L'Aiglon: Drame en six actes, en vers
SCÈNE XIV
LES MÊMES, moins LA COMTESSE.
UN SOUPEUR, qui a vu sortir la Comtesse.
TIBURCE, haussant les épaules.
(L’Archiduchesse, en regagnant son oranger, passe devant celui où sont assis le duc, Flambeau et Fanny.)
LE DUC, l’arrêtant au passage, d’une voix basse et émue.
L’ARCHIDUCHESSE, regarde un instant ce jeune homme encapuchonné et masqué, et lui tend la main.
(Elle regagne sa place. Tout le monde soupe, rit, cause.)
GENTZ, se levant, un verre de champagne à la main.
(Rires et protestations.)
PLUSIEURS.
GENTZ.
L’ARLEQUIN.
GENTZ.
TOUT LE MONDE, se levant dans une subite explosion de haine joyeuse.
(Mouvement du duc. Tous les verres sont levés. Flambeau vide tranquillement le sien dans le canon de son fusil.)
LE DUC.
FLAMBEAU.
(Tout le monde se rassied. La conversation devient générale. On se parle d’un oranger à l’autre.)
LE SCARAMOUCHE, riant.
LE PETIT MARQUIS.
TIBURCE.
LE DUC, indigné.
FLAMBEAU, craignant qu’il ne se trahisse.
LE POLICHINELLE, dédaigneux.
FLAMBEAU, toujours bas au duc, lui saisissant la main.
TIBURCE.
L’OURS.
FLAMBEAU, entre ses dents.
L’ARLEQUIN, à Gentz.
(Gentz se lève. Mouvement du duc.)
FLAMBEAU, au duc.
GENTZ, faisant rapidement descendre une mèche en pointe sur son front.
(Fronçant le sourcil.)
(Mettant la main dans son gilet.)
(Et satisfait.)
(Acclamations et rires.)
LE DUC, dont les doigts nerveux arrachent la dentelle de la nappe.
FLAMBEAU, s’est retourné avec un mouvement furieux vers Gentz, mais la caricature même de ce qu’il aimait tant l’émeut, et calmé, il dit d’une voix sourde :
LE CROCODILE.
(Rires.)
FLAMBEAU, bas au duc.
LE PIERROT.
FLAMBEAU, ironique.
LE DUC.
TIBURCE.
FLAMBEAU, sursautant.
(C’est le duc maintenant qui le retient.)
TIBURCE.
FLAMBEAU, à part.
TIBURCE.
L’OURS.
TIBURCE.
UN TRIVELIN.
TIBURCE.
LE TRIVELIN.
TIBURCE.
FLAMBEAU, se levant furieux.
TOUT LE MONDE, l’applaudissant de si bien jouer son rôle.
GENTZ, riant, à Flambeau.
(Il lui passe un plat.)
FLAMBEAU, prenant le plat.
UN PAILLASSE, avec le plus aristocratique dégoût.
TIBURCE.
FLAMBEAU, doucement.
UNE VOIX DE FEMME.
TIBURCE.
LE POLICHINELLE.
(Rires.)
FLAMBEAU, prêt à s’élancer.
LE DUC, le retenant.
TIBURCE.
(Rires.)
FLAMBEAU, retenant à son tour le duc, lui dit avec rage.
LE DUC.
FLAMBEAU, dont la main depuis un instant tourmente son couteau.
TIBURCE, renversé sur sa chaise et dégustant à petites gorgées son Johannisberg.
LE DUC, dont les ongles s’enfoncent dans le poignet de Flambeau.
FLAMBEAU, suppliant.
LE DUC.
TIBURCE, laissant tomber un mot entre chaque gorgée.
FLAMBEAU, sentant que le duc va s’élancer, avec désespoir.
TIBURCE.
LE DUC, se levant.
UNE VOIX, partie du fond.
(Brouhaha.)
TOUT LE MONDE, debout, parlant à la fois.
GENTZ, qui est resté assis.
FLAMBEAU, bas au duc.
TIBURCE, blême.
L’ATTACHÉ FRANÇAIS, qui, écartant les groupes, descend vers lui.
LE SCARAMOUCHE, bas à Tiburce.
TIBURCE.
GENTZ, assis, terminant sa grappe de raisin.
L’ATTACHÉ.
TIBURCE.
L’ATTACHÉ.
TIBURCE, ironique.
L’ATTACHÉ.
TIBURCE.
(Échange de cartes.)
L’ATTACHÉ, saluant.
(Il s’éloigne et rejoint deux amis avec qui il se met à causer à voix basse. Les violons ont repris au loin et les groupes, en chuchotant, commencent à regagner le bal.)
FLAMBEAU, qui a disparu une seconde, à droite, vers le vestiaire, revient vêtu d’un superbe manteau et dit vivement au duc.
(Il l’ouvre et le referme.)
TIBURCE, qui s’est rassis seul à sa table, tendant nerveusement son verre à un laquais.
LE LAQUAIS, qui est celui que le duc a envoyé au château,— tout en remplissant le verre de Tiburce.
TIBURCE, levant les yeux sur lui, avec un étonnement hautain.
LE LAQUAIS, baissant la voix.
(Mouvement de Tiburce.)
TIBURCE.
LE LAQUAIS.
TIBURCE.
LE LAQUAIS.
TIBURCE, lui faisant signe d’aller l’attendre dehors.
(Le laquais s’éloigne. Tiburce se lève et la main sur sa grande rapière de capitan.)
Cependant LE DUC, avant de partir avec Flambeau qui l’attend sur le seuil, est allé vers l’attaché qui a fini de causer avec ses amis, et lui mettant la main sur l’épaule.
L’ATTACHÉ, se retournant.
(Le duc soulève son masque une seconde. L’attaché va pousser un cri.)
LE DUC, mettant un doigt sur ses lèvres.
L’ATTACHÉ, bas.
LE DUC.
L’ATTACHÉ, surpris de cette confiance.
LE DUC, avec une grâce fière.
(Vite et bas.)
L’ATTACHÉ.
LE DUC.
L’ATTACHÉ.
LE DUC.
(Il remonte, en le saluant.)
L’ATTACHÉ, le suivant.
LE DUC.
L’ATTACHÉ, avec fermeté.
LE DUC, souriant.
L’ATTACHÉ.
LE DUC.
(Il lui tend la main.)
(Les deux jeunes gens se prennent la main.)
L’ATTACHÉ, avec une extrême courtoisie.
LE DUC, souriant.
L’ATTACHÉ.
LE DUC.
(Il sort. Le rideau tombe.)