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La Vie d'un Simple (Mémoires d'un Métayer)

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XV

Le bourg de Saint-Menoux s'étendait en longueur, assez important, et possédait une demi-douzaine d'auberges dont l'une avec billard et l'autre avec jeu de quilles,—sans compter que l'on dansait à deux endroits aux grands jours.

Depuis ma rupture avec Thérèse je sortais assez régulièrement chaque quinzaine, non sans demander à chaque fois une pièce de quarante sous à mes parents… Ils ne me l'accordaient jamais sans me faire une morale que j'écoutais tête basse, nerveux et agacé. Des fois ils ne me donnaient que vingt sous, ou même rien du tout. Alors, furieux, je parlais de les laisser en plan et d'aller me louer ailleurs…

Nous étions cinq ou six de la classe prochaine à nous fréquenter et nous avions pris goût au jeu. Nous faisions de longues parties de quilles ou de neuf trous. Il nous arrivait les jours de gain de boire force litres, de rentrer tard et passablement éméchés. Dans ces moments nous n'étions pas d'humeur accommodante—surtout à l'égard de «ceux du bourg».

«Ceux du bourg», c'étaient les jeunes ouvriers des différents corps d'état: forgerons, tailleurs, menuisiers, maçons, etc. Il y avait entre eux et nous un vieux levain de haine chronique. Ils nous appelaient dédaigneusement les laboureux ou les bounhoummes. Nous les dénommions, nous, les faiseux d'embarras, à cause de leur air de se ficher du monde, parce qu'ils s'exprimaient en meilleur français et sortaient souvent en veste de drap, sans blouse. Ils avaient leur auberge attitrée comme nous avions la nôtre, et on ne s'aventurait guère les uns chez les autres sans qu'une dispute s'ensuivît.

Ce dimanche de décembre, trois des gas du bourg ayant bu du vin blanc le matin, se trouvèrent être déjà en train sitôt après la messe. Ils vinrent pour jouer aux neuf trous. L'un de notre groupe dit:

—Pas de bourgeois avec nous!

—Soyez tranquilles, bounhoummes, nous avons de l'argent pour nos mises! repartit l'un d'eux.

Étant à jeun je me sentais un peu timide avec ces gas-là, qui, même sans avoir bu, avaient plus de blague que nous. J'osai néanmoins:

—Il ne faut pas que ça vous embête, les bounhoummes, les laboureux ont autant d'argent que vous pouvez en avoir.

J'avais bien trente sous!

L'un de mes intimes, le grand Gustave Aubert, assez brutal et coléreux, les cingla d'une apostrophe plus grossière. Ils ripostèrent. On en arriva finalement à s'engueuler ferme de part et d'autre; et, comme nous étions les plus nombreux, nous les chassâmes de la cour où était le jeu.

La partie recommença après leur départ et notre groupe fut favorisé: Aubert gagna, moi aussi, un autre encore. Ce fut une occasion de noce…

Vers huit heures du soir, ayant bien dîné, le diable nous tenta de pénétrer dans l'auberge où ceux du bourg étaient réunis autour du billard. Sensation. Nous nous observâmes mutuellement. Enfin, l'un de ceux que nous avions expulsés le matin, un petit cordonnier brun, lança d'une voix forte:

—Les porchers ne sont pas admis ici!

—Répète voir, feignant! répète voir que j'sons des porchers! riposta Aubert, roulant des yeux furieux.

—Oui, oui, reprit l'autre, vous êtes des porchers! des pantes! des tas de sacrés bounhoummes!

Un de ses camarades, mettant la main devant son nez, beugla:

—Misère! ça sent la bouse de vache!

Et un troisième:

—Ce n'est pas étonnant; ils se lavent les jambes une fois par an; ils gardent une couche de bouse l'hiver pour se tenir chaud!

