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Au bord du Désert: L'âme arabe (à Pierre Loti); Impressions; Souvenirs; Légendes arabes; La pétition de l'Arabe
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YOU ! YOU ! YOU !
You ! you ! you !… Plus les cris sont aigres,
Plus on est agréable à Dieu !
Ils sont là dix ou douze nègres
Qui semblent danser dans du feu.
Trois d’entre eux font de la musique ;
Les autres dansent follement
Une danse d’épileptique
Digne de l’accompagnement.
L’un — tous font grimacer leur masque, —
Heurte un thebel avec du bois ;
L’autre frappe un tambour de basque ;
L’autre siffle dans un hautbois.
Dansez ! hurlez ! sonnez ensemble,
Rhaëta, thebel et banndir !…
L’air frissonne et la terre tremble !
Il faut crier, hurler, bondir !
Gorge au vent et poing sur la hanche,
Saute une femme au milieu d’eux,
Noire comme une âme de blanche,
Belle parce qu’ils sont hideux !
— « Dites-moi donc, ô noire belle,
Pourquoi ces danses, ces chansons ? »
— « L’enfant est mort, répondit-elle,
Et nous chantons, et nous dansons !
« Car son âme, douce colombe,
Vole à présent vers le seul Dieu !
Et nous dansons là, sur sa tombe !…
Adieu, mon fils, dit-elle, adieu ! »
Et comme prise de démence,
Étouffant sous des cris ses pleurs,
La jeune mère recommence
A bondir, folle de douleurs !
La source de vie est amère
Comme l’eau des déserts affreux…
Ton enfant est mort !… Danse, mère !
Il ne sera pas malheureux !
L’air frissonne et la terre tremble !
Il faut rire, danser, bondir !
Frappez ! hurlez ! sonnez ensemble,
Rhaëta, thebel et banndir !
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