Le chat de misère: Idées et images
J'ai toujours entendu dire, depuis mon enfance, qu'elles étaient dérangées. Autrefois, elles étaient régulières. Il y a très longtemps qu'on ne s'en souvient plus, mais c'est une tradition certaine. Nous avons l'esprit d'ordre. Nous avons décidé que l'hiver est froid, l'été chaud, le printemps et l'automne tempérés, et nous sommes très étonnés que la nature n'obéisse pas à nos classifications et qu'elle ne distribue pas la température selon qu'il est établi dans les calendriers, ou plutôt selon un calendrier d'expérience, un calendrier local que nous substituons inconsciemment au calendrier astronomique. Ainsi le mois de décembre devrait être rigoureux d'après un de ces calendriers et, d'après l'autre, tempéré, au moins dans les trois premières semaines de son cours, puisqu'elles appartiennent à l'automne. Il est difficile que la nature obéisse à ces deux règles contradictoires, et cela nous permet d'être toujours mécontents et de la prendre en défaut, de quelque manière qu'elle se comporte. Car les hommes se plaignent également du beau et du mauvais temps, de celui qui amène les sécheresses réduisant les champs en poussière, de celui qui fait déborder les rivières, et il n'a pas tout à fait tort. Puis, dans les temps moyens et qui devraient, semble-t-il, contenter tout le monde, il est rare, si le citadin se réjouit de l'état du ciel, que le campagnard ne se répande pas en lamentations. Le seul résultat vraiment heureux et vraiment pratique des incertitudes de l'atmosphère, c'est qu'elles fournissent aux hommes un sujet inépuisable de conversation, un sujet facile, qui prête aux improvisations, aux commentaires légers, aux anecdotes et où chacun peut à son aise et à peu de frais, surtout, montrer son esprit et son caractère. On peut juger un homme rien qu'à la manière dont il parle du temps qu'il fait. En général, il est recommandé de ne pas y attacher une trop grande importance, et de le prendre comme il vient.