Le livre commode des adresses de Paris pour 1692, tome 1/2
MUSIQUE.
Grand Maitre de la Musique de la Chapelle du Roy.
Monseigneur l’Archeveque de Rheims[1], ruë saint Thomas du Louvre.
[1] Charles-Maurice Le Tellier, dont il a déjà été parlé. Il avoit, comme « maître de la Chapelle-Musique », 1,200 liv. de gages, plus 3,000 « pour sa bouche à cour. » Etat de France, 1692, p. 39.
Sur-Intendans de la Musique de la Chambre de Sa Majesté.
M. de la Lande qui est d’ailleurs Maître de la Musique de la Chapelle[2], et M. Boisset qui est Maître de la Musique de la Chambre, en Cour[3].
[2] Michel-Richard de Lalande, d’abord violon, claveciniste et organiste, compositeur de motets, de pastorales et de ballets, puis surintendant de la musique du Roi, charge dans laquelle il mourut, en 1726, à quatre-vingt-trois ans. Il avoit été fait, le 9 janvier 1689, surintendant de la musique de la Chambre, ce qui étoit un acheminement à la surintendance générale.
[3] Jean Boësset, sieur de Haut, fils de Boësset, qui avoit été de la musique de Louis XIII, et de qui l’on a quelques jolis airs de chansons, entre autres celui des couplets de Lingendes, qui furent si célèbres :
Boësset étoit maître de musique des pages de la Chambre, aux gages de 1,140 liv.
Autres Maîtres de la Musique de la Chapelle, de la Chambre et des Plaisirs de Sa Majesté.
Messieurs Lambert, ruë sainte Anne[4], Goupille[5], ruë Minoret[6], rue Colasse, rue Traversine[7], et Moreau, rue sainte Croix de la Bretonnerie[8].
[4] Michel Lambert, si recherché, en 1666, à l’époque de la satire du Repas de Boileau, et qui n’avoit pas alors moins de quatre-vingt-deux ans. Lulli avoit épousé sa fille, et lui avoit donné dans sa maison, qui existe encore aux coins des rues Sainte-Anne et des Petits-Champs, l’appartement où nous le voyons logé, et où il mourut au mois de juin 1696. (V. notre Histoire de la Butte des Moulins.)
[5] Lisez Coupillet. Il faisoit, comme prêtre, pendant le semestre de janvier, les fonctions ecclésiastiques de maître de musique, et avoit soin, durant le même temps, « de la nourriture, éducation, conduite et entretien des pages de musique. »
[6] Guillaume Minoret. Il avoit, pendant le semestre de juillet, les mêmes fonctions que Coupillet pendant celui de janvier. Ses motets sur un certain nombre de psaumes sont très-estimés. Le Cerf de la Vieuville, dans son livre, Comparaison de la musique italienne et de la musique françoise, 1706, in-8, 3e partie, le met, ainsi que Coupillet, sur le même rang, pour la composition, que Collasse et Lalande.
[7] Pascal Collasse, un des meilleurs élèves et héritiers de Lulli. Après avoir collaboré avec son maître, il fit seul plusieurs opéras, dont celui de Thétis et Pelée est le plus célèbre.
[8] Jean-Baptiste Moreau, à qui Madame de Maintenon fit écrire, pour Saint-Cyr, la musique des chœurs d’Esther et d’Athalie. Il fit aussi les airs de quelques chansons de Lainez, son ami de cabaret.
Maîtres pour l’Orgue et pour le Clavecin.
Messieurs le Begue[9], rue Simon le Franc, Taumelin, rue de la Verrerie[10], Couprin, prés saint Gervais[11], Dandrieux, ruë saint Loüis du Palais[12], Nivert, prés saint Sulpice[13], Danglebert, rue sainte Anne[14], Martin, rue de l’Echelle, le Roux [15], rue , Buterne, prés saint Paul[16], Montalan, rue du Cimetiere saint André[17], Ossu l’ainé, rue saint Denis[18], Ossu le cadet, Cloître saint Jacques de l’Hôpital, Garnier, rue Traversine, La Lande, Cour du Palais.
