Le chat de misère: Idées et images
On a lu l'histoire de cette jeune fille qui s'est tuée parce qu'elle avait échoué à ses examens. Pauvres petites femmes! Vraiment, elles ne sont pas de force. Elles prennent tout au sérieux, même un examen. Que veut-on qu'elles fassent dans la vie, qu'elles songent à quitter à la première déception? Il fallait au moins attendre le premier chagrin d'amour, mais se tuer parce qu'une vieille bête de professeur vous a posé en géographie ou en littérature une colle stupide! Il ne faut pas donner aux autres un tel empire sur soi. Une fille jeune et jolie est au-dessus d'un examen, lequel n'a, ou devrait n'avoir, aucune sorte d'importance. Une femme a-t-elle plus ou moins de valeur, parce qu'elle fait ou ne fait pas de fautes d'orthographe. Ah; maudits soient les imbéciles qui ont ainsi travesti les instincts de la femme, perverti leur sensibilité, inventé pour leur faiblesse je ne sais quel romantisme scolaire. On leur enseigne et elles croient sincèrement que l'arithmétique est une sorte de bible dont il faut pénétrer les mystères pour avoir droit à la vie, et que, lorsqu'on les a méconnus, il ne reste plus que le désespoir ou la mort. Et autant de connaissances diverses, autant de bibles nouvelles à vénérer! On perdrait la tête à moins. La jeune Slave est donc allée à Notre-Dame, et là, s'étant agenouillée et ayant prié dans son innocence et sa fièvre, elle s'est tiré un coup de revolver dans la bouche. Quelle pitié, et quel désarroi dans les cervelles! Je n'ose pas dire: quelle bêtise! parce que la mort violente d'une jeune fille, cela a toujours quelque chose d'émouvant, mais quelle mauvaise éducation, quelle dilapidation des vraies valeurs féminines!