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Le livre commode des adresses de Paris pour 1692, tome 1/2

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COLLÈGES
ET LEÇONS PUBLIQUES[1].

[1] « Il y a d’ailleurs dans l’étendue de l’Université divers colléges où la jeunesse est instruite à très-peu de frais, et où il y a même des bourses fondées pour l’entretien d’un certain nombre de pauvres étudiants. » Edit. 1691, p. 11.

Les Collèges où il y a exercices ordinaires des Humanitez, de la Rhétorique et de la Philosophie, sont,

Celuy de Loüis le Grand et celuy du Plessis Sorbonne[2], rue saint Jacques. Celuy des Quatre Nations sur le quay de Nesle[3], celuy de Navarre[4], celuy de la Marche[5], et celuy de Montaigu[6] à la montagne sainte Genevieve ; celuy d’Harcourt[7] et celuy de Lizieux, rue de la Harpe[8] ; ceux de Beauvais[9] et de Presles[10], rue saint Jean de Beauvais, celuy du Cardinal le Moine[11], rue saint Victor, et celuy des Grassins[12], rue des Amandiers[13].

[2] Geoffroi Du Plessis, secrétaire de Philippe-le-Long, l’avoit fondé en 1316. Réuni à la Sorbonne en 1647, il prit le double nom qu’il a ici. Les facultés de Théologie, des Sciences et Lettres l’occupèrent sous l’Empire et la Restauration jusqu’à ce qu’on y eût mis l’Ecole normale.

[3] C’est le collége Mazarini, dont il a été parlé plus haut : « Messieurs de Sorbonne, ajoute l’édit. de 1691, p. 11, qui ne tiennent point chez eux de petites classes, ont la direction de ce collége, où ils font enseigner gratis toutes les humanités, au désir de la fondation du feu cardinal Mazarin. Les RR. PP. Jésuites en font de même au collége de Louis-le-Grand, rue Saint-Jacques. »

[4] Fondé en 1364, avec un legs de la reine Jeanne de Navarre, femme de Philippe-le-Bel, il fut rebâti et agrandi plus tard avec le prix de la vente de la tour de Nesle, qui appartenoit aux rois de Navarre. Depuis l’Empire, il est occupé par l’Ecole polytechnique. La chapelle en est curieuse. (Rev. archéolog., t. I, p. 192-200.)

[5] Il datoit de 1420. Guillaume de La Marche l’avoit fondé pour des écoliers de sa pauvre province. Supprimé à la Révolution, il devint une pension célèbre du quartier Latin, la pension Vattier. Les bâtiments en ont disparu, avec une partie de la rue de la Montagne-Sainte-Geneviève, où ils se trouvoient sous le no 37.

[6] Un des plus pauvres et des plus austères colléges de Paris. Aycelin de Montaigu l’avoit fondé en 1314, Erasme y étudia. La maigre pitance, à laquelle on y étoit soumis, l’avoit fait appeler Collége des Haricots, nom qui resta à la prison militaire, qu’on y installa, en 1792. (V. notre Paris Démoli.) Ses bâtiments, qui faisoient l’angle de la rue des Sept-Voies et de la place du Panthéon, furent démolis en 1845, pour faire place à ceux de la nouvelle bibliothèque Sainte-Geneviève.

[7] Un chanoine de Paris, Raoul d’Harcourt, l’avoit fondé en 1220. Ses bâtiments, reconstruits en 1675, ont été emportés en partie par le boulevard Saint-Michel. Ce qui reste est occupé par le lycée Saint-Louis.

[8] Il y a ici une erreur. Si le collége d’Harcourt fut rue de la Harpe, le collége de Lisieux en revanche n’y fut jamais. L’évêque de Lisieux, Gui d’Harcourt, le fonda en 1336, rue des Prêtres-Saint-Séverin ; il passa ensuite rue Saint-Etienne des Grès, et n’en fut déplacé qu’en 1764, pour occuper, rue Saint-Jean de Beauvais, les bâtiments du collége de Dormans.

[9] C’est celui dont nous venons de parler, le collége de Dormans-Beauvais, qui devoit son nom à son fondateur, l’évêque de Beauvais, Jean de Dormans. Il datoit de 1370. Supprimé à la Révolution, Carnot y établit la première école mutuelle d’essai.

[10] Raoul de Presles l’avoit fondé en 1313 pour les pauvres écoliers du diocèse de Soissons, d’où lui vint son premier nom de collége de Soissons. Ramus y professoit ; c’est là qu’il fut tué à la Saint-Barthélemy.

[11] Il devoit son nom au cardinal Jean Lemoine, qui l’avoit fondé en 1302. Calvin y étudia, et Lhomond y fut professeur. Il n’en existe plus rien que le nom d’une petite rue bâtie sur les chantiers qui en avoient pris la place.