[9] Nicolas Le Bègue, un des quatre organistes de la Chapelle reçus en 1678. Son quartier étoit celui d’octobre. Il touchoit l’orgue à Saint-Merry, et l’on a de lui trois livres de pièces pour cet instrument. Il mourut très-vieux en 1700. Ses ouvrages se vendoient tout près de chez lui, dans la même rue. L’édit. de 1691, p. 62, dit, en effet : « le livre d’orgues de M. Le Bègue se vend chez M. Noël, rue Simon-le-Franc. »
[10] Jacques Tomelin, organiste de la Chapelle, comme Le Bègue. Il exerçoit pendant le quartier de janvier.
[11] François Couperin, le second des trois frères qui fondèrent la renommée de cette dynastie de clavecinistes célèbres. Nous le voyons ici logé près de Saint-Gervais, parce que de 1669 à 1698, il y toucha l’orgue. Il mourut à soixante-dix ans, en 1701, écrasé par une voiture. L’année précédente, Montéclair lui avoit dédié sa Méthode facile de musique.
[12] On ne le connoît que par son fils, Jean-François Dandrieu, qui, de 1720 à 1740, se distingua sur l’orgue et le clavecin.
[13] Guill.-Gabriel Nivers, un des quatre organistes de la Chapelle. Il avoit été maître de musique de la Reine.
[14] Jean-Baptiste d’Anglebert. Il étoit de la musique de la Chambre pour le clavecin, ce qui lui rapportoit 600 liv. de gages, 900 de nourriture, 213 de monture, « et 270 pour la nourriture de son Porte-épinette. » Etat de France, 1692, p. 223.
[15] Il étoit aussi compositeur. V. Le faux Satyrique, 1706, in-8, p. 11, où il est traité de « fameux maître de musique. »
[16] Jean Buterne, un des quatre organistes de la Chapelle-Musique.
[17] « Messieurs Le Règne — c’est celui qui est désigné plus haut sous son vrai nom le Bègue — rue Simon-le-Franc, et de Montalan, rue du Cimetière-Saint-André, sont renommez pour toucher et enseigner le clavecin. » Edit. 1691, p. 60. — Claude Rachel de Montalant, après avoir enlevé de son couvent, où sans doute il donnoit des leçons, la fille de Molière, étoit, vers 1686, devenu son mari. Une note de Titon du Tillet (Parnasse françois, 1732, in-fol., p. 318) que nous avons citée le premier dans le Roman de Molière, 1862, in-18, p. 129, ne laisse sur ce point très-curieux aucun doute : « Elle épousa, dit-il, M. de Montaland, gentilhomme, qui a été quelque temps organiste de Saint-André des Arts. » Il l’étoit sans doute encore en 1691, ce qui expliqueroit pourquoi il logeoit tout près de cette église. Titon le traite de gentilhomme parce qu’il se faisoit appeler : Claude Rachel, écuyer, sieur de Montalant.
[18] Lisez Houssu. Nous avons su son nom par le curieux procès que « les maîtres à danser et joueurs d’instruments tant hauts que bas » firent aux clavecinistes, en 1693, pour les empêcher d’enseigner à toucher le clavecin avant de s’être fait recevoir de leur communauté. Les clavecinistes, représentés par plusieurs de ceux qui figurent ici, dont on a vu les noms plus haut, ou qu’on trouvera nommés plus loin : Médéric Corneil, Nicolas Gigault, Jean-Baptiste de La Brune, Marin de la Guerre, Jean Mérault, Antoine Houssu, Nicolas Le Bègue, Guillaume-Gabriel Nivers, Jean Buterne, François Couprin, appelèrent d’une première sentence rendue contre eux par le prévôt de Paris, et obtinrent, le 7 mars 1695, un arrêt de la Grand’Chambre qui leur donna raison, et leur rendit l’entière liberté d’enseigner.
Autres Maîtres pour le Clavecin.
Messieurs le Moine, ruë saint Honoré[19], Pitay, ruë sainte Croix de la Bretonnerie, Eudet et de la Cerisaye, ruë sainte Croix de la Cité, Bouton, rue Pavée, Mérault et Alexandre, rue saint Denis, Bernier, rue Tictonne[20], Hardy et Landrin, Cloitre sainte Opportune, Cointereau, place Maubert, Saffin, rue des Noyers, Boucher, rue des Assis[21], Corneille, Cloître Notre Dame, de Bordeaux, rue saint Jacques, Raison, rue saint Estienne, Gigot et Delian, rue saint Martin, la Brune, rue des Moineaux, Fouquet, ruë Coquillière, de la Guerre[22] et Jacquet, Isle Notre Dame, etc.
