L'avision de Christine
Ancore des oppinions des philosophes.
Mais certes ycy met il l’autre raison par la quelle au rebours il appert que la terre soit tres proprement principe/ car comme ce soit chose evident que ce qui est derrenier en generacion est premier en nature/ pource que nature a la fin de generacion tent a ce qui est premier en son entencion/ mais tant que une chose est plus deprise plus espesse et aussi plus composte/ Tant est elle plus derreniere en generacion/ pour ce que en voye de generacion on precede de plus simples choses aux composees sicomme des elemens on va aux miscions/ et les mixtions aux humeurs et des humeurs aux membres/ tant que finablement on vient a homme qui est le plus compost Semblablement doncques comme ce qui est le plus espeus appert estre en generacion derrenier/ et par consequant principe de nature/ il appert que ceste conclusion soit contraire a celle de devant/ Car ainsi la terre qui est plus espesse et plus disperse sera premiere d’eaue et l’eaue que l’air/ et l’air que le feu/ Si est pour ce a savoir que il y a difference entre querir ce qui est premier & a parler simplement/ Car s’on enquiert de premier simplement n’est pas doubte que premier est parfaict/ de imparfaict et faict que n’est poissance/ Car nulle chose n’est ramenee d’imparfaict a parfaict/ ou de poissance en fait/ se non par aucun ens parfaict/ c’est a dire par aucune chose estant de fait parfaicte Et c’est cy a savoir que je appelle poissance en tant que je la distingue contre fait/ La poissance de quelconques effait le quel n’est c’est a dire de quelconque chose produisible et menable en aucune nature soit bonne ou mauvaise/ ycelle nature non estre ore/ mais povoir estre/ Et pource la nomme l’en poissance de povoir estre ou non/ mais quant elle est/ elle est nommee fait a difference de povoir estre/ Et parce il appert que fait est le plus noble/ Dont pource se nous parlons de la perfeccion de dieu/ dieu si est tres parfaict/ et donques tres premier/ Car en son essence nulle possibilité ne fu ainçois que fait/ mais ces particulieres choses qui precedent en leur estre de poissance en effait/ la poissance en ycelles quant temps si precede le fait et ainsi l’imparfaict le parfait combien toutefois que a nature le fait soit le premier c’est asavoir quant en son entencion et maniere d’elles savoir produire/ Tout ainsi que il appert d’un messagier qui va en aucun lieu Combien que le lieu ou il va quant au labour et a son entencion il atteigne de y venir/ Toutefoiz estoit il le premier quant a son entencion/ car autrement ne se fust il pas meu/ Et sicomme au lieu quant il ataint on pourroit dire qu’il y estoit deffaict. aussi ainçois qu’il atteignist s’entencion povoit estre appellé poissance/ Et ainsi il appert que fait se non en temps/ toute foiz quant a nature ou a entencion est premier que poissance/ il est du tout manifeste que ainsi le premier principe de toutes choses il fault estre tres simple pour ce que toutes choses sont composees des simples & non e converso donques il estoit neccessaire aux anciens naturiens que l’un et l’autre ilz attribuassent au principe premier/ c’est a savoir au principe du monde qu’ilz attribuassent avec souveraine simplicité souveraine perfeccion Mais comme ces .ii. ne puissent estre atribuez a aucun principe corporel Car es generacions & es corrupcions les tres simples choses sont les plus imparfaictes pour ce leur sembloit estoient ilz contraires mettre division es principes.