La partie de billard interrompue, ils étaient dix à présent à nous entourer, à nous huer. Nous nous efforcions de faire bonne figure en leur retournant leurs insultes grossies le plus possible. Aubert, fier de sa force, rageait:

—Venez donc le dire dehors, sacrés feignants que vous êtes, bourgeois manqués, arsouilles!

Le patron intervint, prêchant le calme, nous suppliant de sortir, nous, campagnards, derniers arrivants. Mais cela ne faisait pas notre affaire.

—Pourquoi sortir? Nous avons le droit d'être là aussi bien qu'eux!

Avec des ménagements, le bistro cependant nous poussait dehors peu à peu. Les autres intervinrent:

—A la porte, les bounhoummes. A la porte!

Et, sans nous frapper, ils nous bousculèrent…

—Ah, c'est comme ça! fit Aubert. Eh bien, vous allez voir!

Et d'asséner un grand coup de poing sur la tête du petit cordonnier brun qui, dans le clan opposé, se démenait le plus.

Alors la mêlée devint générale. Les coups de poing, les coups de pied pleuvaient, en même temps que fusaient les injures. Et l'aubergiste par une pression obstinée nous rapprochait du seuil, amis et ennemis… Quand les derniers furent à proximité, il donna une poussée brusque, si bien que deux ou trois dégringolèrent,—et ferma sa porte en vitesse.

Dans la rue, que balayait un vent glacial précurseur de neige, la lutte continuait acharnée, furieuse. On entendait:

—Tiens, attrape ça, bounhoumme!

—V'là pour toi, bouif!

—Cochon! il m'a cassé deux dents!

—Le nez me saigne, laisse-moi! me dit un maçon à qui je venais d'appliquer un formidable «gnon».

Aubert serrait à l'étouffer un ouvrier maréchal qui, impuissant, le mordait au bras et à la figure; un charron vint délivrer le maréchal et, combinant leurs efforts, ils renversèrent mon grand copain. Lui, aveuglé de rage et de colère, tira son couteau, en porta un coup sur la main de l'un, laboura la joue de l'autre. Il y eut des cris de fureur:

—Un bounhoumme qui se sert de son couteau!

—Oui, fit Aubert relevé, nu-tête, les yeux hors de l'orbite, les dents grinçantes, la main levée brandissant le couteau saignant,—si d'autres ont envie d'en avoir autant, qu'ils s'approchent!

Le garde champêtre arrivait, et des curieux avec des lanternes.

—Voyez, il y en a un qui saigne comme un bœuf!

—Tas de sauvages! Ils ont l'air fin de s'abîmer comme ça!

Des hommes séparant ceux qui luttaient encore nous retinrent éloignés. Car tellement nous étions furieux tous que nous continuions à nous invectiver et cherchions derechef à nous précipiter les uns sur les autres. Le garde champêtre inscrivit nos noms sur son carnet. On soigna les blessés. Nos antagonistes furent emmenés par leurs parents ou leurs patrons. Le père du maréchal qui avait reçu le coup de couteau à la joue jeta, en s'éloignant:

—On va laisser les laboureux tranquilles; ils se battront ensemble s'ils veulent.

—Les laboureux vous valent bien! hurla Aubert.

Et il voulut courir sus à leur groupe. Notre aubergiste et quelques voisins qui l'accompagnaient nous incitèrent à la modération. Je n'étais moi-même ni ivre, ni encoléré au point de ne plus rien comprendre. Je dis:

—C'est assez, Gustave, il vaut mieux s'en aller…

Et nous partîmes, en effet, pas très loin d'ailleurs, car l'idée nous vint de boire un café froid, histoire de se «calmer les sangs», comme on dit… Quelques consommateurs qui se trouvaient là s'entretenaient de la rixe:

—Ils en sauront long! il y a des coups de couteau!

—Ça sera peut-être de la prison!

—Rien d'impossible.

Aubert, toujours très énervé, donnait de grands coups de poing sur la table, disant qu'il se foutait de la justice.

