Histoire naturelle des oiseaux d'Afrique, t. 1
LE ROUGRI, No. 17.
Les mêmes raisons qui m’ont engagé à nommer la buse précédente rounoir, m’ont déterminé à donner à celle de cet article le nom de Rougri; parce qu’il nous peint d’un seul mot les deux principales couleurs du plumage de cet oiseau, qu’un roux ferrugineux, plus ou moins foncé, teint par-tout en général, à l’exception pourtant des grandes pennes de l’aîle, dont la couleur est noire, et des plumes du cou par devant, ainsi que celles de la poitrine et les couvertures du dessous de la queue qui sont d’un gris blanchâtre: la queue elle-même qui, en dessus, est entièrement rousse, porte, par dessous, cette même teinte de gris, rayée par quelques bandes transversales peu apparentes. Le roux du ventre est plus clair que celui du manteau; il est aussi flambé de quelques traits noirâtres. Le bec et les pieds sont d’un beau jaune citron; les ongles sont noires; l’œil est d’une couleur rougeâtre.
Cette buse est sédentaire comme la précédente; on pourroit la regarder, en la comparant au rounoir, comme la buse sauvage du Cap, et la première comme la buse domestique. Il est même probable que le Rougri, étant plus petit et moins fort que le rounoir, l’espèce aura été contrainte d’abandonner les terres cultivées de la colonie, dont se seront emparés ces derniers, qui, par le puissant droit du plus fort, les en auront peu à peu chassés entièrement; les Rougris, comme tous les êtres qui tiennent de plus près à la nature, auront été contraints de faire, dans cette lutte, ce que font encore tous les jours les hommes sauvages de ces contrées, qui, pour éviter les cruautés des Blancs, et même de leurs concitoyens civilisés, se reculent de plus en plus dans les déserts, et diminuent leur population à mesure que celle de leurs persécuteurs semble s’augmenter. C’est par la même raison sans doute que le Rougri se trouve si rarement dans la colonie, où il ne fréquente même que les cantons arides et abandonnés.
Quoique la ponte du Rougri soit aussi de trois et quelquefois de quatre œufs, l’espèce en est cependant beaucoup plus rare et moins nombreuse que celle du rounoir. Cet oiseau vit de taupes, de rats, de souris et même d’insectes; et son cri approche beaucoup de celui de notre buse d’Europe.
En comparant le Rougri au rounoir, on le trouve plus alongé et moins trapu; sa queue est aussi plus longue et son bec visiblement plus foible. Moins accoutumé à la société de l’homme, il est plus craintif et se laisse difficilement approcher. Dans cette espèce, la femelle est un peu plus forte que son mâle, et lui ressemble d’ailleurs totalement, à l’exception de la teinte de son plumage, qui est d’un roux plus foible. Le mâle et la femelle ne se séparent que rarement; et c’est dans les buissons qu’ils construisent leur nid, qui est composé des mêmes matières que celui du rounoir.