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Rusbrock l'Admirable (œuvres choisies)

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DE LA FAIM INSATIABLE

L’âme humaine est capable d’une faim sans assouvissement. C’est l’amour avide, l’amour béant, l’aspiration de l’esprit créé vers le bien incréé. Quand l’esprit est touché, touché par le désir, quand il a reçu de Dieu une invitation qui est un ordre, il faut absolument qu’il touche ce qu’il aime. De là une insatiable avidité qui ne peut jamais embrasser et tenir. Les hommes qui vivent ainsi sont les plus pauvres entre les hommes. Ils mangent, ils boivent, ils ne peuvent pas se rassasier ou se désaltérer. Ils ont faim à jamais, car le vase créé ne peut pas contenir l’Incréé. Le désir est là, ardent, éternel ; mais Dieu est plus haut que lui, et les bras levés du désir n’atteignent jamais la plénitude adorée. Dieu donne alors à l’âme une table bien servie ; il y a sur cette table des richesses connues seulement de celui qui les goûte : mais il y a un plat qui manque toujours, c’est celui qui contiendrait la jouissance ravissante. C’est pourquoi la faim va toujours en augmentant. Sous le contact divin, des torrents de délices coulent dans l’âme, et le goût spirituel éprouve ce que l’esprit ne peut pas inventer. Cependant, comme ces jouissances sont éprouvées dans les domaines de la créature, dans les régions inférieures à Dieu, la faim va toujours en augmentant. Tous ces transports ne font que l’exciter. Quand Dieu donnerait tout à cette âme, tout excepté lui-même, il ne l’assouvirait pas. C’est son doigt qui a fait ce désir : plus l’attouchement a été fort, plus le désir est terrible. Telle est la vie de l’amour dans son opération transcendante, qui surpasse la raison et l’intelligence. Si votre amour est allumé au contact de l’amour divin, la raison ne peut plus rien, ni pour ni contre vous. Autant que je puis comprendre, l’homme ainsi touché ne sera pas facilement séparé de Dieu. Et pourtant le flux de l’amour vers nous, notre reflux vers l’amour, tout cela peut être rangé parmi les créatures : c’est pourquoi tout cela peut augmenter encore.

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