[19] Il étoit de la musique de la Chambre pour le théorbe.
[20] Nicolas Bernier, dont le succès fut si grand, surtout sous la Régence, pour ses motets, la musique de ses cantates et ses airs à boire. Il est fait de lui le plus grand éloge dans le poëme de J. de Serré, la Musique, dont la première édition date de 1714.
[21] Lisez des Arcis.
[22] Son vrai nom étoit Jacquet, le seul que prit son frère nommé ici avec lui. Jacquet de la Guerre étoit organiste à Saint-Séverin. Sa fille, Mlle Elisabeth La Guerre, se distingua sur le clavecin et fit la musique de l’opéra de Céphale et Procris, en 1694. Elle mourut en 1727.
Maitresses pour le même Instrument.
Mesdames Oves, rue saint Denis, et Louis, rue de la Monnoye.
Et encore Mesdemoiselles Rebours et le Tellier, fauxbourg saint Germain[23].
[23] « Mademoiselle Le Tellier, qui demeure au cul-de-sac de la rue Beaubourg. » Edit. 1691, p. 60.
M. du Clos, rue Bétizy, accorde en perfection le Clavecin.
Messieurs Denis, sur le Quay neuf, Richard, ruë du Paon[24], Rosée, rue de Cléry, Créteil, rue Poupée, Dathene, rue saint Antoine[25], Voudry, rue saint Jacques, Boudet, rue saint Martin, Thierry, rue sainte Marguerite, du Catel et l’Esclop, rue Omer[26], Clico, rue Philippot, et le Febvre, rue Aubry Boucher, fabriquent, rajustent et accordent les Orgues et les Clavecins.
[24] « Près Saint-Nicolas du Chardonnet. » Edit. 1691, p. 60.
[25] « Le sieur Dathene, qui fait des clavecins, demeure rue et devant le petit Saint-Antoine. » Id., p. 64. « Le sieur Créteil, faiseur d’orgues, demeure dans la rue Poupée. » Ibid.
[26] Lisez rue au Maire.
Maitres pour la Violle.
Messieurs de sainte Colombe[27], rue…; Marais, ruë Bertin Poirée[28], Theobal, rue de Richelieu[29], des Fontaines[30], rue de Grenelle saint Honoré, de Machy, rue des fossez saint Germain, Garnier, prés le Palais Royal, Bellier, rue de Mommorency, Fourcroy le fils, rue vieille du Temple, etc.
[27] Il n’est plus connu que parce qu’il fut le maître de celui qui vient ici après lui.
[28] « Monsieur Marais touche la viole par excellence, et donne des leçons chez luy, rue Quincampoix. » Edit. 1691, p. 48. — Marin Marais, élève de Sainte-Colombe, et le plus habile joueur de viole de son temps, il a beaucoup écrit pour cet instrument, et, de plus, l’on a de lui plusieurs partitions pour l’Opéra, où il avoit commencé à être simple batteur de mesures. La plus célèbre est celle d’Alcione, dont la Tempête fut un des morceaux les plus à effet de ce temps-là. Elle est décrite dans le poëme de la Musique cité plus haut.
[29] Théobaldo Gaddi, qui, attiré de Florence à Paris par son admiration pour Lulli, fut mis par celui-ci dans l’orchestre de l’Opéra, où il joua pendant près de cinquante ans de la basse de viole. Il avoit fait, en 1691, la musique de la pastorale héroïque de Coronis.
[30] « Le même Des Fontaines montre d’ailleurs à toucher le clavecin et la basse de viole. » Edit. 1691, p. 48.
Mademoiselle Mengey, rue saint Honoré, prés la rue des Poullies, fait aussi profession de toucher et de montrer à toucher la Violle.
Maîtres pour le Theorbe[31].
[31] C’étoit une espèce de grand luth, qui lui-même étoit une sorte de guitare.
Messieurs du Pré, rue des Escoufles, et de la Barre en Cour, qui sont de la Chambre du Roy[32], et encore Messieurs Pinet[33], rue le Moyne, Cloître saint Jacques de l’Hôpital, Aubin, rue de l’Escharpe, Poussilac, prés les Jacobins saint Jacques, Lavaux, rue Hurel, Quay de la Mégisserie.
