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Hier et demain : $b pensées brèves

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CHAPITRE II
Les luttes économiques.

Les luttes économiques sont parfois aussi ruineuses que les luttes militaires. L’histoire montre qu’elles engendrèrent la décadence de plusieurs pays.


Pas de progrès sans concurrence, et par conséquent sans luttes industrielles.


De nos jours, une lutte économique peut enrichir le vainqueur. Une lutte militaire le ruine pour longtemps. Les relations entre peuples seront transformées quand des expériences suffisamment répétées auront prouvé l’exactitude de cette vérité.


Un peuple envahissant progressivement une nation avec ses produits arrive à la dominer aussi complètement que s’il l’avait conquise par les armes. La dépendance économique crée vite la dépendance politique.


Les alliances militaires sont faciles, parce qu’elles associent des intérêts semblables. Les alliances économiques durables sont presque impossibles, les intérêts industriels et commerciaux des alliés n’étant pas identiques.


En matière industrielle et commerciale, aucune barrière douanière, aucune intervention de l’État, aucun règlement ne sauraient protéger utilement l’incapacité professionnelle et le défaut d’initiative.


Quand un peuple possède une industrie presque prospère, l’agriculture par exemple, il doit s’efforcer avant toute autre entreprise de rendre cette industrie entièrement prospère.


D’après les statistiques, la France malgré la qualité de son sol n’obtient, en raison de ses procédés inférieurs de culture, qu’une moyenne de 13 hectolitres de blé à l’hectare, alors que l’Allemagne et l’Angleterre en obtiennent 21 et le Danemark 27. La différence est du même ordre pour l’avoine et l’orge. Ne semble-t-il pas évident qu’améliorer notre culture serait autrement rémunérateur que de fabriquer péniblement pour l’exportation des marchandises rendues par la concurrence peu rémunératrices ?


C’est avec raison qu’un éminent défenseur de l’agriculture disait récemment qu’elle deviendra la pierre angulaire de la reconstitution nationale.


La capacité d’absorption commerciale des peuples lointains se réduit à mesure qu’ils progressent. Le Japon et bientôt le reste de l’Asie semblent devoir se fermer entièrement aux produits européens.


Dans les pays où l’industrie est restée individuelle, elle ne saurait lutter contre les associations formées à l’étranger.


Une des grandes forces de l’industrie allemande est d’avoir régularisé l’association des fabricants de produits similaires et rendu ainsi très économique la production.


Les associations d’industries semblables, généralisées depuis longtemps en Allemagne sous le nom de cartels, sont une condition nécessaire des progrès industriels modernes. Pour lutter utilement contre de nouvelles invasions commerciales, nos fabricants devront apprendre à s’associer au lieu de se combattre.


La lutte contre l’invasion des marchandises allemandes n’est possible que par la fabrication de produits similaires au même prix. L’établissement de barrières douanières supposées inviolables n’aurait d’autres conséquences que l’introduction, par les pays neutres, de produits fabriqués en Allemagne ou dans ces mêmes pays neutres par des Allemands. Ce serait enrichir à notre détriment d’autres peuples.


Il a fallu le conflit mondial pour révéler que le commerce allemand allait progressivement conquérir tous les marchés. On accumulera bien des discussions avant d’expliquer comment, avec une situation aussi exceptionnelle, les Germains ne firent pas l’impossible pour éviter la guerre.


Les futures tentatives d’hégémonie industrielle de l’Allemagne seront aussi redoutables que son rêve d’hégémonie militaire.


En attendant le jour où l’orientation des idées aura complètement changé, le monde verra sans doute les luttes économiques alterner avec les luttes guerrières et s’engendrer réciproquement.


Les guerres à main armée représentent un état transitoire, les luttes économiques un état permanent.

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