Les manieurs d'argent à Rome jusqu'à l'Empire
5o Contrat de change. — Quelquefois, les Romains qui avaient à toucher de l’argent dans un lieu éloigné, au lieu de s’y rendre eux-mêmes, y envoyaient un esclave. Ce procédé, assez facile pour les gens riches, possesseurs de très nombreux esclaves et de serviteurs élevés de façon à ce qu’on pût compter sur eux, n’était pas, cependant, à la portée de tout le monde, et, en tout cas, il était trop compliqué. Les textes du Digeste nous le montrent comme employé au cas de prêt à la grosse (nauticum fœnus) ; nous n’avons à le signaler ici, sous cet aspect, que comme trait de mœurs.
Mais nous avons vu que les banquiers servaient usuellement d’intermédiaires, soit pour recevoir, soit pour effectuer des payements, cela pouvait être utilisé aisément dans les remises de place en place, ou contrats du change.
Quels étaient les procédés suivis à cet égard ? Quoique la question touche, par ses détails, plutôt au Droit qu’à l’histoire des banques, nous ne pouvons pas, cependant, même à ce dernier point de vue, passer complètement sous silence ce qui avait été admis dans la pratique romaine.
Lorsqu’on voulait obtenir le payement d’une somme versée à Rome, dans un autre lieu, on pouvait le faire par permutatio ; par exemple, Cicéron envoyant son fils à Athènes, et voulant lui éviter l’ennui et le danger de transporter avec lui de la monnaie, s’était préoccupé de lui en faire avoir par ce moyen, à son arrivée. « Id quæro », écrivait Cicéron à Atticus son ami, « quod illi opus erit Athenis permutarine possit an ipsi ferendum est[285]. » « Je te demande si ce dont il aura besoin à Athènes pourra être obtenu par permutatio, ou s’il faudra qu’il l’emporte avec lui. » A la suite de cette première lettre, Atticus répond que la permutatio est possible, et Cicéron écrit pour qu’elle ait lieu : « De Cicerone ut scribis, ita faciam, ipsi permittam de tempore : nummorum quantum opus erit, ut permutetur tu videbis[286]. » « Je ferai comme tu me dis pour Cicéron, je lui en procurerai à l’occasion ; et tu verras de lui obtenir, par permutatio, l’argent qu’il lui faudra. » Il s’agissait là évidemment d’une sorte d’ouverture de crédit, avec remise de place en place, au moins entre banquiers.
[285] Ad. attic., liv. XII, no 24.
[286] Ad. attic., liv. XII, no 27. Voir aussi : XV, 15 ; V, 15 ; XI, 1, 24 ; ad. div., II, 17 ; III, 5 ; ad. quint., frag. I, 3 ; pro Rabirio, 4.