L'Aiglon: Drame en six actes, en vers
SCÈNE PREMIÈRE
Un GARDE-NOBLE, des ARCIÈRES, des PAYSANS, des BOURGEOIS, des FEMMES, des ENFANTS, etc., puis L’EMPEREUR FRANZ.
LE GARDE-NOBLE.
(Il montre la porte du second plan, à droite.)
UN HOMME, timidement.
LE GARDE-NOBLE.
(Tous les petits papiers palpitent au bout des doigts.)
(Tout le monde est rangé. Il va se placer près de la table,— puis se rappelant une recommandation à faire.)
UNE FEMME, à part.
(La porte s’ouvre. L’Empereur paraît. Tout le monde se met à genoux.)
L’EMPEREUR, très simplement.
(Il descend. Les petits papiers palpitent de plus en plus. Il a sa longue tête triste des portraits. Mais un grand air de bonté. Il est vêtu, avec une bonhomie voulue, du costume bourgeois qu’il affectionne : redingote de drap gris s’ouvrant sur un gilet paille ; culotte de drap gris entrant dans des bottes. Il prend la supplique que lui tend une femme, la lit, et la passe au chambellan qui le suit, en disant :)
LA FEMME, se prosternant.
L’EMPEREUR, après avoir lu la supplique que lui tend un paysan.
(Il passe le papier au chambellan en disant :)
LE PAYSAN, avec effusion.
L’EMPEREUR, passant au chambellan la supplique d’une paysanne, qu’il vient de lire.
LA PAYSANNE, le bénissant.
L’EMPEREUR, s’arrêtant devant un pauvre homme qu’il reconnaît.
L’HOMME, tournant son bonnet dans ses mains.
L’EMPEREUR, après avoir passé la pétition au chambellan, arrive devant une vieille villageoise.
LA VIEILLE, pendant que l’Empereur lit sa supplique.
L’EMPEREUR, passant la supplique.
(Il prend un autre papier que lui tend un Tyrolien et, après avoir lu.)
LE TYROLIEN.
L’EMPEREUR, souriant.
LE CHAMBELLAN, annotant la supplique que lui passe l’Empereur.
LE TYROLIEN, vivement.
L’EMPEREUR, arrêté devant un grand gaillard aux jambes nues.
LE MONTAGNARD.
L’EMPEREUR, haussant les épaules.
(Il passe la supplique au chambellan, et prend des mains d’un fermier cossu la suivante, qu’il lit à mi-voix.)
(Lui rendant son placet.)
LE FERMIER, désappointé.
L’EMPEREUR.
(La figure du fermier s’éclaire.)
LE CHAMBELLAN, prenant note.
LE FERMIER, vivement.
(Se courbant devant l’Empereur.)
L’EMPEREUR, lisant le papier qu’il a pris des mains d’un jeune berger profondément incliné et enveloppé d’un grand manteau.
(Il passe la supplique au chambellan, qui l’annote.)
LE CHAMBELLAN.
LE PATRE, se redressant.
(Il jette son manteau, et l’uniforme blanc apparaît. Mouvement. Silence effrayé.)
L’EMPEREUR, d’une voix brève.
(Les officiers font rapidement sortir tout le monde. Les portes se referment. Le grand-père et le petit-fils sont seuls.)