[32] Du Pré n’étoit qu’en survivance, en 1692, à la chambre du Roi pour le théorbe. Pierre Chabançeau de La Barre, beaucoup plus célèbre, jouoit de la grosse-basse ou du théorbe à la Chapelle-Musique. Il étoit valet de chambre de la Dauphine.
[33] Lisez Pinel. Il jouoit du théorbe à la chambre du Roi, mais y avoit, auparavant, chanté les hautes tailles.
Maîtres pour la basse de Violon.
Messieurs Marchands père et fils, et Converset, rue des Poulies[34], Boudet, rue saint Antoine, Reffiet, rue des vieux Augustins[35], la Rue, prés saint Mederic.
[34] « Rue Bétizy, Gillet, place du Palais-Royal. » Edit. 1691, p. 48. — A la chambre du Roi, les deux Marchand : Jean Noël, le père, et Jean-Baptiste, le fils, jouoient non la basse, mais le dessus de violon.
[35] Urbain Reffiet. Il étoit un des vingt-cinq violons ordinaires, dont Dumanoir étoit le roi.
Maîtres pour le dessus de Violon.
Messieurs Favre, rue saint Honoré, le Peintre, à Versailles[36], Thoüin, rue de la Verrerie[37], Verdier, rue du Chantre, Baptiste, Cloitre saint Honoré, du Bois, rue des fossez saint Germain, de l’Isle, rue saint Honoré, Charpentier, rue de la Harpe, du Chesne, rue Aubry Boucher, Jobert, rue saint Antoine, Marchand, rue de Berry, etc.
[36] Augustin-Jean Le Peintre. Il étoit aussi des vingt-cinq violons, et, de plus, un des violons du Cabinet, où il jouoit les dessus, avec 600 liv. de gages. Il étoit en outre attaché, comme violon, à la maison du Dauphin, ce qui lui valoit 600 liv. sur la cassette du prince, 400 sur le trésor royal, « et quelques autres gratifications », dit l’Etat de France. On comprend qu’avec le cumul de ces gages et ce que pouvoient lui rapporter ses leçons, il ait pu faire dire à Richelet, au mot violon de son dictionnaire : « Le Peintre, l’un des meilleurs joueurs de violon de Paris, gagne plus que Corneille, l’un des plus excellents de nos plus fameux poëtes françois. »
[37] L’édition précédente l’appelle à tort Thonin.
Maîtres pour la Guitarre.
Messieurs de Vizé, à Luxembourg[38], Cheron, rue Dauphine[39], Medard, prés saint Nicolas des Champs, le Tellier, rue du Foin, Galet, cul-de-sac saint Sulpice, du Gesne, rue des Prouvaires, Poussilot[40], prés les Jacobins saint Jacques, etc.
[38] C’est-à-dire au palais du Luxembourg. Vizé fut très-célèbre en son temps. Palaparat, dans la préface du Grondeur, parlant d’un joueur de flûte fameux, dit qu’il tire de la flûte allemande « des sons plus doux… »
[39] Nous le trouverons plus loin parmi les faiseurs d’instruments.
[40] Lisez Poussillac, comme plus haut.
Le Sieur Alexandre Roboam fait des Guitarres par excellence[41].
[41] Il demeurait rue des Arcis.
Maîtres pour le Luth.
Messieurs Mouton, rue saint Antoine, et du Buc, ruë[42].
[42] L’édition de 1691, p. 61, nomme, avec lui, « Gallot et Jacqueson. » Mouton étoit, de beaucoup, le plus célèbre. On a de lui, d’après de Troyes, un très-beau portrait gravé par Edelinck. Mariette en parle ainsi dans une note de l’Abecedario, t. II, p. 219, que nous reproduisons avec toute sa singularité : « Jean Mouton, célèbre joueur, jouant de la guitare — est-ce un luth ? est-ce une guitare ? C’est un luth — à demy corps, d’après Fr. De Troyes ; d’après un des plus beaux tableaux qu’ait peints M. de Troyes. Il a été peint en 1690, Mouton étant, pour lors, âgé de 64 ans. J’ai vu, ajoute Mariette, ce tableau en 1755, et j’ose dire que le plus beau tableau de Van Dyck ne me paroît pas supérieur. » Edelinck grava ce beau portrait pour remercier Mouton d’avoir enseigné le luth à sa fille sans vouloir être payé. (Mém. inéd. sur la vie et les ouvrages des membres de l’Acad. de peinture, t. II, p. 55.)
