Vivre entre ses parents le reste de son aage !
Quand revoiray-je, helas, de mon petit village
Fumer la cheminée, et en quelle saison
Revoiray-je le clos de ma pauvre maison,
Qui m’est une province, et beaucoup d’avantage ?
Plus me plaist le séjour qu’ont basty mes ayeux,
Que des palais Romains le front audacieux :
Plus que le marbre dur me plaist l’ardoise fine,
Plus mon Loyre Gaulois que le Tybre Latin,
Plus mon petit Lyré que le mont Palatin,
Et plus que l’air marin la doulceur Angevine.

(Les Regrets, sonnet XXXI.)

IV

Las, ou est maintenant ce mespris de Fortune ?
Ou est ce cœur vainqueur de toute adversité,
Cest honneste desir de l’immortalité,
Et ceste honneste flamme au peuple non commune ?
Ou sont ces doulx plaisirs, qu’au soir soubs la nuict brune
Les Muses me donnoient, alors qu’en liberté
Dessus le verd tapy d’un rivage esquarté
Je les menois danser aux rayons de la Lune ?
Maintenant la Fortune est maistresse de moy,
Et mon cœur, qui souloit estre maistre de soy,
Est serf de mille maux et regrets qui m’ennuyent.
De la postérité je n’ay plus de souci,
Ceste divine ardeur, je ne l’ay plus aussi,
Et les Muses de moy, comme estranges, s’enfuyent.

(Les Regrets, sonnet VI.)

V

Ce n’est le fleuve Thusque au superbe rivage,
Ce n’est l’air des Latins, ny le mont Palatin,
Qui ores (mon Ronsard) me fait parler Latin,
Changeant à l’estranger mon naturel langage.
C’est l’ennuy de me voir trois ans et d’avantage,
Ainsi qu’un Prométhé, cloué sur l’Aventin,
Ou l’espoir misérable et mon cruel destin,
Non le joug amoureux, me detient en servage.
Et quoy (Ronsard) et quoy, si au bord estranger
Ovide osa sa langue en barbare changer
Afin d’estre entendu, qui me pourra reprendre
D’un change plus heureux ? nul, puis que le François,
Quoy qu’au Grec et Romain egalé tu te sois,
Au rivage Latin ne se peult faire entendre.

(Les Regrets, sonnet X.)

VI

Ce pendant que la court mes ouvrages lisoit,
Et que la sœur du Roy, l’unique Marguerite,
Me faisant plus d’honneur que n’estoit mon merite,
De son bel œil divin mes vers favorisoit,
Une fureur d’esprit au ciel me conduisoit
D’une aile qui la mort et les siècles evite,
Et le docte troppeau qui sur Parnasse habite,
De son feu plus divin mon ardeur attisoit.
Ores je suis muet, comme on void la Prophete,
Ne sentant plus le Dieu qui la tenoit sujette,
Perdre soudainement la fureur et la voix.
Et qui ne prend plaisir qu’un Prince luy commande ?
L’honneur nourrit les arts, et la Muse demande
Le theatre du peuple et la faveur des Roys.

(Les Regrets, sonnet VII.)

Appendice III. — Tumulus romæ veteris

De cette élégie latine, il faut rapprocher le sonnet suivant, des Antiquités de Rome (sonnet IV) :

Celle qui de son chef les estoilles passoit,
Et d’un pied sur Thetis, l’autre dessus l’Aurore,
D’une main sur la Scythe, et l’autre sur le More,
De la terre et du ciel la rondeur compassoit,
Juppiter ayant peur, si plus elle croissoit,
Que l’orgueil des Geans se relevast encore,
L’accabla sous ces monts, ces sept monts qui sont ore
Tumbeaux de la grandeur qui le ciel menassoit.
Il luy meist sur le chef la croppe Saturnale,
Puis dessus l’estomac assist la Quirinale,
Sur le ventre il planta l’antique Palatin,
Mist sur la dextre main la hauteur Celienne,
Sur la senestre assist l’eschine Exquilienne,
Viminal sur un pied, sur l’autre l’Aventin.
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