—S'il faut aller en prison, on ira, voilà tout. Et ça ne m'empêchera pas de me battre encore quand on m'insultera. Ce que je ne veux pas, c'est passer pour feignant, non, jamais! Les gas du bourg voulaient nous flanquer une trifouillée:—eh bien, c'est eux qui la tiennent… Ils ne pourront pas dire que les laboureux sont des lâches!

Et nous d'assurer avec lui que nous ne regrettions rien, que, d'ailleurs, toutes les bonnes raisons étaient de notre côté. Au fond, nous étions déjà très inquiets.


Le lendemain, les gendarmes de Souvigny poussèrent jusqu'à la Billette pour m'interroger. Les apercevant, mes petits neveux, qui jouaient dans la cour, se réfugièrent dans la grange où nous battions au fléau, se blottirent derrière un tas de paille et n'en bougèrent plus.

Mes parents ne furent qu'à demi surpris;—à cause de mes vêtements souillés, de ma figure meurtrie, j'avais dû avouer ma participation à une dispute.

Les gendarmes m'ayant posé seulement quelques questions sommaires, me convoquèrent à la mairie de Saint-Menoux pour deux heures de l'après-midi.

A l'heure et au lieu indiqués nous nous trouvâmes réunis tous, artisans et campagnards. Le maréchal frappé par Aubert portait un bandeau sur la joue; un autre avait le bras en écharpe; plusieurs boitaient; des «gnons», des bleus, des meurtrissures se voyaient encore sur tous les visages comme de convaincantes, sinon glorieuses cicatrices.

Le maréchal des logis, chef de la brigade de Souvigny, menait l'enquête. Ses traits accentués, son air froid, sa longue moustache noire lui donnaient un air rude en rapport avec ses fonctions. Il nous interrogea séparément en commençant par les blessés. Un gendarme crayonnait à mesure les réponses. Ah! notre morgue du dimanche était loin! Nous nous regardions, amis et ennemis, sans haine, avec seulement le regret de cette bêtise aux si vilaines suites… Gustave Aubert, questionné plus longuement parce que seul à s'être servi d'un couteau, ne répondait que par monosyllabes,—affalé, tremblant, pitoyable. Les plus malins lorsqu'ils ont un verre dans le nez sont souvent les plus lâches, les plus couards aux heures difficiles.

Je dois dire que ceux du bourg s'en tirèrent mieux que nous à l'interrogatoire—parce que moins impressionnés, s'exprimant avec plus d'aisance. Et il en fut de même à l'audience la semaine suivante. Les campagnards, habitués au travail solitaire en pleine nature, font toujours piètre figure en présence des gens de loi et de tous les «Messieurs» en général…


On peut croire qu'après cela j'eus de tristes jours à la maison, avec des reproches à n'en plus finir sur les ennuis, les frais, le déshonneur que j'allais causer.

—Ce n'est pas une petite affaire, Seigneur de Dieu, disait ma mère, tu vas peut-être aller en prison! Tu seras «marqué sur le papier rouge»! Quelle misère d'élever des enfants qui vous causent un tel mauvais sang!

Mon père se lamentait presque autant; les autres témoignaient aussi de l'inquiétude et, certes, je n'étais guère tranquille moi-même.

Quand M. Boutry eut connaissance de l'aventure, il me fit souventes fois la morale, disant que c'était indigne d'un siècle de civilisation que de voir se battre ainsi, sans motif, des jeunes gens d'une même commune.

Il intervint néanmoins auprès du maréchal des logis, auprès du maire; et, ne pouvant nous éviter la correctionnelle, il s'occupa de nous chercher un avocat,—le même pour tous les belligérants.

—Ce procès doit avoir pour conséquence une réconciliation générale et durable.

