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La nouvelle cuisinière bourgeoise: Plaisirs de la table et soucis du ménage

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TROIS PETITES CHANSONS

I. — Le pique-assiette.

Du dîner, comme d’un tournoi, sonne la cloche ;
La fourchette en arrêt, les voici qui s’approchent,
Les chevaliers tapeurs et vide-poches :
Pique, pique, picador !
Pique, pique, pique-assiette !
N’en reste-t-il mie ou miette,
De ce veau que je regrette ?
— Mais moi, Carmen, je l’aime encor… —
Pique, pique, picador !
Pique, pique, pique-assiette !

[La bouche pleine, mais les yeux avides, ils tournent autour de la table en fredonnant des rondes enfantines :]

Une poule sur un mur,
Qui picote du pain dur,
Pique-assiette, picota,
Mange un œuf et puis s’en va…

[Mais ils ne s’en vont pas, et ils continuent à tourner, au rythme de paroles seulement plus mystérieuses :]

Ams’, stram’, gram’,
Pique, pique, commedram’,
Bourre, bourre, ratatam’.
— (J’ai encor, je le proclame,
Maigri de cinquante grammes !) —
Pique, pique, commedram’,
Mis’, stram’, — dram’!
Bonsoir, Monsieur et Madame !

(Les voix s’éloignent dans la nuit.)

II. — Le vol-au-vent.

Marmiton,
Vole, vole, vole !
Prends tes jambes à ton col :
Où t’envoya ton patron,
Marmiton,
Vole, vole donc !
Le vol-au-vent sur la tête,
Vole, vole, marmiton, —
Vol-au-vent aux champignons,
Aux quenelles et aux crêtes, —
On t’attend, l’âme inquiète,
On t’espère à la fenêtre ;
Vole, et que rien ne t’arrête,
Marmiton,
Vole, vole donc !
Marmiton,
Vole, vole, vole !
Fuis la conversation
Des petits trottins frivoles,
Et, pas de saute-mouton
Avec les méchants garçons
Qui ne vont pas à l’école :
— Que non ! —
Que non, jeunes polissons !
Que nenni, mesdemoiselles !
Que non ! que nenni ! — (Quenelles…) —
Si le vol-au-vent, narquois,
Allait s’envoler sans toi !
Marmiton,
Vole, vole donc !

III. — L’anse du panier.

« Brins d’osier, brins d’osier,
Courbez-vous assouplis sous les doigts du vannier ! »
Pour les soldats de la France,
Fantassin et cavalier,
Artilleur, chasseur à pied,
Sapeur-pompier,
Pour les soldats de la France,
Danse
L’anse,
Danse l’anse du panier !
« Brins d’osier, brins d’osier,
Courbez-vous assouplis sous les doigts du vannier ! »
Tant de danses a dansées,
Que la pauvre anse est cassée,
Délaissée
Par toute l’armée française :
— Nuit et jour, à tout venant,
Je dansais, ne vous déplaise…
— Vous dansiez, j’en suis fort aise,
Eh ! bien, chantez maintenant ! —
« Brins d’osier, brins d’osier,
Courbez-vous assouplis sous les doigts du vannier ! »

SUIVIES DE LA ROMANCE DU BAIN-MARIE

Sous ton vocable, ô Marie,
Sous ton vocable placé,
Daigne écouter, attendrie,
Mon placet !
Marie, qu’il a de peine,
Ton bain, hélas ! bain-marie,
Lui dont l’ambition vaine
Envie
Ceux de la Samaritaine :
Voir s’ébattre dans nos flots
Des corps gracieux et beaux !
Ah ! pourquoi la cuisinière,
Son corsage retroussant
D’une excitante manière,
Nous va-t-elle provoquant
De son bras rouge et troublant ?
Oui, ses bras : mais, davantage,
Du flan !
Car nous n’avons en partage,
Dedans nos flots, et nos flancs,
Que les crèmes et les flans…

La Vierge-Marie (parlé).

Et c’est à moi que vous venez raconter cela ? Vous en avez de bonnes !

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