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Les Colons du Rivage, ou Industrie et Probité: Ouvrage destiné a servir de lecture courante dans les écoles primaires

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14. — Le Rivage.

Nous avons dit que le lieu où se trouvait la chaumière s'accordait parfaitement avec cette case rustique : il offrait, comme elle, un mélange de beautés agrestes et gracieuses. Quelques roches, qui s'élevaient dans la partie supérieure, y formaient une clôture naturelle, et séparaient le Rivage des bosquets du voisin ; le sol était partout graveleux, excepté dans la partie orientale, c'est-à-dire le long de la rivière. L'ensemble formait un carré long, de figure irrégulière, le bord du lac étant plus étendu que le haut du terrain, et le cours de la rivière que la limite occidentale, par où l'on arrivait depuis le grand chemin. La pente, d'abord un peu rapide, s'adoucissait par degrés, et devenait enfin peu sensible.

La plage étant peu profonde, quand le lac s'agitait, les vagues se brisaient de loin, et roulaient bruyamment jusqu'au bord leur blanche écume. Le peu de profondeur du lac, en cet endroit, amenait une grande différence entre la limite des eaux en hiver, où elles sont basses, et en été, époque de leur plus grande élévation. Lorsque Charles vit, dans l'arrière-saison, le lac diminuer, il se dit : « Si je pouvais une fois le repousser tout de bon, combien de terres gagnées, que je saurais fertiliser! » Mais il comprit, par le mauvais succès de ses devanciers, que le moyen de faire des progrès durables contre un tel adversaire était de les faire lentement et de gagner le terrain pied à pied.

En effet, on voyait dans l'espace à conquérir quatre vieux saules, derniers vestiges d'anciennes plantations, faites sans doute dans des vues pareilles à celles que Charles avait formées. La terre avait lutté contre l'eau, et avait été vaincue. Ces arbres tortueux, déchirés, rongés jusqu'à l'écorce, et couverts de plantes étrangères, qu'ils nourrissaient de leur poudre, étaient comme des trophées du lac victorieux. Ils n'attendaient qu'un orage pour succomber à leur tour. Cependant les nouvelles boutures s'élevaient à leur pied, comme rangées en bataille, pour soutenir des combats qui seraient peut-être plus heureux. Chaque tige avait déjà produit de jeunes pousses, qui, balancées par le moindre vent, riaient à l'œil du jeune colon, lorsqu'il sortait de sa cabane.

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