[12] Il ne datoit que de 1569. Le sénonois P. Grassin, de qui lui venoit son nom, l’avoit fondé pour des écoliers nés à Sens. Chamfort, qui s’appeloit alors Nicolas, en fut le dernier élève distingué.

[13] « Celui de Cambrai et celui de fondation royale, près Saint-Jean de Latran,… celui des Trésoriers, près de la Sorbonne. » Edit. 1691, p. 11.

Il y a encore des Communautez Religieuses qui ont des Maisons Collègiales dans l’étendue de l’Université, où les nouveaux Profez sont instruits aux Humanitez, Rhétorique, Philosophie, etc., à sçavoir : les Grands Augustins devant le Pont neuf[14], les Grands Cordeliers, près saint Cosme[15], les Grands Jacobins, rue saint Jacques[16], les Bernardins, au quartier saint Victor[17] ; les Carmes, à la place Maubert[18], les Prémontrez, rue Hautefueille[19] ; les Religieux de l’Ordre de Grammont, rue du Batoir[20], et ceux de l’Ordre de Cluny, place de Sorbonne[21].

[14] Ils ont donné leur nom au quai. De leur église, construite en 1368, on fit, sous le premier empire, le marché à la Volaille, qui garda le nom de la Vallée, parce qu’on l’y transféroit de la Vallée de Misère, située près du Châtelet. Ce qui restoit, sur le quai, de l’église devenue marché, vient de disparoître. Il subsiste encore quelque chose des bâtiments, au no 5 de la rue du Pont de Lodi, dont le percement, en 1797, coupa en deux le terrain occupé par le couvent.

[15] Ils avoient donné leur nom à la rue, qui prit, en 1790, celui de rue de l’Ecole de Médecine. Leur église y subsiste encore. C’est le Musée Dupuytren. Pendant la Révolution, ce fut le Club des Cordeliers, d’où Camille Desmoulins, qui en faisoit partie, datoit son journal, le Vieux Cordelier.

[16] Nous en avons parlé un peu plus haut, à propos de leur Bibliothèque.

[17] Dans la rue à laquelle ils avoient fait donner leur nom, et qui prit, en 1806, celui de rue de Pontoise, parce qu’elle est voisine du Marché aux Veaux, que Pontoise approvisionne.

[18] Ils n’étoient pas sur la place même, mais auprès, dans la rue, qui leur devoit son nom. Leur église, qui datoit du XIVe siècle, fut démolie en 1814, pour faire place au marché Maubert. Ces carmes ne sont pas à confondre avec ceux de la rue de Vaugirard, les Carmes déchaussés, à qui l’on doit l’eau de Mélisse, et dont l’église existe encore.

[19] Ils s’y étoient établis, dès 1252, dans une des maisons que Pierre Sarrazin, qui donna son nom à une des rues voisines, y possédoit. Leur chapelle, située au coin de la rue Hautefeuille, à gauche de la rue de l’Ecole de Médecine, fut démolie et rebâtie en 1618. C’est aujourd’hui un café.

[20] Ils n’étoient pas rue du Battoir, mais dans le voisinage, rue Mignon, où, depuis 1603, ils occupoient, par suite d’un échange avec leur prieuré du bois de Vincennes, le collége fondé en 1343, par le maître des Comptes, Jean Mignon.

[21] Le collége de Cluny se trouvoit en effet au coin de cette place et de la rue des Grès. Sa fondation par Yves de Vergy, abbé de Cluny, datoit de 1269. Quelques restes du cloître subsistent encore. David y avoit son atelier en 1806.

Outre les exercices ordinaires de l’Université, on professe la Théologie au Collège de Sorbonne[22], et à celuy de Navarre.

[22] Les écoles de théologie fondées par Richelieu n’étoient pas à la Sorbonne même, mais sur la place, au no 2. Elles furent supprimées à la Révolution.

La Jurisprudence aux Ecolles de Droit, rue saint Jean de Beauvais[23].

[23] V. plus haut.

La Médecine, au Collège des Medecins, rue de la Bucherie[24].

[24] Les écoles de médecine et de chirurgie étoient déjà rue de la Bûcherie en 1472. Les bâtiments en furent reconstruits en 1676, à l’exception d’un portail du XIVe siècle qui existoit encore, il y a quelques années. En 1744, on avoit refait l’amphithéâtre, dont le dôme se voit toujours dans la maison qui porte le no 13, au coin de la rue de l’hôtel Colbert. Ce n’est qu’en 1774 que ces écoles furent transférées, où nous les voyons, dans l’ancien collége de Bourgogne reconstruit exprès, et qu’on avoit acheté aux Bénédictins, qui justement y avoient établi une école de chirurgie.

Les Mathematiques, et les Langues Arabe, Grecque, et Hebraique, au College Royal, Place de Cambray.

