L'art de chevalerie selon Vegece
Cy commence une ordonnance de mettre siege/ et ce qu’il luy convient pour assaillir forte place selon le temps present. xxi. chapitre.
Quoy que vegece sur lequel sien livre de chevalerie avons fondé ou la plus grant partie/ ceste presente euvre ait parlé en termes generaulx selon les usages du temps des preux conquereurs passez/ assez suffise aux bons entendeurs des choses d’armes/ tant en ce qu’il touche ou en quelle maniere peut toucher fait de batailles en champs et ses despendences comme de ce qu’il appartient a combatre. villes et chasteaux par mer & par terre si que dit sera. Neantmoins pour plus particulierement donner enseignement non pas a ceux qui le scevent comme besoing ne leur en soit/ mais a ceulz qui au temps advenir le pourront bien lire ou oyr par desir de savoir comme escripture soit chose au monde sicomme perpetuelle nous semble bon de adjouster a nostre dicte euvre plus particulierement des choses bonnes et propices en fait de combatre/ cité chasteaulz et villes selon les usages du temps present pour plus ordonner entendible exemple. Tout ainsy semblablement que es choses dictes & a dire/ nous sommes aidés des ditz du livre vegece & autres acteurs nous aiderons en se du conseil des nobles chevaliers expers esdites choses et quoy que grans los de ce leur deust appartenir comme bien affiert a leur honneur et reverence tant pour ceste occasion comme pour les autres bontés sens et valeur chevalereuses et nobles vertus qui en eulx sont ne plaist a leur humilité y estre alleguiez. Par quoy s’il est ainsy que par aucun qui lire pourra ou le oyr ait aucunefois ceste belle ordonnance qui s’ensuyt veue par escript/ ou oyr dire de bouche ne vueille pourtant l’avoir en despris Ains en estre content pensant que dommaige seroit que la feblesse de ung peu de papier qui se pourroit en pou de temps perdre eust la memoire aneantie de si notable ordonnance/ qui bien est digne que registree soit/ affin que estre puist secourable mesmement en ce royaume se le cas escheoit en temps advenir.
Or supposons doncques une tresforte place assise sur mer d’une part ou sur tresgrosse riviere grande et tresdifficile a prendre comme de telles en soit a laquelle on vueille mettre siege par grant appareil quoy qu’il y doibve donner/ ce qu’il y conviendroit regarder.
Premierement devise les engins et canons/ c’est assavoir deux grans engins et autres deux moyens volans garnis et prestz de toutes choses pour jecter.
Item quatre couillars tous neufz bien fournis et habillez de toutes choses qu’ilz leurs appartient et chascun de deux tables et troys fondés pour changer quant besoing en sera.
Item quatre grans canons/ l’un appelle garite/ l’autre rose/ l’autre maye et l’autre seneque. Le premier de iiii. ou cinq cens livres pesant. Le second c’est assavoir seneque de environ iii. cens livres ou plus et les autres deux/ gectant deux cens livres ou plus.
Item ung autre canon appelle monfort gectant troys cens livres pesant/ & selon les maistres est cestuy le meilleur de tous.
Item ung canon de cuivre appellé artique gectant cent livres pesant.
Item xx. autres communs canons gectans pierres Item autres petis canons gectant pierres plommetz et autres pierres communes de cent a six vings livres.
Item deux aultres grans et six plus petis.
Item encore deux autres gros canons gectant de trois a iiii. cens livres et quatre petis/ Autres troys canons ung grant et deux petis canons gectans selon leur povoir.
Item autres xxv. canons grans a pierre gectans de deux a troys cens et quatre cens livres pesant. & xl. autres petis/ & tous doibvent estre estoffez de pierres de bois et de ce qui y appartient/ lesquelz canons sont en somme. ii. cens xlviii. qui diviseement sont nommez pource que diversement sont assiz selon l’assiete de la forteresse.