Il n'était guère prophète, ce bon M. Boutry! Soixante années ont passé depuis lors et l'antagonisme, pour être moins violent, subsiste encore, à Saint-Menoux et ailleurs, entre les garçons du village et ceux des fermes.


Le jour de l'audience, nous nous rendîmes à Moulins à pied, en deux groupes,—ceux du bourg les premiers, nous ensuite,—à une demi-heure d'intervalle. Il me souvient que je fus bien étonné en passant sur le pont de l'Allier. Je n'avais jamais vu que l'étroite Burge, de Bourbon, les tout petits ruisseaux de nos prés, et ne croyais pas qu'il pût y avoir des rivières aussi larges… Ceux de mes compagnons qui venaient au chef-lieu pour la première fois partagèrent mon étonnement.

En ville, nous allions lentement, regardant les magasins, en badauds qui n'ont jamais rien vu. Il avait plu le jour précédent et le ciel menaçait encore; nos sabots glissaient sur les trottoirs humides. J'avais conscience que, pour les citadins, nous devions former un groupe ridicule. En effet, les employés de bureau, les demoiselles de magasin qui s'en allaient déjeuner nous jetaient des regards curieux, nuancés d'ironie.

Un homme chargeait sur un tombereau des tas de boue; je lui demandai s'il connaissait l'endroit où l'on juge.

—Le Palais de justice? fit-il, un peu étonné, c'est rue de Paris, un grand bâtiment en briques rouges avec une cour au milieu. Vous en êtes encore loin; il vous faut aller d'abord jusqu'à la place d'Allier et là vous demanderez à nouveau.

Il nous indiqua le chemin pour arriver à cette place d'Allier que nous ne fûmes pas longtemps à trouver. Et là nous aperçûmes, en contemplation devant l'étalage d'un bazar, nos compatriotes ennemis, les gas du bourg. Ma foi on était hors de son atmosphère habituelle, on n'était plus chez soi; on n'était plus soi; la rancune s'en trouva tout de suite atténuée. Ils se tournèrent de notre côté; nous échangeâmes des sourires.

—Eh bien, on y va?

Le petit cordonnier brun répondit:

—Nous vous attendions… Seulement, on commençait à craindre que vous n'ayez mangé le mot d'ordre.

Et de nous diriger de compagnie vers le grand bâtiment de briques rouges…

On nous fit entrer dans une salle carrée, blanchie à la chaux et garnie de bancs, où il nous fallut attendre une bonne heure, sous la surveillance de deux gendarmes, en compagnie de six roulants et de trois braconniers.

Notre tour vint enfin d'être appelés, après tous les autres, et nous pénétrâmes à la file dans la salle du tribunal. Dans le fond, sur une sorte d'estrade surélevée, les trois juges, en robe noire, étaient assis. Au mur, derrière eux, un grand Christ dominait la scène. L'homme du milieu nous interrogea,—un gros rougeaud à figure rasée dont les yeux clignotaient sous le verre des lunettes. Nous avions tous des allures de bêtes prises au piège; nous répondîmes d'un ton si humble qu'il dut se demander si nous étions bien les mêmes fous furieux qui s'étaient tant cognés quinze jours auparavant…

Après l'interrogatoire, un autre magistrat en robe, un jeune aux épais favoris noirs, qui siégeait sur une petite estrade placée à gauche de celle des juges et un peu en avant, flétrit notre abominable conduite, nous traita de brutes sanguinaires,—conseillant au tribunal de nous appliquer toutes les rigueurs du Code. Mais ce fut, après, le tour de notre avocat, un petit barbu qui avait l'air de se ficher du monde. Il qualifia de «gaminerie sans conséquence» notre lutte épique, assura que nous étions tous de braves et inoffensifs petits jeunes gens dont le seul tort avait été de boire un verre de trop certain soir—et supplia les trois hommes du fond de ne pas nous mettre en prison.

