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Au bord du Désert: L'âme arabe (à Pierre Loti); Impressions; Souvenirs; Légendes arabes; La pétition de l'Arabe

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LA NUIT DE MAI

Zorah, qui ne sait pas le français, pas du tout,
Ne pouvait pas comprendre et m’ennuyait beaucoup.
Et pourtant je voulais rester encor près d’elle,
Quoiqu’elle eût peu d’esprit, — parce qu’elle est très belle.
Joindre un plaisir pour l’âme au plaisir pour les yeux,
C’est le bonheur des saints, du poète et des dieux ;
Et pour avoir, avec Zorah, — dont rien ne trouble
Le cœur ni les grands yeux calmes, — ce plaisir double,
Je me mis à lui dire une Nuit de Musset ;
Et, sur la lyre d’or, passait et repassait
L’archet prodigieux de ce maître du Nombre…
Et je vis s’étoiler alors deux beaux yeux d’ombre,
Et Zorah, sans comprendre, a dit très doucement :
« Toi, chanter ? » Et, pour faire un accompagnement,
Me suivant rime à rime et syllabe à syllabe,
La Mauresque se mit à chanter en arabe.
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