Histoire du XIXe siècle (volume 1/3) : $b I. Directoire. Origine des Bonaparte
CHAPITRE VI
LES JOURNÉES DE GERMINAL (1er AVRIL). — MASSACRES
DE LYON (5 MAI 95).
L’Assemblée se rendait peu compte de ces grandes puissances souterraines qui travaillaient la France. Elle ne regardait que Paris.
La paix prochaine avec la Prusse, la belle campagne de Hollande conquise en plein hiver égayaient bien peu son regard. Elle ne voyait que Paris.
Le grand moment d’expansion de novembre, à la clôture des Jacobins, la création magnifique de toutes nos grandes écoles, était déjà loin. La difficulté croissante de l’arrivage des vivres, la panique de l’assignat, l’interminable dispute que sa valeur variable mettait aux moindres affaires, tout avait terriblement assombri la situation. Elle alla s’embrumant, s’enténébrant, et les longs jours aigres, froids, nécessiteux du printemps, étaient loin de l’éclaircir. Au contraire, par l’excès des maux, ils amenèrent de telles crises que l’Assemblée, ballottée au vent des peurs et des colères, fut toute au combat de Paris, et perdit de vue le reste, laissa la France, le monde, devenir ce qu’ils voudraient.
Ce qui me frappe le plus dans cette salle si obscure de la Convention et dans ce noir Paris d’hiver, c’est la prodigieuse dépense d’imagination qu’on y fait, de fureurs (non jouées, sincères), de vaines accusations, surtout d’illusions, de songes. L’historien des anciens âges y croirait revoir quelque chose du Paris fou de Charles VI, de la fantastique fumée de ces époques étranges où tout paraît plein du démon.
Si crédules après Voltaire ! Après un siècle raisonneur, si peu de raisonnement ! un déchaînement si fort, si aveugle, de la fantaisie !… On le croit à peine.
Il est certain que deux légendes dominaient la situation, — absurdes au total, quoiqu’il s’y mêlât un peu de réalité.
D’un côté, les masses ouvrières, le peuple en général, disait : « On veut que nous mourions de faim. »
De l’autre, les classes marchandes, l’innombrable petit rentier disait, croyait : « Un complot se fait entre les Jacobins pour recommencer la Terreur, massacrer la Convention, et la moitié de Paris. »
Des noms propres aidaient la légende. La haine de l’assignat s’en prenait surtout à Cambon. La rareté, la cherté des vivres venait de celui qui passait pour s’occuper des subsistances, du député Boissy d’Anglas. On l’appelait Boissy-famine. C’était un protestant de l’Ardèche, un avocat d’Annonay, qui s’était procuré le titre d’une charge de cour (maître d’hôtel de Monsieur), académicien de province, d’une politesse empesée et qui paraissait servile. Il avait l’air, dit Mercier, « d’avoir toujours sous le bras sa serviette de maître d’hôtel. »
La terrible tradition du Pacte de famine, sous forme différente, revient dans les esprits. Écoutez dans la longue queue qui se fait la nuit pour le pain. Vous entendez ceci : « Il y a trop de monde en France. Le gouvernement y met ordre. Il faut qu’on meure, qu’on meure… » C’est ce qui, dans Vilatte, Babeuf, etc., prend la formule atroce du Système de dépeuplement. Tous en parlent, et le pis, c’est qu’ils y sont crédules. Tous les partis se lancent, se relancent cette pierre à la tête.
Qu’il y ait eu, comme toujours, de gros spéculateurs en blé, cela ne fait pas doute. Mais c’était cependant le moindre côté de la question. La grande cause générale et terrible de la disette de Paris, c’est que personne ne voulait y venir. C’est que tous les fermiers fuyaient et redoutaient le marché parisien.
Forcés sous la Terreur d’y apporter, d’y vendre aux plus mauvaises conditions, ils s’en dédommageaient maintenant en n’y venant plus. Le blé s’en allait à Rouen, Évreux, Reims, Orléans. On aurait dit qu’après la contraction, une force centrifuge énorme, irrésistible, emportait les denrées au loin.
