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Le chat de misère: Idées et images

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On a observé que les enfants, ce printemps, jouent aux bandits, dont la popularité a remplacé chez eux celle des aviateurs, et on gémit! Vraiment, il n'y a pas de quoi. Pour varier les jeux traditionnels, que rien ne peut détrôner, l'enfant joue à reproduire, à imiter les faits dont on parle, dont on s'entretient autour de lui. Cela a toujours eu lieu. S'il joue aux bandits, il faut s'en prendre aux journaux et aux parents qui s'intéressent plus que de raison à ces vilaines histoires. Est-ce qu'on exigerait, par exemple, plus de bon sens de la part des enfants que de celle de leurs auteurs? Vous avez des enfants tout juste dignes de votre bassesse d'esprit. De quoi vous plaignez-vous? D'ailleurs le banditisme innocent ne règne pas tout seul sur la jeunesse des écoles primaires. J'en vis, l'autre jour, qui jouaient aux Colonies; même qu'ils voulurent bien, comme je les regardais faire, me prendre pour arbitre dans un cas épineux. Voici. On dessine un grand rectangle aux deux bouts duquel on marque deux pays, comme la France et la Chine. Il faut aller de l'un à l'autre, à cloche-pied, en poussant un palet, sans broncher. Alors on a gagné une colonie et, dans l'épreuve suivante, on a le droit de se reposer un instant dans cette colonie que l'on a située vers le milieu du rectangle. Ce jeu est assez répandu. Je l'ai retrouvé, sans le chercher, en plusieurs endroits, ainsi qu'un autre jeu géographique, qui m'est resté obscur. A cet âge heureux, en 1870, au lycée où je venais d'entrer, on jouait à la Guerre: on livrait des batailles, on assiégeait des forteresses. Même que je fus blessé à l'un de ces assauts, qui ne manquait pas de frénésie. Un mois ou deux d'infirmerie, le temps d'être évacué sur la campagne et de laisser la place aux blessés de la vraie guerre. Le monde des enfants est le monde de l'imitation.


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