L'art de chevalerie selon Vegece
Cy devise se ung estudiant anglois estoit aux escolles a paris trouvé/ ou semblablement d’autre terre aux françoys ennemie s’il pourroit estre prins a raençon. xxiii. c.
Mais puis qu’en matiere de prisonniers en fait de guerre sommes entrés je vueil que toy mesmes juges selon ton advis de tel debat et par tel exemple le te proposeray. On scet assez car c’est chose notoire comment le roy de france et celluy d’angleterre ont communement guerre entre eulz. Je prens que ung estudiant licencié de la cité de lomdres soit venu a paris a l’estude pour estre gradué en la science de decret ou de theologie. Advient que ung françoys homme d’armes entent qu’il est anglois & a prisonnier le prent A laquelle chose l’autre forment s’oppose & tant que devant justice vient la question. Auquel debat l’engloys qui en droit fonde ses raisons/ dit qu’il a cas expres de la loy qui fait pour soy pour cause des grans previleges d’eulx aux escoliers et deffent que on ne leur face nul mal ne nul desplaisir/ mais honneur et reverence/ & vecy dist il la raison que la loy y assigne qui seroit celluy dist la loy qui n’auroit escoliers pour recommandez/ lesquelz pour savoir et science acquerir ont delaissé richesses delitz et toutes aises de corps/ leurs amis charnelz & leur pays ont prins estat de povreté/ & ainsy que banis de tous biens ont relenqui le monde et tous autres plaisirs pour l’amour de science/ si seroit bien plain de toute descongnoissance qui mal ne encombrier leur feroit.
A ces raisons l’omme d’armes replicque ainsy. frere je te dy que entre nous françoys ne faisons force des loix de l’empereur Auquel nous ne suymes pas subgectz/ si n’y a que veoir/ l’escolier respond. loix ne sont autre chose que droictes raisons ordonnees selon sagesse/ & se cure n’en avez ja pource ne demeure que le roy de france et les bons seigneurs ne usent de raison et de choses raisonnables/ & de ce que eulx mesmes ont ordonné/ car charlemaine termina l’estude generalle a paris par la voulenté du pape/ laquelle estude se tenoit pour lors a romme/ et y donnerent grans et notables previleges/ & pource envoya le roy de toutes pars querir escoliers & maistres de tous langaiges & les comprint esditz previleges & pourquoy doncques ne pourroient ilz de tous pays venir quant du roy ont licence/ comme tous roys jurent a leur advenement tenir lesditz previleges. A dist l’omme d’armes supposé ce que vous dictes vous devez savoir que puis que guerre fut entre nostre roy et le vostre nul angloys ne doibt en france venir pour telle occasion ne quelconque autre sans avoir bon saufconduit/ et bonne y est la raison/ car vous pourriés soubz l’ombre de l’estude escripre et faire savoir nostre estat en vostre terre/ & pourriez faire des secretz maulx se vous voulliés/ sy n’est raison que au roy ne a sa terre doive tourner a prejudice nul previlege. Ces raisons ouyes amy dy moy ce qu’il t’en semble.
Sans faulte maistre puys qu’il te plaist que mon petit advis en ceste partie serve. Je te dis puys que ainsy est et sans fraude que icelluy que tu dictz soit vray escolier/ c’est assavoir que fainctement ne fust venu/ a occasion d’estude par faulse couleur pour espier ou autre mal faire je tiens sa cause a bonne & que prisonnier estre ne debveroit reserve se ainsy n’estoit que le roy eust fait mandement especial que angloys quelconque ne venist estudier en son royaume et que suffisamment fust publié si que de tous peust estre sceu. Tu as moult bien jugé et sagement distincté/ car mesmement se l’eves[c]hié de paris vacquoit ou l’archeveschié de rouen de sens et d’autres vacquoient & ung angloys y avoit esté esleu/ le roy y pourroit par droit contredire/ La raison est qu’il n’est pas expedient au roy ne au royaume y avoir ses ennemys/ mais encore me respons a ce.
Suppose que l’estudiant ne doive estre emprisonné que me diras tu de ses serviteurs s’il en a amené deux ou troys ou plus d’angleterre/ car le previlege que les escoliers ont ne fust pas donné aux serviteurs. En bonne foy maistre soubz ta correction nonobstant celle raison il m’est avis & me semble que soubz le previlege du maistre lequel soit vray escolier si que dit est doibvent estre comprins ses serviteurs & toute sa famille/ mais a toy maistre vueil demander une chose dont on pourroit faire doubte.
Je suppose que ledit estudiant fut agrevé de maladie le pourroit par droit son pere venir veoir & visiter.
Ad ce je te respons que selon droit escript mais que cautement et falacieusement n’y venist y pourroit et deveroit seurement venir. La raison est pource que trop plusgrant est le droit de nature que celluy de guerre Aussy est tant previlegié amour de pere et de mere a enfant que nul droit d’armes ne pourroit celluy surmonter. Et encore plus fort je dy mesmement que se le pere alloit veoir et visiter son enfant estant en estude tout sain/ voire en estude generalle et previlegié ou que ce fust autant autrepart que a paris pour luy porter livres ou argent qu’il ne doit estre a celle occasion prins arresté ne emprisonné de quelconques contrees amyes ou ennemyes que fussent/ & ceste sentence est determinee en droit escript si que je le dis. Et semblablement ne doibt estre le frere parent ne serviteur qui argent ou livres luy apporteroit/ voire je presuppose les causes dessusdictes reservees/ et tout ce est par la vertu des previleges que ont estudians en toutes estudes generalles.