On eût voulu que, dans un rayon de vingt lieues à peu près, la campagne nourrît Paris. Mais ceux de Vernon, par exemple, qui étaient juste à vingt lieues, refusaient, se battaient plutôt que d’y venir.
Le marché de Paris, sur un terrain si bouillonnant, dans ces grandes foules inflammables, effrayait le vendeur. Il n’était pas à l’aise, entouré et pressé des masses faméliques, défiantes, prêtes aux aigres disputes. Disputes sur les prix, sur la valeur de l’assignat. Fureurs contre ceux qui achètent à bon marché en numéraire. Injures fort dangereuses, lancées légèrement, les noms d’accapareurs, d’affameurs, d’assassins du peuple. Et, si l’on ripostait, le fermier, sa charrette, pouvaient être mis en fourrière, traînés à la section, interrogés de fort mauvaise humeur, non sans danger à la sortie.
Comment remédier à cela ? L’autorité nouvelle (quoi qu’on ait dit) n’y fut pas négligente, elle y fit des efforts incroyables, autant et plus de sacrifices qu’on n’avait fait dans la Terreur. Comparons deux chiffres certains.
L’homme de l’ancien Comité de salut public, Lindet, nous dit qu’en douze mois il fit venir deux millions et demi de quintaux de grains, donc, deux cent mille par mois, pour la France entière.
Boissy d’Anglas affirme que le nouveau Comité fit venir huit cent cinquante mille quintaux en quatre mois, donc, plus de deux cent mille par mois pour la seule ville de Paris.
Grand effort, mais très vain. Nulle action gouvernementale ne supplée le commerce, l’action de l’industrie privée.
De ces réalités cruelles sortaient des accusations violentes, un dialogue atroce :
« D’où viennent la misère et la faim, la cherté, le chômage, l’absence de travail, de commerce ? »
Des affameurs, disaient les uns, des spéculateurs, de leurs compères les députés.
Et les autres : Du complot jacobin, de la queue de Robespierre. Tant qu’ils brouillent, on ne peut rien faire. Avec eux il faut en finir.
Dans un tel état des esprits, le moindre bruit frappait et effrayait. Sur un cri des tribunes, sur un mot emporté de Ruamps, de Duhem, l’Assemblée s’émouvait. Les Girondins montraient le poing à la Montagne, criaient : « Voyez-vous le complot ? »
Dans Paris, le cours de Laharpe avait un effet incroyable. Ce bavard, converti par une noble dame en prison, prêchait maintenant contre lui-même, donnait au public ce spectacle d’un terroriste accusant la Terreur. Un certain groupe autour de lui se formait, une société violente de réaction. De son Lycée, la jeunesse élégante s’élançait au théâtre, y chantait le réveil du peuple et faisait taire la Marseillaise. Mais elle se heurta à des masses hostiles, la plupart étaient des élèves de l’École normale. Si loin dans l’insolence allèrent les muscadins que l’Assemblée finit par s’indigner. On cerna un théâtre, on en enleva deux cents qui furent conduits aux Gravilliers et durement tancés par cette section patriote.
En revanche, on fit faire par l’enragé Fréron l’accusation en règle des Jacobins (9 février, 21 pluviôse). Ramassant leurs propos furieux, insensés, leur prêtant un accord qu’ils n’avaient nullement, il combina tels mots du faubourg Saint-Antoine, et tels de Saint-Marceau. Dans la réalité, Babeuf s’était rapproché d’eux. Mais cette coalition des deux clubs rivaux naguère n’était menée par nul homme d’action. Celui qui l’eût conduite, rendue redoutable peut-être, Lazouski, l’homme du 10 août, venait justement de mourir.
Fréron affirmait, soutenait qu’on tuerait cent représentants, girondins ou thermidoriens.
Accusation sans preuve, mais dont l’effet certain était d’exaspérer les haines et les frayeurs. On arrêta Babeuf (21 février). Et, le 2 mars, le déclamateur Saladin, dans un rapport contre Collot, Billaud, Vadier, Barère, entama réellement un procès contre la Montagne. Il n’allait pas à moins qu’à frapper tour à tour une centaine de représentants qui en 93 avaient été en mission.
