L'avision de Christine
Dit christine de ses bonnes fortunes.
Moult nous fu fortune favorable le temps durant de la vie du sus dit bon sage roy charles/ Et avec les autres gloires des prosperitez receues/ en joyeuse plantureuse et paisible vie/ en mariage/ comme ce soit naturel joye/ a tout loyal serviteur veoir la prosperité de son bon maistre la dieu merci puis le temps de la venue de mon dit pere au service du roy gouverné en partie mesmement en ses guerres par l’administracion de son sage conseil selon la science de astrologie crut & augmenta de mieulx en mieulx la valeur de ses prosperitez recevant plusieurs victoires et conquestes sus ses ennemis/ et que ces choses soient vrayes je m’en rapporte aux vivans princes & autres ancore de ce temps qui ce scevent/ le quel dit bien du prince estoit le comble de la joye de son sus dit feal serviteur/ non obstant que a l’usage des philosophes fust nulle l’espargne de la peccune/ et avoir de mon dit pere/ la quelle chose sauve sa reverence je ne repute mie louable en l’estat des mariez soubz la quelle main doit estre la cure de leur maisnage souffreteux apres eulx peut estre a cause de leur prodigalité/ toute voye non obstant la liberalité de ses coustumes la pourveance du bon roy ne laissoit a l’ostel de son amé deffaillir nulles choses neccessaires.
¶ A venir au point de mes fortunes le temps vint que ja approchoie l’aage ou quel on seult les filles assener de mari tout fusse je ancores assez jeunette non obstant que par chevaliers autres nobles & riches clercs fusse de plusieurs demandee et ceste verité ne soit de nul reputee ventence/ Car l’auctorité de l’onneur et grant amour que le roy a mon pere demonstroit estoit de ce cause non mie ma valeur/ comme mon dit pere reputast cellui plus valable qui le plus science avec bonnes meurs avoit/ ainsi un jone escolier gradué bien né et de nobles parens de picardie de qui les vertus passoient la richece/ a cellui que il reputa comme propre filz je fus donnee/ En ce cas ne me plains je de fortune/ car a droit eslire en toutes couvenables graces sicomme autre foiz ay dit a mon gré mieulx ne voulsisse cellui pour sa souffisance tost apres nostre sus dit bon prince qui l’ot agreable lui donna l’office comme il fust vaquant de notaire et son secretaire a bourses & a gages et retint de sa court tres amé serviteur.