Les autres Collèges dont les revenus ne servent maintenant qu’à l’entretien des Bourciers, sont pour les Provinces du Maine et d’Anjou, celui de Bayeux[25] ; pour ceux du Diocese de Narbonne[26], celui de ce nom ; pour la Bourgogne, celui du même nom[27] ; pour le Diocèse d’Arras, encore celui du même nom[28] ; pour la Touraine, celui de Tours[29] ; pour le Diocèse de Vienne et de Bourbonnois, celui du cardinal Bertrand[30] ; pour le Limosin, celui de saint Michel[31] ; pour Theroüenne, celuy de Boncourt[32] ; pour le Diocèse de Bayeux, celui de M. Gervais[33] ; pour le Diocèse de Rheims, celuy du même nom[34] ; pour le Diocèse de Séez, celui de ce nom[35] ; pour ceux de Paris et de Beauvais, celui de sainte Barbe[36] ; pour ceux de la famille de feu M. Fortet, et à leur deffaut, pour Paris et saint Flour, celui de Fortet[37] ; pour ceux de la Famille de Godefroy de Boissy, celui du même nom[38] ; tous lesquels sont dans l’enclos de l’Université.

[25] Il avoit été fondé par Guillaume Bonnet, évêque de Bayeux. L’inscription, que l’on put lire jusqu’à sa démolition, il y a vingt-cinq ans, au-dessus de la porte gothique, rue de la Harpe, no 107 : Collegium Bajocence, fund. anno 1308, dispensoit de chercher la date de la fondation. On l’avoit réuni à l’Université en 1763.

[26] Autre fondation épiscopale. On la devoit à Bernard de Fages, archevêque de Narbonne, en 1317. Ce collége se trouvoit rue de la Harpe, presqu’en face de la rue de l’Ecole de Médecine ; rebâti en 1760, et réuni trois ans après à l’Université, il étoit, depuis la Révolution, un hôtel garni, lorsqu’on le démolit vers le même temps que celui de Bayeux.

[27] « Rue des Cordeliers. » Edit. 1691, p. 11. — La comtesse Jeanne de Bourgogne l’avoit fondé, en 1331, pour vingt pauvres écoliers de sa province. Nous avons dit, dans une des notes précédentes, comment il devint l’Ecole de Médecine.

[28] Il devoit son nom à l’abbé de Saint-Waast, d’Arras, Nicolas Le Candrelier, son fondateur en 1327. Il fut réuni, en 1763, à celui de Louis-le-Grand. Il avoit été transféré de la rue Chartière dans la rue des Murs, qui en prit le nom de rue d’Arras, qu’elle porte encore.

[29] Il étoit au no 7 de la rue Serpente où, de 1330 à 1333, l’archevêque de Tours, Etienne de Bourgueil, l’avoit fondé. Les bâtiments reconstruits en 1730 existent encore.

[30] On l’appeloit aussi collége d’Autun. Il se trouvoit au no 22 de la rue Saint-André des Arts, où l’évêque d’Autun, cardinal Pierre Bertrand, l’avoit fondé en 1341. Lorsqu’en 1764, on l’eut réuni au collége Louis-le-Grand, l’école gratuite de dessin y fut établie pendant quelques années. Il fut démoli sous le premier empire.

[31] L’évêque de Paris, Guillaume de Chanac, l’avoit fondé rue de Bièvre, au XIVe siècle, sous l’invocation de saint Michel. On l’appeloit quelquefois collége de Chanac. Comme limousin, l’abbé Dubois y avoit étudié.

[32] Fondé rue Bordet, en 1357, par le sieur de Bécoud, dont on fit de Bécourt, de Beaucourt, puis de Boncourt. Huit pauvres écoliers, en logique ou philosophie, venus de Thérouanne, pays de P. Bécoud, en furent, d’abord, les seuls élèves. Il fut réuni, en 1638, ainsi que celui de Tournay, au collége de Navarre, qu’il joignoit par une espèce de pont qui traversoit la petite rue Clopin. Son nom et ses priviléges lui furent laissés. Voilà pourquoi ici nous le voyons encore réservé aux écoliers de la ville de Thérouanne, qui malheureusement ne pouvoit guère lui en envoyer, depuis qu’en 1552 Charles-Quint l’avoit complètement détruite. Lorsque l’Ecole polytechnique fut fondée au collége de Navarre, on en mit les bureaux au collége de Boncourt, qui, depuis lors, a été entièrement démoli.

[33] Gervais Chrétien, chanoine de Bayeux et médecin de Charles V, l’avoit fondé en 1370. On l’appeloit aussi collége de Notre-Dame de Bayeux, à cause du canonicat de son fondateur, et des élèves que Bayeux y envoyoit. Il étoit situé rue du Foin-Saint-Jacques, réunie aujourd’hui à la rue des Noyers. On en fit, à la Révolution, une caserne d’infanterie.

