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Rusbrock l'Admirable (œuvres choisies)

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CANTIQUE

Il faut que je me réjouisse au-dessus du temps, de l’amour, quoique le monde ait horreur de ma joie, et que sa grossièreté ne sache pas ce que je veux dire. Si je leur dis mon transport, ils vont me mépriser. Ils me mépriseront un moment ; mais j’ai au-dessus des siècles le sentiment de mon éternité, et la joie qui en résulte ne ressemble à rien. Que celui qui veut connaître la vérité rentre en lui-même et vive au-dessus des sens ; la connaissance la plus claire part du fond le plus intime. Heureux qui la possède ! il est incomparable aux autres créatures. Quant à moi, je suis sorti ; j’ai dépassé par mes excès. Mon essence est trop riche pour qu’une créature puisse la saisir. Autrefois, quand j’étais captif dans vos filets, j’étais si soumis au monde qu’on ne me poussait pas du coude sans m’irriter. Je m’étais égaré loin de mon essence parmi les choses qui tombent et coulent. Maintenant je suis absous de vos nœuds. O liberté si longtemps, si longtemps désirée et cherchée ! la voici ! je la tiens ! je la sens ! je me repose dans le lieu saint. Adieu, race ignorante et grossière, j’abandonne les hommes à leurs pensées qui sont mensonge et ruine. Là où fut de toute éternité mon type sans commencement, là sera ma vie sans fin. Le Dieu tout-puissant, qui nous a fait don de tout lui-même, est un amour immense, et la lumière est son assistante. Quiconque rentre en soi, dit adieu aux amours et aux douleurs du monde. Il ne trouve que l’essence pure, sans dimension ni mesure, très simplement éternelle. Qu’on lise et qu’on écrive tout ce qu’on voudra, l’Être demeure ce qu’il est, et il est très libre en lui-même. Croyez-moi, mes enfants. L’accident n’est pas dans l’absolu. Celui qui sait cela par expérience a le droit de dire en vérité que la joie est son partage.

FIN

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