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Au bord du Désert: L'âme arabe (à Pierre Loti); Impressions; Souvenirs; Légendes arabes; La pétition de l'Arabe
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A KHEÏRA
La source du bonheur a fécondé ma vie.
Elle coule en ruisseaux dans mon âme ravie,
Et c’est l’amour de ma maîtresse ; et, chaque jour,
Chaque nuit, je m’abreuve à ma source d’amour.
Ma vie est un jardin où la volupté pousse ;
Ma Kheïra que j’aime est si belle et si douce
Qu’on peut la comparer au frais rayon de miel
Fait de mille parfums par l’abeille du ciel…
Ta beauté, Kheïra, ma douce bien-aimée,
Par les hommes, par les femmes est proclamée,
Visible à tous les yeux comme tout ce qui luit,
Comme l’aurore et les étoiles de la nuit.
Elle est, — comme l’étoile et la lune — éclatante.
Quand tu parais, le soir, sur le seuil de la tente,
L’étoile te sourit comme à sa jeune sœur.
Le croissant de la lune a ta calme douceur,
Le jasmin ton parfum et la rose ta grâce ;
Ta peau ressemble à l’ambre, ô fille de ma race,
A la datte mûrie à peine, au miel doré,
Au rayon de soleil dans l’eau fraîche miré,
Et lorsque mon baiser mystérieux te touche
J’ai des fleurs à la fois et des fruits sous ma bouche,
Et je suis réjoui dans ma soif et ma faim.
Les anneaux de tes pieds, tes khelakhels d’or fin,
Font, à leur bruit, sauter mon cœur dans ma poitrine !
J’aime, ô ma Kheïra, ta démarche féline
Belle comme une danse au calme mouvement
Qui fait saillir tous les contours d’un corps charmant.
Ta taille se balance ainsi qu’un palmier souple.
Tes seins sont deux ramiers que l’amour même accouple,
Ta lièvre est une rose, et ton corps un rosier.
Et pourtant, Kheïra, ton regard meurtrier
Est comme un trait tendu sur l’arc de tes paupières !
Et par instants je porte envie aux froides pierres,
Car je suis, Kheïra, si plein de ton regard,
Que, loin de toi, je n’ai de repos nulle part.
Tout heureux que je suis, ton souvenir me ronge :
J’ai soif de ta beauté que je revois en songe,
Comme la caravane en feu, dans le désert,
Ayant soif d’ombre et d’eau, rêve un mirage vert !
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