L'art de chevalerie selon Vegece
Cy devise des rommains de fulvius nobilius/ de pemmadas/ de fabius maximus Et de scipion le second affriquant de certorius et de pemmadas. vi. chapitre.
Au temps que les rommains estoient en discencion les ungs contre les autres. & que la guerre durant comme plusieurs nations depuis le temps de leur prosperité/ eurent grant envye contre eulx/ s’ilz veoient leur bel demonstrer. Sembla par especial a ceux de dace que temps estoit adonc de leur courir sus Et comme de ce ja par plusieurs foys eussent admonnesté leur duc Acariole qui pas n’en estoit d’accord/ a la parfin pource que trop l’empressoient pour leur donner congnoissance par cest exemple fist admener devant soy sur la place devant le palais plusieurs chiens et harer les ungs contre les autres tant que fort se prindrent a entrecombatre/ mais au plus fort de la bataille/ lors qu’il sembloit que tant fussent affelonnis que riens ne les peust departir. Il fist saillir empres eulx ung loup duquel il s’estoit pourveu/ et si tost que les chiens le veirent laisserent la bataille d’entre eulx/ et tous d’un accord coururent sus au loup/ & par cest exemple monstra le duc aux siens que quelque chose que ceulx d’une nation eussent entre eulx ne se laissent jamais fouler par nulz estrangiers qui se ambatent. Ains feroient adonc accord pour faire grief a leur ennemy.
Item fulvius nobilius duc et capitaine de ung ost rommain se trouva une fois si pres prins de ceulx de chamois/ que necessité et force lui estoit de attendre la bataille/ de laquelle chose pource qu’il savoit bien que ses gens s’en espouentoient moult pource que plus estoient ses gens en petite quantité que leurs ennemys/ se advisa pour leur oster celle paour de telle cautelle. Il dist a ses gens et par tout son ost le fist publier qu’il avoit corrumpu par argent une legion de samites/ laquelle se tourneroit devers luy quant la bataille seroit commencee. Et pour mieulx faire entendre celle chose. Il emprunta/ a ses gens tout l’or et tout l’argent qu’ilz povoient avoir ainsi que ce fust pour paier ladicte legion de samites. Une legion de gens est en nombre vi. mille. vi. cens et lxvi. hommes. Si advint que par la fiance de ce rommain eurent si grant hardement qu’ilz en envaÿrent baudement leurs ennemys/ qu’ilz trouverent assez despourveuz pource que si pou les cragnoient veu que si pou de gens estoient envers eulx/ si les vainquirent.
Item paminades le vaillant duc de tebes se debvoit une fois combatre contre ceulx de lacedemonne/ si se advisa de telle cautelle pour croistre a ses gens leur force hardement et couraige. Tous les fist venir devant soy et leur dist haultement en audience/ qu’il les vouloit adviser de ce qui luy estoit venu pour verité a congnoissance/ c’estoit que les lacedemoniens avoient ordonné affermeement que s’il avoient la victoire ilz occiroient tous les hommes et femmes de tebes/ la cité destruiroient/ et les petis enfans mis en servage perpetuel. Pour ceste anonciation ceux de thebes meus de grant ire se combatirent comme forsenez et vainquirent les lacedemoniens qui trop plus estoient de gens que eulx.
Item fabius maximus se deut combatre contre ses ennemis si estoit son ost moult efforcé et fortiffié de palis et de fort logis pour ce doubta que ses gens se combatissent moins aigrement pour la fiance des lieux ou ilz avoient leur retraicte et reffuge/ et pour ce les fist ardoir ainçois qu’ilz se combatissent.
Item quant scipion le second affriquant mena son ost en auffrique. Advint que quant il deut issir de la nef il cheut a terre/ tantost il regarda ses gens et veit que a mauvais signe le prenoient. Et que ja en estoient ainsy que desconfortez. Adont le sage guerroieur se advisa de sage parolle pour rendre a ses gens sceureté de leur doubte. Il se print a rire en disant baudement. O loué en soit dieu c’est icy bon signe desja suis je saisi de la terre d’auffricque elle est nostre sans quelque faulte/ & ainsy par telle parolle tourna la malle esperance de ses gens en bonne/ laquelle exposition cauteleuse vint apres selon bon desir.
Item comme certorius se deult une fois combatre apparut en son ost ung merveilleux signe car les escus des gens de cheval & les poictrines des chevaulx devindrent soudainement tous ensanglantez. Laquelle chose leur fut grant espouentement/ mais de ceste chose les asseura leur vaillant duc/ disant a chiere joieuse que c’estoit tresbon signe et que par ce devoient entendre qu’ilz auroient la victoire/ car c’estoient les parties qui souvent sont ensanglantees du sang de leurs ennemis.
Item derechief se deult combatre peminades a ceulx de lacedemonne/ & sicomme le cas advenist d’aucune dilation on luy apporta sa chaiere pour soy seoir ung petit en actendant/ mais par cas d’aventure ceste chayere tomba soubz luy/ dont ses gens moult s’esbahirent et le prindrent a male signifiance. Adont le sage duc qui l’apperceut se leva vistement et dist a chiere hardie. Or sus sus tost mes chevaliers/ les dieux nous deffendent le seoir/ car par ce signe nous ont admonnesté de aller tost a la bataille Car nostre en sera la victoire.