[34] « Derrière Saint-Hilaire. » Edit. 1691, p. 11. — Ce collége étoit rue des Sept-Voies. Il avoit été fondé, en 1409, en exécution d’une clause du testament de Guy de Roye, archevêque de Reims. Il n’en reste plus rien, depuis longtemps.

[35] La fondation en étoit due aussi à une disposition testamentaire. Grégoire Langlois, évêque de Séez, mort en 1404, avoit légué l’argent nécessaire, qui n’eut son emploi qu’en 1427. Ce collége n’avoit que huit boursiers, dont quatre du diocèse de Séez. Un don de Jean Aubert, en 1634, permit d’en augmenter le nombre. P. Lallemand, évêque de Séez, fit rebâtir ce collége presque entièrement, en 1730. Quand on le supprima, il devint l’hôtel garni, dit de Nassau. Il fut emporté, en 1854, par la rue des Ecoles, avec le collége de Narbonne, comme lui, rue de la Harpe.

[36] Il avoit été fondé, en 1460, par Geoffroi Lenormant, professeur de grammaire au collége de Navarre, dans l’hôtel de la rue des Cholets et de la rue des Chiens ou Saint-Symphorien, qui avoit appartenu à P. de Châlon. Sainte Barbe, à laquelle il fut dédié, étoit, dit M. J. Quicherat, « la vierge savante qui passa de la plus tendre jeunesse dans l’éternité… après avoir vaincu dans la discussion les plus habiles défenseurs du paganisme grec. » (Hist. du collége Sainte-Barbe, t. I, p. 9-10.) — Ce collége ne s’administra lui-même, et ne fut réellement fondé, que lorsque Robert Dugast, qui l’avoit dirigé, lui eut, en 1557, fait don de l’hôtel de Châlon où il étoit établi depuis un siècle. Il y créa aussi sept bourses : trois grandes, pour les diocèses d’Autun, de Rouen, d’Evreux et de Paris ; et quatre petites pour les paroisses qu’il avoit administrées : celle de Saint-Hilaire à Paris, celle de Saint-Nicolas-des-Alleux-le-Roi, et celle de la Neuville d’Aumont. C’est pour ces dernières, situées dans le Beauvaisis, que nous voyons ici que des boursiers du diocèse de Beauvais étoient admis à Sainte-Barbe, à la fin de 1798, le collége Sainte-Barbe devint l’institution de Lanneau, mais reprit plus tard son nom, qu’il a gardé.

[37] Ce collége de Fortet, situé rue des Sept-Voies, devoit son nom au chanoine de Paris, Pierre Fortet, dont une disposition testamentaire, exécutée en 1397, avoit laissé l’argent disponible pour cette fondation. Comme il étoit d’Aurillac, quatre bourses étoient destinées à des enfants de cette ville ou du diocèse de Saint-Flour, mais pris de préférence dans sa famille. Quatre autres bourses étoient réservées pour Paris.

[38] V. ce que nous avons dit plus haut de ce collége de Boissy, situé rue du Cimetière-Saint-André, à propos de sa bibliothèque.

On enseigne d’ailleurs publiquement et gratuitement par ordre et aux dépens du Roi, au Jardin Royal des plantes, Fauxbourg saint Victor, la Chirurgie, l’Anatomie, la Chimie et la Botanique. Le public est averti de l’ouverture des Leçons par des Affiches, au commencement de l’hiver pour les Dissections Anatomiques, et pour les Opérations Chirurgicales, et au commencement de l’Eté pour la Démonstration des Plantes et pour les Préparations Chimiques[39].

[39] « Aux Ecoles de Médecine rue de la Bûcherie, on fait aussi chaque année des dissections anatomiques et des opérations chirurgicales, mais à prix d’argent. » Edit. 1691, p. 13.

Aux Ecoles de Chirurgie, rue des Cordeliers, on fait aussi annuellement et gratuitement tous les Hivers des Démonstrations Chirurgicales Anatomiques, suivant la fondation de feu M. Biennaisse[40].

[40] « Le public est averti des unes et des autres par des affiches. » Ibid. — Ces écoles de la rue des Cordeliers, auprès de l’église dédiée à saint Côme, patron des chirurgiens, étoient plus exclusivement chirurgicales que celles de la rue de la Bûcherie, dont il a été parlé plus haut. Elles avoient eu pour origine la confrérie de Saint-Côme et Saint-Damien fondée, dit-on, par saint Louis. C’est par son testament que M. Jean Bienaise, mort le 21 décembre 1681, après avoir été un des bons praticiens de son temps, avoit laissé six cents livres de rente pour deux professeurs chargés de faire les démonstrations d’anatomie et de chirurgie, dont il est ici question.

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