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Les angoysses douloureuses qui procedent damours

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Les approches des deux amans pour parler ensemble.
Chapitre. VII.

Ainsi doncques perseveray tousjours de suyvre la maulvaise partie de mon esprit, & n’eurent puissance les propos & derisions (dont usoyt mon amy) de me sçavoir desmouvoir de ma follie : mais parce que j’avoye les jours precedens observé le commandement de mon mary, en dissimulant l’ardente flamme qui me brusloit & consumoyt, qui est une chose fort difficile, il me fut imparty plus de liberté que je n’avoye eu de long temps : car j’alloye au temple seulement en compaignie de l’une de mes familieres damoyselles, dont j’estoye fort joyeuse, pensant que mon amy auroit opportunité de parler, & pour l’inciter, je me tenoye dedans le temple jusques a ce qu’il estoit vuyde de toutes gens, & continuay ainsi par plusieurs jours, nonobstant il ne se advançoit de parler, dont estoye esmerveillee, & ymaginoye que ce qu’il differoit luy procedoit de pusillanimité, toutesfoys je ne lassay de persister, & ung jour entre aultres, je vey qu’il estoit plus pensif qu’il n’avoit accoustumé, & se promenoit seul tenant son bonnet en sa main, pour me donner recreation en voyant ses beaux cheveux tant bien pignez. Et apres qu’il se fut assez pourmené, il entra en une chapelle ou on commençoit a faire le divin service, parquoy j’eu occasion honneste de me lever, & aller pres de luy. Je veoye qu’il regardoit souvent entour luy, & aussi faisois je pareillement, & croys que noz pensees n’estoient differentes, car tous deux d’ung vouloir unanime avions timeur de la survenue de mon mary : & incontinent le service divin faict & accomply, il commença a se pourmener, mais il ne tarda gueres qu’il ne se vint presenter devant moy, en me saluant & regardant d’ung œil doulx & amoureux, & dict ainsi.

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