L'art de chevalerie selon Vegece
Cy parle d’une maniere de guerre laquelle s’apelle marque et se telle maniere de guerre est juste. ve. cha.
Maistre comme encore ne soie saoulé de tes sages et justes conclusions te vueil faire certaines demandes sur une aultre maniere de contens qui avecques trait a guerre/ laquelle ne sçay s’elle est de droit/ mais les princes et les seigneurs depuis les anciennes seigneuries de pieça/ car es anciennes gestes n’en est faicte nulle mencion en ont prins a user qu’on appelle marque/ qui est quant ung homme de ung pays sicomme de france ou d’autre part ne peut avoir droit d’aucun tort fait par aucun puissant homme d’estrange pays le roy luy donneroit une maniere de licence de prendre arrester et emprisonner par vertu de ses lettres obtenues de luy/ marchans et tous aultres & leurs biens venans du pays & du lieu d’icelluy qui auroit fait le tort & qu’ilz en fussent exemptz jusques ad ce que droit et restitution soit faicte au demandeur de sa demande/ si souroie tresvoulentiers se telle chose vient de droit/ car grant merveille est que ung homme du pays de celluy qui aura commis le fait/ & qui oncques riens n’en aura sceu ne n’en sera coupable/ & si sera pour celle cause emprisonné et ses biens empeschez s’il est trouvé en lieu ou l’autre ait puissance & conviendra qu’il paye et restitue se dont riens il ne doibt ne couppe n’y a.
Chier amy tu doibs savoir que a droit voir dire selon l’escrit de l’ancien droit ceste maniere de guerre que on appelle marque/ par laquelle ung homme prent dommaige pour autruy sans sa desserte n’est pas juste ne droit ne l’ottroye pas/ lequel droit a ordonné que se ung marchant de paris ou de quelque lieu qu’il soit est obligé a ung marchant de florence qui demande justice de luy devant son juge/ & que ce cellui ne lui fait justice qu’il l’appelle devant la justice du roy tant que il en ait droit/ mais de dire pource se ung marchant de paris luy est obligé que emprisonner puist ung autre marchant ou bourgoys de paris ou d’autre part du royaume ou ses biens prendre & arrester. vrayement en ce forvoye/ car ce n’est de raison ne de nul droit qui y peut estre pour les seigneurs qui l’ont trouvé en ceste cause et n’est pas sans occasion.
Je suppose que ung ytalien fust obligé de une grant somme a ung françoys/ de laquelle obligation vouldra fraulder celluy auquel il est debteur Il s’en ira demourer en angleterre pource que bien scet que le françoys n’yra pas la plaider a luy/ ou par aultre pourroit advenir/ ung genevoys sera de pieça obligé a ung françoys Or saura bien que pour la malvaillance qui est ore entre le roy de france et les genevoys/ le françoys n’yra pas a geneves pourchasser sa debte/ si sera de tant mauvaise conscience que cure n’aura de restituer/ que fera doncques le françois seurement il se traira devers le roy ainsy que subgect a son seigneur pour avoir semblablement aide du sien recouvrer. Adont le roy bien informé donnera semblablement marque/ & le donnera aussy s’il advient que ung chevalier ou autre ait esté destroussé injurié & villenié en quelque part ou le roy n’ait deffence de guerre/ jusques ad ce que amende et restitution luy soit faicte Sy trouverent ceste cautelle les consaulz des princes pour obvier a telz baratz.
Ceste marque contient que toute personne qui seroit trouvee au pays du prince qui l’a donnee/ qui de la ville/ du pays/ ou du lieu fust de celui qui auroit fait l’outraige/ fust prins & ses biens mis en la main du seigneur jusques ad ce que le marchant fust paié & a donc quant les marchans se voient ainsy mal menez es estranges pays ou marque est donnee contre eulx/ ilz font tant a la justice du lieu dont ilz sont/ que celluy par qui c’est contente l’autre et restitue/ et pour celle cause fut elle trouvee et mise sus/ si sert bien le comun proverbe ad ce propos qui dist que par ung inconvenient est aucunefois chassé ung aultre inconvenient/ car par cestuy est ung aultre grief reparé ne par aultre voye ne se pourroit nullement avoir droit de assez de tors qui sont faitz ou que on pourroit faire aux estranges allans et venans leurs chemins/ mais non obstant que celle chose puisse avoir aucune couleur pource te dy que ung roy ou prince auquel elle est requise ne le doit pas pourtant donner de legier/ car moult est chose griefve et pesant/ pourquoy doibt estre a peine deliberee pour deux principalles causes. l’une est que c’est chose qui moult peut grever conscience L’autre que ce peut estre commencement de guerre. Quelle chose doncques doibt faire le roy quant requise lui est/ a donner contre aucune cité pays ou seigneurie. Il doibt premierement interroguer ou faire interroguer par son president ou aultre sage legiste et justicier pour quelle raison il la requiert et quelle cause il a. Et celluy dist que quant il venoit de melan que en la ville d’ast/ on luy osta bien. x. mille francs ou chose qui le valloit/ et que de ceulx ne peut avoir droit/ ains soustiennent ceulx de la ville ceste chose/ quoy que de la demander par leur justice se soit bien mis a son debvoir. Adonc doit le roy escripre & mander par ces lettres a iceulx que amiablement vueillent faire faire restitution a son subgect du dommaige que ung ou plusieurs des leurs luy ont fait/ dont s’il advient que pour ce n’en soit riens fait & que des lettres du roy ne tienent compte/ & par conseil soit veu & deliberé que marque donner y appartienne/ Adont selon la coustume de ses seigneurs temporelz le peut donner.