Le chat de misère: Idées et images
Cela lui apprendra à donner son avis sur les pantomimes et surtout à le donner non conforme à la plus exacte et à la plus récente pruderie! S'il s'était tu ou s'il avait déclaré que l'Après-midi d'un Faune était une turpitude, nul n'aurait songé à lui reprocher l'occupation de l'Hôtel Biron et de l'ancienne chapelle du couvent du Sacré-Cœur. Mais il a trouvé harmonieux des gestes que ses ennemis réprouvaient, et voilà que les injures s'amassent contre lui. La plus plaisante a été de trouver sacrilège l'exposition de ses œuvres dans un lieu où, il n'y a pas encore bien longtemps, on exposait le Saint-Sacrement à l'adoration des fidèles. L'esprit de la Restauration nous pénètre. Quel soulagement dans certains cœurs si on promulguait à nouveau la loi du Sacrilège, dont on ne sait même plus ce que c'est, mais dont le nom dit assez qu'elle était une loi de défense religieuse. Vraiment on s'attendait à tous les déchaînements contre Rodin, qui a des ennemis innombrables, mais pas à celui-là. En quoi on a eu tort, car tout arrive et on a été jusqu'à faire grief d'avoir montré trop d'admiration pour les vieilles cathédrales. Il est vrai que quand on admire tant les monuments religieux du Moyen Age, on est suspect de ne pas goûter comme il conviendrait la religion politique des présentes années. On a dit aussi, et ce ne fut pas moins surprenant: M. de Max, qui est un artiste (presque) aussi grand que M. Rodin, a bien été expulsé de l'Hôtel Biron... J'ai mis presque entre parenthèses parce que je suis (presque) sûr qu'il a été ajouté en interligne. Voilà le ton des polémiques contre un grand sculpteur. Il est édifiant. On insinue enfin que l'atelier de Rodin nous coûte un loyer de 250.000 francs. Moi, je trouve que cela n'est pas trop cher pour loger Michel-Ange.