Un député de la Seine-Inférieure, Faure, disait sagement que le procès des quatre devait être remis à un an. Mais on n’écouta rien. Legendre fit voter qu’ils seraient à l’instant mis en arrestation.
Fatal commencement, qui, de nouveau, allait ouvrir la voie à une opération barbare de l’Assemblée sur elle-même. Un homme le sentit, de peu de portée, mais honnête, qui suivait toujours son cœur ; il fut en août, l’organe du mouvement alors si général contre le Terrorisme. Lecointre, le 19 mars, retourné violemment, étonna tout le monde, en demandant la Constitution de 93.
Les plus sages de la Montagne, Romme, Goujon, etc., applaudirent et avec raison. Quelque jugement qu’on porte sur cette machine impossible, elle pouvait utilement servir à enrayer sur la pente où l’on glissait, retarder la réaction.
Dès le 17, avait eu lieu, au faubourg Saint-Marceau, un rassemblement d’affamés. Le 21 (1er germinal), une masse du faubourg Saint-Antoine vint demander à l’assemblée la Constitution de 93 et la fin des disputes, c’est-à-dire, prier l’assemblée de ne pas se tuer elle-même.
Pétition fort mal reçue des modérés. Ils firent faire par Sieyès une loi de police, menaçante et de peu d’effet :
« Qui viole l’assemblée est déporté, qui insulte un député est mis à mort. En cas de trouble, on siégera à Châlons, et (chose infiniment dangereuse, imprudente), on appellera de chaque armée une force qui protège la Convention. »
La faim n’a peur de rien. Le 7 germinal (27 mars) on ne put distribuer le matin qu’une demi-livre de pain ; autant devait en venir le soir. Mais on n’attendit pas. Au centre de Paris, les femmes se soulevèrent, marchèrent sur la Convention.
Boissy expliqua parfaitement la situation. Paris consommait beaucoup plus, ayant une foule de mangeurs étrangers, au moins 50,000 (plus 8,000 militaires destitués, fort embarrassants). Les convois de farine arrivaient lentement, étant trop souvent retenus, arrêtés en chemin par des populations qui criaient qu’on les affamait. A Paris, quoi qu’on fît, plusieurs prenaient trop, s’approvisionnaient pour plusieurs jours. La banlieue trouvait cent moyens d’emporter du pain de Paris.
Des représentants en personne allaient presser les arrivages. On ne les écoutait pas. On les menaçait même. Plusieurs furent en danger. Emploieraient-ils la force ? Faudrait-il revenir aux moyens de terreur ?
L’hésitation où l’on était, et la difficulté d’organiser cette force qui fît venir les fermiers malgré eux, prolongèrent la situation. Les souffrances étaient visibles, incontestables. Mais l’Assemblée croyait qu’un complot jacobin les exploitait et soulevait le peuple. Alarmée de l’éclat du 7, elle semblait vouloir profiter de la loi nouvelle, s’établir à Châlons, laisser Paris à la misère, au désespoir.
Elle suivait avec passion son procès contre la Terreur. Passion fort aveugle, qui, les yeux fermés, confondait les deux fractions opposées du précédent gouvernement, poursuivait à la fois les instruments de Robespierre (Herman, Fouquier), et les ennemis de Robespierre (Collot, Billaud, Vadier, etc.).
Le 8, s’ouvre à grand bruit le procès de Fouquier-Tinville, d’Herman, etc. Le 12 (comme on va voir), on déporte Collot, Billaud… les furieux de 93.
Nulle preuve que ces deux terrorismes, qu’on poursuivait, eussent fait un complot. Ce fut tout simplement une distribution de pain retardée qui (le 12 germinal, 1er avril) porta un flot de femmes à la Convention. Elles menaient leurs enfants avec elles. Cette grande masse, poussée par derrière, força la garde, tomba dans l’Assemblée. Elles criaient : « Du pain ! du pain ! » Carnot dit dans ses notes (voy. Mém.) que ce rassemblement n’était nullement menaçant.
