L'avision de Christine
Les contre dis d’aristote aux autres philosophes.
Aristote qui lonc temps fu apres ou quel je fus tres vraye et certaine par le moyen de son noble engin et entendement qui moy et mes filles attrey les plus soubtilles impugnatables/ & les autres poetes non mie les impugna en tant comme poetes/ mais en tant que ilz semblent philosophes/ et sont hors de verité/ aussi recite il d’ippones/ le quel sicomme maisme il recite sur le livre de l’ame/ fu de tres rude engin/ car il mettoit l’ame des bestes et des hommes estre eaue/ Cestui dit il suivi du tout thales sanz lui riens adjouster/ Et pource dit il nulle louange ne nul pris n’en doit recevoir.
¶ A autres philosophes je dis et fis a croire que l’air estoit principe de toutes choses si comme a dyogenes & anaximenes/ et disoient que l’air estoit premier de l’eaue Et principe de toutes choses simples/ c’est a savoir des elemens/ Si est a savoir que .ii. anaximenes furent et tous .ii. philosophes C’est assavoir l’un du temps aristote/ Et de cestui il n’entent pas ycy/ mais cestui anaximenes dont il fait mencion fu disciple d’anaxamandra qui disciple avoit esté thales devant dit/ Et cestui anaximenes & anaximendra furent du temps que cirus conquist le royaume de mede/ et transporta aux persens ou temps de la destruccion du temple de jherusalem/ En ce temps cy aussi c’est assavoir ou temps d’anaximenes regnoit tarquin l’orgueilleux. Le .vii.e et le derrenier roy de romme/ cellui qui fu chacié pour tarqui son filz qui viola lucrece/ cellui aussi fu disciple d’anaximenes/ Toute foiz tant de difference ont ilz qu’anaximenes mettoit l’air simplement principe se non en tant que composé il fust avec raison divine/ Et de ce vint une oppinion qui est recitee sur le premier de l’ame/ Et la raison peut estre fu tele qui les mouvoit Car ilz veoient que par respiracion d’air la vie de plusieurs animaulx au moins du plus des bestes est sauvee/ Et sanz air elle est anichilee/ Et aussi car ilz veoient par imitacion & ensuite de l’air varier les generacions et les corrupcions des herbes et de plusieurs des choses.
¶ .ii. autres philosophes c’est assavoir ypassus et eraclitus mirent le feu estre principe et matere des choses et peut estre furent meus a ce pour la soubtilleté et noblece qu’il a/ Car meismes pour ce que ilz le veoyent luisant et monter contre mont/ ilz cuidoient le ciel estre de feu/ Cestui eraclitus/ pittagoras/ democritus et anaxagoras & plusieurs autres furent tous en un temps/ C’est a savoir ou temps que prophetisoient/ en judee/ aggenus/ zacharias/ et malechias/ ou temps du dit cirus.
¶ Cestui eraclitus sicomme il avoit oppinion ou feu quant aux principes & causemens des choses ainsi comme on lit fu tout le premier de tous les anciens qui par maniere d’art trouva deviner ou feu/ et celle art que on dit piromancie/ Et sicomme on lit en aucuns traictiez d’elle/ lui lonc temps ainçois pronostiqua la desolacion de babiloine la cité devant qu’elle fust avenue.
¶ Ainsi diversement mirent yceulx le principe de matiere/ C’est assavoir d’eaue d’air & de feu en y adjoustant le quart element/ c’est assavoir la terre ilz en disoient toutes choses causees/ et les disoient estre incorruptibles & ingenerables/ sicomme faisoient ceulx qui mirent un principe/ mais il metoit que par l’assemblement d’entre eulx selon diversité de plus ou de moins se causoient les diversitez des choses qui se font.
¶ Dont combien que anaxagoras fust ainsné d’empedecles en temps/ toutefoiz fu il plus novice en savoir/ Car comme un chacun abregier doye a son povoir les principes des choses par quoy moins en deust avoir mis que ne fist empedocles le quel en mettoit trop sicomme plus plainement il appert ou premier de phisiques/ Cestui ancore pour les accroistre les mist infinis/ c’est assavoir car il disoit les elemens et toutes choses estre faites d’infinies petites parties/ lesquelles il mettoit estre les drois princippes & mettoit les choses estre engendrees & corrompues par congregacion & disgregacion/ c’est a dire par assemblement & desassemblement d’icelles N’autrement ycelles ne pourissent ainçois pardurablement demeurent/ Dont par les choses ja dictes de Aristote conclut que par anaxagoras et par les oppinions des jadis philosophes on ne peut autre chose cognoistre fors seulement la cause de matiere.