Le livre des visions et instructions de la bienheureuse Angèle de Foligno: Traduit par Ernest Hello avec avertissement de Georges Goyau, de l'Académie française
VINGT-HUITIÈME CHAPITRE
LA CERTITUDE
Quelque temps après ma conversion, c’était ce jour-là une des fêtes de la Vierge, je la suppliai de m’obtenir cette grâce immense, la certitude de n’être pas trompée par les voix qui me parlaient. Je reçus une réponse qui était une promesse, et la voix qui parlait ajouta :
« Dieu s’est manifesté à toi, il t’a parlé, il t’a donné de Lui le sentiment qu’il en a lui-même. Evite donc de parler, de voir et d’entendre, autrement que selon Lui. »
Je sentais dans celui qui parlait une discrétion et une maturité inexprimables. Je demeurai dans la joie et dans l’espérance, avec le sentiment de la prière exaucée. Il me fut dit au même instant que je n’agirais plus autrement que par la conduite de Dieu. Voir, parler, entendre selon Lui ! Je commençai à faire ces trois choses ; tout à coup mon cœur fut soulevé de la terre et posé en Dieu, et quand il fallut descendre aux choses de la vie, comme parler ou manger, rien ne dérangea mon cœur de sa position ; je ne pouvais ni penser, ni voir, ni sentir que Dieu. Quand, à la fin de l’oraison, j’allais prendre de la nourriture, j’en demandais la permission : « Va, disait la voix, mange avec la bénédiction du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. » Quelquefois la permission se faisait attendre, quelquefois non. Cela dura trois jours et trois nuits.
Enfin, ravie en esprit, pendant la messe, je vis Dieu au moment de l’élévation. Après cette vision, il resta en moi une douceur inénarrable et une joie immense qui durera toute ma vie. C’est dans cette vision que je reçus l’assurance demandée, et le doute prit la fuite. Je reçus pleine satisfaction ; j’eus la certitude de Dieu m’ayant parlé.