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L'évolution actuelle du monde: illusions et réalités

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CONCLUSIONS

Les conclusions diverses que comporte cet ouvrage ayant déjà été résumées dans plusieurs chapitres, il suffira de rappeler les plus importantes.

Elles ne sont pas nombreuses. L’âge moderne représente, en effet, une période de conflits dont l’issue reste ignorée, entre des illusions politiques et des nécessités économiques nouvelles.

Parmi ces illusions le socialisme joue un rôle prépondérant. Comme le christianisme à ses débuts, il est devenu la religion des mécontents et des inadaptés que les grandes civilisations suscitent fatalement.

Tous ces infériorisés de la vie rêvent de ramener un monde trop élevé pour eux à des formes d’organisation mieux en rapport avec leur mentalité.

Si le socialisme triomphait en Occident, les États-Unis hériteraient du flambeau de la civilisation, pendant que les grandes capitales européennes subiraient une décadence analogue à celle dont la Russie socialisée est devenue victime.


En même temps que grandissait le rôle perturbateur des illusions politiques grandissait aussi l’influence de la science dans toutes les formes de l’évolution moderne. Elle a transformé l’existence matérielle des peuples et aussi leur pensée.

Son action dans le monde moral est loin cependant d’avoir égalé son rôle dans le monde matériel. Elle s’est montrée incapable d’établir la paix entre les hommes et de créer un idéal assez fort pour les orienter.

Malgré ses patientes investigations, la philosophie n’a pas mieux réussi que la science à résoudre les grands problèmes qui se posent à la curiosité des penseurs : l’univers est-il fini ou infini, créé vu incréé, éphémère ou éternel, de quelles sources mystérieuses dérivent la vie et la pensée, l’homme n’est-il qu’un infime atome perdu dans une immensité à laquelle il est impossible d’attribuer un commencement ni d’entrevoir une fin ? Insolubles problèmes.

Et c’est pourquoi les peuples toujours avides d’illusoires espérances se retournent vers les divinités du passé ou se soumettent aveuglément à des doctrines auxquelles sont attribués de magiques pouvoirs.


Ce n’est pas seulement parce que la philosophie et la science semblent impuissantes encore à régir le monde moral que la religiosité ancestrale est si lente à disparaître. C’est aussi parce que les abstractions savantes sont trop froides pour séduire les cœurs. Les temples de la connaissance, constitués par les laboratoires, ont d’ailleurs une architecture bien sévère auprès de celle des édifices grandioses où, à l’ombre des autels, s’élaborèrent pendant tant de siècles les mobiles de l’activité des hommes. Apôtres de la science et apôtres des religions ne parlent pas la même langue. Alors que les seconds promettent les futures félicités d’un éternel paradis, les premiers ne s’occupent que de présentes réalités.


L’évolution des points fondamentaux de la pensée humaine, depuis les origines de l’histoire, peut être résumée de la façon suivante :

Dès que l’homme put réfléchir un peu il se sentit dominé par des forces supérieures que la crainte et l’espérance divinisèrent bientôt. Jupiter lançait la foudre, Neptune soulevait les flots, Cérès faisait mûrir les moissons.

Des siècles de recherches furent nécessaires pour découvrir que les dieux personnels étaient l’illusoire image de forces impersonnelles inaccessibles à la prière. Ce ne fut plus alors Jupiter, mais l’électricité, qui produisit la foudre, ce ne fut plus Neptune, mais l’attraction de certains astres, qui souleva les mers.

Sans doute, la nature intime de ces forces restait complètement ignorée, mais l’on savait au moins qu’elles ne résultaient pas de divins caprices.

Ce passage des anciens dieux personnels à des forces impersonnelles constitue un des grands progrès de l’esprit humain ; ses conséquences ont été capitales.

L’homme, d’abord esclave d’une nature soumise à des lois tellement rigides que les dieux seuls pouvaient en changer le cours, devenait capable de lutter victorieusement contre elle.

De cette grande découverte résultèrent des transformations profondes dans la marche des civilisations. Conquérir les forces de la nature sembla plus efficace alors que de solliciter la protection des dieux.

Avec les progrès nés de cette conquête des horizons imprévus surgissent et déjà s’entrevoit l’aurore d’une humanité nouvelle assez évoluée pour comprendre, avec les raisons premières des choses, les mystères formidables dont le monde reste encore enveloppé.

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