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La nouvelle cuisinière bourgeoise: Plaisirs de la table et soucis du ménage

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DIALOGUE DES POMMES ET DES POISSONS

Les pommes ont dit aux poissons :
— Assez longtemps le langage des hommes
A prétendu que vous, Poissons, pour nous les Pommes,
Professiez un mépris aveugle et sans raison ;
On répète : s’en ficher comme
Se fiche un poisson d’une pomme ;
Pourquoi ? comment avons-nous mérité,
A vos yeux, cet excès, Poissons, d’indignité ? —
Les poissons gardent le silence,
Comme c’est assez dans leurs habitudes ;
Mais le débat n’est pas de ceux que l’on élude,
Et les pommes reprennent avec insistance :
— Pardieu ! nous connaissons votre passé hautain,
Et qu’autour d’un turbot tout le Sénat latin
S’assemblait, plein de déférence ;
Nous savons qu’un des grands ministres de la France,
O soles, vous a seules laissées,
A la Colbert,
Dépositaires
De ses goûts et de ses pensées ;
Tout cela est glorieux, certes,
Mais, de là, faut-il qu’on nous traite
Avec ce dédain ? Car, enfin,
Nous aussi nous avons, Poissons, nos parchemins :
Mieux que ministre franc, ou sénateur latin,
Nous avons la pomme Reinette !… —
(Reinette s’écrit rainette, mais je suppose
Que les Pommes, sans l’ignorer,
Ont fait cet affront à Littré
Pour les besoins de la cause…)
— Reinette, petite Reine : comme Wilhelmine ! —
Mais, à ces mots, parmi les autres empressés,
Un petit poisson s’est avancé,
Devant qui tous, respectueux, s’inclinent :
— Et moi, je m’appelle la Loubine ! —
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