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Miette et Noré

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L’ENSORCELÉE

PRÉLUDE

C’est une histoire vieille, vieille,
Vieille comme l’amour.
O les filles ! prêtez l’oreille
A l’histoire d’amour.
Il était une demoiselle
La taille faite au tour,
Beau visage, enfin toute belle
A sembler faite au tour !
Passe un garçon qui la regarde,
Aussi beau que le jour…
« Le gueux, dit-elle, — prenons garde ! —
Est plus beau que le jour ! »
Tous aimaient cette beauté fraîche ;
Lui, qui l’aime à son tour,
S’approche, parle et si bien prêche
Qu’elle l’aime à son tour.
Il lui dit : « Si j’avais un trône,
Si j’avais une cour,
Vous vêtirais de bel or jaune ;
Seriez reine à ma cour ! »
C’était un joli bavardage
Pour faire un vilain tour !
Ne la prit pas en mariage ;
Lui fit ce joli tour !
Neuf mois passés, pleurait la belle
En criant au secours.
Elle était mère et demoiselle,
La pauvre, et sans secours !
Le curé contre la maudite
Fit en chaire un discours.
La pauvre dut se mettre en fuite,
A cause des discours.
Et dans les bois se fit sorcière,
Se damna pour toujours ;
Au diable elle a fait sa prière :
Il la tient pour toujours !
… Songe, si tu te sens, ma fille,
Le désir de l’amour,
Que le diable, quand il s’habille,
Prend l’habit de l’amour !
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