Histoire naturelle des oiseaux d'Afrique, t. 1
LE TACHARD, No. 19.
J’ignore absolument tout, jusqu’à la plus petite particularité, de ce qui peut avoir rapport aux mœurs de cet oiseau de proie, que j’ai nommé Tachard, parce qu’il est l’unique de son espèce que j’ai été à portée de voir dans mes voyages, et qu’en outre je ne l’ai pas tué moi-même; car c’est mon fidèle Klaas qui le tira au moment où il passoit au-dessus de sa tête, et qui me l’apporta avec cette satisfaction qu’il avoit toujours à me procurer quelques oiseaux nouveaux et rares. Nous étions alors campés sur les bords de la rivière des Lions, dans le pays des giraffes, et depuis nous n’avons jamais apperçu un autre individu de la même espèce. Plusieurs Kaminouquois qui étoient présens quand Klaas me le remit, ne purent le nommer, et paroissoient ne pas le connoître. Il est donc probable que l’espèce habite un canton plus reculé, et que l’oiseau qui venoit d’être tué étoit un individu égaré et éloigné de son pays natal.
Le Tachard, par sa forme, approche beaucoup des autres buses africaines; cette espèce a seulement la queue plus longue qu’aucune des trois précédentes dont j’ai parlé, et elle est cependant la plus petite de toutes, quant à l’épaisseur du corps. Son bec est aussi foible que celui du rougri; mais en revanche ses serres sont plus grandes et plus arquées; ce qui prouveroit qu’elle chasse mieux: d’ailleurs, sa longue queue et ses aîles, dont la pointe s’étend jusqu’à son extrémité, doivent lui faciliter les moyens de poursuivre sa proie avec succès. Cette quatrième espèce de buse d’Afrique se distingue facilement du rounoir et du rougri, non-seulement par le caractère de sa queue plus longue, son corps plus svelte et ses couleurs différemment distribuées; mais encore parce que son tarse est couvert de plumes jusque passé le milieu de sa longueur: caractère qui suffira aussi pour la reconnoître d’avec la buse gantée, qui l’est entièrement jusque sur les doigts. Le Tachard est aussi moins culotté. Quant à ses couleurs, la tête est d’un brun-gris, égayé par quelques traits blancs de l’intérieur des plumes qui se montrent, et qui est la couleur générale du dessous de tout le plumage de cet oiseau. La gorge et la poitrine sont blanchâtres et parsemées de quelques taches brunes, répandues le long des plumes. Tout le dessous du corps, sur un fond blanc roussâtre, porte de larges taches brunes; les scapulaires et les couvertures des aîles sont d’un brun foncé; mais chacune des plumes étant bordée d’une couleur plus foible, elles se détachent et se dessinent séparément sur le fond. La queue, en dessus, est d’un brun foncé, et porte de larges bandes noirâtres; en dessous, elle est d’un gris-blanc, ondé d’un léger gris-brun, et les bandes y sont aussi moins apparentes. La base du bec est jaunâtre, la mandibule supérieure noire, et l’inférieure presqu’entièrement jaune jusqu’à sa pointe, qui seulement est noire. La partie nue du tarse est jaunâtre, ainsi que les doigts. Les ongles sont d’un brun-canelle. L’œil étoit d’un brun foncé rougeâtre. La queue est terminée carrément, c’est-à-dire, que toutes ses pennes sont d’une égale longueur.