Même les pétitions que les hommes apportèrent ensuite, quelque diverses qu’elles fussent, démagogiques ou non, s’accordaient en ceci : « qu’elles priaient la Convention de rester à son poste », donc lui accordaient confiance.
Avant l’entrée de cette foule, l’excellent Lanthenas, le girondin (et l’ami des Roland), avait supplié les représentants de prendre une mesure d’équité pacificatrice : « de rassurer les patriotes, qui, égarés dans la Terreur, avaient nui sans intention. »
Mais quelques fous de la Montagne, Ruamps le maratiste, et un certain Bourgeois, exaspérèrent l’Assemblée par des mots d’une calomnieuse fureur : Que les comités, par exemple, soldaient les muscadins, qu’ils organisaient la famine. Ce mot, dans un tel jour, pouvait avoir une portée terrible. La Convention se contint, mais le soir, mais la nuit, frappa cruellement.
Tout cela se passait à travers un fort long rapport de Boissy, souvent interrompu, mais qui finalement proposait de céder à la voix de Paris, de revenir aux moyens de contrainte pour l’approvisionner par réquisition. Pour réussir on devait, dans chacune des sections, élire et armer cinquante hommes.
Mais que feraient ces hommes ? On n’osait dire encore qu’ils obligeraient les fermiers d’apporter. On disait seulement « que, commandés par des représentants, ils protégeraient les arrivages. »
Vaine et molle rédaction. Legendre dit : « Cela ne sert à rien sans une loi qui force le fermier à vendre à un prix raisonnable. »
Et Goujon ajouta : « Cela ne sert à rien, si les réquisitions pour Paris, se font dans des lieux où achètent des districts plus éloignés » (si Vernon, par exemple, fournit Rouen plus que Paris).
Les moyens vigoureux vers lesquels l’Assemblée aurait penché peut-être, furent singulièrement énervés par un article doucereux que Sergent fit joindre au décret, à savoir « que les Parisiens armés qu’on envoyait, s’aideraient au besoin de la garde nationale de la localité. » C’est-à-dire que, pour faire ces réquisitions, ils s’appuieraient de ceux qui, de tout leur pouvoir, les empêchaient.
Cependant les prières, les instances de la Montagne décident la foule à partir. On étouffait. L’Assemblée, rendue à elle-même, restait très-indignée et non pas seulement les rétrogrades, mais des républicains sincères (comme Chénier). Le président André Dumont, en profita pour que l’on fît une chose odieuse, ce fut de décréter non pas l’accusation des quatre (Collot, Billaud, etc.), mais leur déportation sans jugement. Sauvage précipitation qu’on n’avait pas montrée pour Carrier même, quatre ou cinq mois auparavant.
La nuit était venue, et des bruits s’étaient répandus très-irritants. On disait qu’Auguis et Pénières, deux représentants, avaient été tués et blessés. Auguis, ancien dragon, fort colérique et provocant, s’était jeté au travers des quartiers les plus émus (Saint-Jacques, etc.), on lui avait arraché son écharpe, il avait reçu une égratignure. Pénières venu à son secours, fut prisonnier, et l’on tira sur lui, heureusement sans l’atteindre. Ces deux victimes ramenées en grand appareil théâtral, mirent l’Assemblée hors d’elle-même. On venait de souper, tout le monde parlait et jetait des cris de vengeance. Jusqu’au matin du 13, on prescrivit, sans ordre et au hasard, celui-ci, celui-là, Ruamps, Duhem, Choudieu, Amar, Moïse Bayle, Rossignol, etc. Cela allait si vite, que l’un des plus violents proscripteurs, Bourdon de l’Oise, lui-même arrêta, dit : « Assez. »
Le furieux Fréron exagérant toujours, jurait que la révolte était dans Notre-Dame, s’y fortifiait : On donna le commandement au général Pichegru, à Barras, et Merlin de Thionville, qui se promenèrent dans Paris, ne trouvèrent rien. Aux Champs-Elysées seulement, un groupe essaya d’arrêter les voitures où étaient les déportés qui n’en allèrent pas moins à Ham.
