L'art de chevalerie selon Vegece
Cy commence a parler des manieres qui au connestable appartiennent ou au capitaine a tenir son office en l’exersant. xii. chapitre.
Or est il ainsi que la guerre est mise sus et deliberee par le prince souverain receue ou envoiee par deffiances selon l’usage/ le sage capitaine a ce commis ordonnera que les frontieres soient bien garnies tant de bonnes gens/ comme d’artillerie de tout trait et autres choses necessaires de deffence et toute telle garnison & en telle quantité que bon leur semblera selon la qualité des adversaires/ les villes & les forteresses si bien garnies que rien n’y conviengne Il advisera quel nombre de gens lui sera besoing selon se qu’il pourra avoir a faire et selon son emprinse.
Ledit capitaine eslira les meilleurs de tous les hommes d’armes et semblablement de ceulx du trait canonniers & autres jusques a la quantité qu’il lui est necessaire. et pource que au temps de ma intention on tient que la victoire de bataille par raison doibt cheoir a la partie qui plus a de gens.
Vegece.
Contre ceste oppinion vegece dit qu’il souffist en une bataille mener une legion d’ommes armez avec leur aide.
Une legion est en nombre. vi. mille v. cens & lxvi. lances ou bacinez/ & s’accordent avec ledit vegece tous aucteurs qui de ceste matiere ont escript/ en disant que comme en trop grant cantité ait confusion souffist au plus contre toute multitude d’ennemis deux legions sans plus de bonnes gens d’armes sans presse/ mais qu’ilz soient menez par souveraine ordonnance. Si sont en nombre. xiiii. mille bacinez ou plus. Et treuve l’on que plusieurs ostz ont esté desconfitz plus par leur propre multitude que par la force de leurs ennemys. Et pour quoy certes bonne raison y a/ car la grande multitude est plus forte a tenir en ordre & est souvent a grant meschief pour sa pesanteur plus indigente de vivres/ plus de debas y a plus atarge chemin. Et advient souvent que les ennemis quoy qu’ilz soient en moindre cantité tendent a les surprendre a passer destrois passages et rivieres/ et la gist le peril/ Car avantage ne font l’un a l’autre mais empeschement a bataille arrengee/ mesmes s’empressent tellement qu’ilz s’entrefoullent et estaignent. Et pour ce si que dit est les anciens qui les choses convenables en bataille avoient aprinses & les perilz par experience plus prisoient avoir ost enseignie et duit que la grant multitude Le bon capitaine establira sur telz gens divers capitaines soubz lesquelz commetra certain nombre de gens d’armes aux ungs plus aux autres moins selon leur suffisance/ & semblablement fera de ses canonniers & gens de trait vouldra lui et ses gens les veoir en point aux champs en divers jours a monstre les ungs apres les autres La sera bien prins garde que nul ne soit receu s’il n’est passable/ car au temps ancien estoient les capitaines tresestroitement sermentez que loialment serviroient le prince ou la contree.
Ces choses seront deuement faictes apres ce qu’il aura bonne assignation de la paye de ses gens d’armes/ car nul ne se attende d’avoir bons gens d’armes mal paiés/ ains leur fault courage si tost que la paye decline. Et prendra congé du prince apres bonne assignacion et paiement sur les champs se mettra a tel effort de gens que le cas et la possibilité le requerra.