Ceux-ci, après échange de quelques mots à voix basse, se rangèrent à son avis. Aubert, en raison des coups de couteau, écopa de vingt-cinq francs d'amende; les autres s'en tirèrent avec seize francs.

Ayant tous ensemble cassé la croûte dans un caboulot de la place du Marché, nous reprîmes le chemin de Saint-Menoux. Cette étape du retour se passa bien, sauf que plusieurs avaient les pieds meurtris et que tout le monde était très fatigué. Le petit cordonnier essaya pourtant à deux ou trois reprises de se payer nos têtes; mais ses amis n'eurent pas l'air de le soutenir, et les rapports restèrent cordiaux entre les deux groupes réunis.

On fut heureux chez nous de ce que je m'en tirais sans prison; mais la solde de l'amende et des frais parut énorme, et des échos reprocheurs me blessèrent longtemps…


Le tirage au sort approchant, mes parents me prirent à part un beau jour pour m'annoncer que je n'avais pas à compter sur un remplaçant. Et de me détailler leurs raisons: le déménagement, la mort de ma grand'mère, occasions de dépenses considérables; les sept enfants de mes frères constituaient une lourde charge pour la maisonnée; la canaillerie de Fauconnet avait causé bien du tort; je faisais depuis longtemps de grands frais d'auberge; enfin, ce maudit procès coûtait cher. Impossible de réunir les cinq cents francs nécessaires pour m'assurer au marchand d'hommes, ou à la cagnotte mutuelle qui existait à Saint-Menoux[3]. Cette révélation m'abasourdit, car j'avais toujours espéré jouir du même régime que mes frères.

[3] Dans les gros villages les parents des conscrits versaient préalablement une somme convenue, qui servait à acheter des remplaçants à ceux que le sort désignait pour partir.

—Si la chance me favorise au tirage, je ne moisirai plus longtemps à la maison! annonçai-je.

Mes «vieux», comprenant que j'avais quelque droit d'être mécontent, ne poussèrent pas plus avant…

Mon numéro 68 me sauva,—le contingent arrêté à 59. Je passai encore à la Billette le reste de l'hiver et tout le printemps. Mais, quand arriva l'époque de la Saint-Jean, j'annonçai de nouveau mon intention de me placer ailleurs.

—Pourquoi faire la mauvaise tête? Pourquoi t'en aller, Tiennon? fit ma mère navrée.

—Qu'irais-tu faire autre part, du moment qu'il y a ici de quoi t'occuper? ajouta mon père.

—C'est bien que vous comptiez pouvoir vous passer de moi, puisque vous vouliez me laisser partir soldat, répondis-je malignement. J'ai travaillé pour rien durant toute ma jeunesse; il me faut songer à gagner de l'argent.

Ma mère reprit:

—Ton entretien prélevé sur ton gage, tu n'auras guère de reste. Tu n'auras pas autant pour t'amuser que nous te donnions ici.

Tous me supplièrent de rester: mon parrain, mon frère Louis, mes belles-sœurs, et jusqu'à cette pauvre innocente de Marinette qui m'aimait beaucoup. Les petits même se cramponnaient à moi.

—Tonton, t'en va pas, dis!

J'avais la larme à l'œil en dénouant l'étreinte de leurs menottes, mais ma décision n'en fut pas ébranlée.

D'ailleurs, un peu plus tôt, un peu plus tard la situation imposait ma sortie. Nous devenions trop nombreux pour ne former qu'un seul groupe communautaire.


J'allai donc à la foire de Souvigny, avec un épi de froment sur mon chapeau, et m'engageai à l'année dans un domaine d'Autry, à Fontbonnet, pour la somme de quatre-vingt-dix francs. C'était, à l'époque, le prix des bons domestiques.

Le matin de Saint-Jean, je fis un ballot de mes effets, je pris ma faucille et ma faux, et quittai pour jamais le toit familial, un peu ému de la tristesse de mes parents et de l'inconnu qui m'attendait…

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