L’Assemblée obéie, maîtresse de Paris, aurait dû se calmer, et elle ne le pouvait. Elle allait furieuse et sans trop savoir où. Ses défiances étaient telles, que les Girondins mêmes en venaient à s’accuser entre eux. Louvet, Daunou leur semblaient terroristes. Un des collègues de Daunou, son très-intime ami, qui avait été en prison avec lui et avec les 73, lui disait avec larmes, le serrant dans ses bras : « Par tout ce qui est sacré, je t’en prie, dis-le-moi. Embrassé-je un ami ou bien un assassin ? » (Voy. Taillandier.)
Ainsi se faisaient les ténèbres. On se frappait, à vrai dire, dans la nuit. En déportant Collot, Billaud, on arrête Lecointre, justement l’homme qui les a dénoncés !
On hurla quatre jours : « Faites arrêter Cambon ! » La Convention le vota !… Démence !
C’était précisément revenir au 9 thermidor. Ce jour, on s’en souvient, fut décidé par l’attaque imprudente de Robespierre contre Cambon. L’émeute des rentiers contre lui fit croire à Robespierre qu’il pouvait faire sauter le grand chef des finances. Mais en s’aidant ainsi de l’irritation des rentiers, on risquait d’alarmer une autre classe, immense, tous ceux qui sous cette administration avaient traité avec l’État, les acquéreurs surtout de biens nationaux. Ce nom, qui fut celui de la probité inflexible, couvrait, garantissait la fortune publique. Cambon de moins, c’était la banqueroute. L’arrêter, c’était d’un seul coup tarir la vente, éreinter l’assignat.
Les royalistes se tenaient jusque-là avec quelque pudeur. Ils prenaient d’autres noms. Ils ne se gênèrent plus en voyant l’Assemblée se proscrire elle-même. A Rouen, on attaqua l’hôtel de ville aux cris de « Vive le Roi ! » (15 avril). Le 20 (le 1er floréal), l’intrigant Cormatin se fait à Rennes une entrée triomphale. M. de Précy est dans Lyon, refait la garde nationale, et il n’admet comme officiers que ceux qui ont porté les armes contre la convention.
Par la frontière de Suisse, rentraient en foule les émigrés avec de faux passeports. C’est un flot de fureur, de haine et de vengeance qui s’engouffre au volcan de Lyon.
L’Assemblée eût frémi si elle eût deviné l’effet que ses emportements allaient avoir au loin. Tout ce qui, dans Paris, s’était passé en cris, en injures, en arrestations (la plupart passagères), à Lyon et au Midi se reproduisit bientôt en sanglantes exécutions.
L’innocent Germinal de Paris devient là-bas un 2 septembre.
Pour en arriver là et frapper un grand coup, on faisait circuler des bruits ridicules, insensés : « que les Jacobins relevés allaient opérer désormais avec un instrument nouveau, une guillotine à sept tranchants. » Les représentants Boisset et Cadroy voyaient monter le flot, ne s’opposaient à rien. Le 16 floréal au soir (5 mai 95), on se réunit aux spectacles et de là, les 300 compagnons de Jésus, en trois bandes, se portent aux prisons. Dans l’une les détenus se défendent en désespérés. Mais on emploie le feu, on les brûle vivants. Du plus haut, une femme, son enfant dans les bras, se lança dans les flammes. Cent personnes à peu près périrent.
Cadroy écrit à la Convention, mais en faveur des massacreurs, pauvres gens, qui n’ont fait que venger leurs parents. On les juge pour la forme, ils sont acquittés à Roanne. A leur rentrée dans Lyon, les pieuses dames, les bons royalistes, s’en vont les recevoir, et couvrent leur chemin de fleurs. Ils paradent au théâtre. La sensibilité publique les entoure, les accueille, et leur met sur le front la couronne de l’assassinat.