Maîtres pour le Jeu et pour la Fabrique des Instruments à Vent, Flûtes, Flageolets, Hautbois, Bassons, Musettes, etc.
Messieurs Colin Hotteterre[43], ruë d’Orléans ; Jean Hotteterre, rue des fossez S. Germain ; Fillebert, rue S. Antoine[44] ; des Costeaux, Fauxbourg saint Antoine[45] ; Filidot en Cour[46] ; du Mont, rue de Tournon ; Rousselet, rue des Assis ; Dupuis, carrefour de l’Ecole[47] ; le Breton et Fremont, rue de l’Arbre sec ; Héron, prés le cadran saint Honoré ; du Buc, rue de Richelieu ; Roset, rue neuve saint Eustache[48], etc.
[43] Colin étoit un diminutif de Nicolas, son vrai prénom. Il étoit basson à la Chapelle-Musique. Lui, et son fils Jean, qui le suit ici, et un autre, dont nous ne savons pas le prénom, excelloient surtout comme facteurs : « le père, lisons-nous dans un Traité de la Musette, etc. (Lyon, 1682, pet. in-fol., p. 38), est un homme unique pour la construction de toutes sortes d’instruments de bois, d’ivoire, d’ébeine, comme sont les musettes, flageolets, hautbois ; et mesme pour faire des accords parfaits de tous ces instruments. Ses fils ne luy cèdent en rien pour la pratique de cet art. »
[44] Philibert Rebillé. Très-renommé comme flûtiste et acteur de société. Palaprat dit de lui dans une note de son théâtre (t. I, p. 183) : « fameux joueur de flûte allemande, qui a mérité d’être chanté sur la lyre de M. De La Mothe, Ode de la Flûte. » La flûte allemande étoit ce qu’on appelle aujourd’hui « flûte traversière. » L’autre étoit la clarinette. Philibert eut de très-grands succès à la Cour, comme on le voit par les Poésies de Lainez, son ami, et de très-vifs aussi, trop vifs même dans la bourgeoisie. Une certaine Mme Brunet, qui s’étoit affolée de lui, empoisonna son mari, et l’épousa en secondes noces. Les révélations de La Voisin, qui lui avoit fourni le poison, la firent prendre, condamner et exécuter. Philibert, dont le roi ne mit pas en doute l’innocence, fut sauvé. Il y a, dans les Caractères, une allusion à cette affaire. Philibert y est nommé Dracon. (Comédie de Jean de La Bruyère, t. I, p. 212-214.)
[45] Il étoit joueur de flûte, comme Philibert, dont il fut l’ami dévoué. Il avoit beaucoup connu Molière, et en parloit très-curieusement. Sa passion pour les fleurs fut célèbre. C’est pour la mieux satisfaire qu’il s’étoit logé au faubourg Saint-Antoine, où, comme nous le verrons, se trouvoient les grands « floristes. » C’est lui, suivant Math. Marais, qui aurait posé pour le curieux de fleurs des Caractères.
[46] André-Danican Philidor, et non Filidot. Il jouoit de la basse à la Chapelle-Musique et dans la chambre du Roi. Veuf de Marguerite Monginot, il eut, de son second mariage avec Elisabeth Le Roy, un fils qui devint célèbre comme compositeur, mais surtout comme joueur d’échecs.
[47] Nous le retrouverons, avec les quatre autres qui suivent, parmi les fabricants d’instruments.
[48] « Le sieur Rozet est renommé pour les instruments de musique de la garde-robe du Roy. Il demeure rue Neuve-Saint-Eustache. » Edit. 1691, p. 49.
Plusieurs d’entre les Maîtres de tous les Instrumens ci-dessus, travaillent par excellence à la composition de la Musique, outre lesquels entre les habiles Compositeurs de Paris, on compte d’ailleurs Messieurs Oudot à la place Royale ; Mignon[49], cloître Notre Dame[50] ; l’Alloüette, prés saint Germain de l’Auxerrois[51] ; Charpentier, rue Dauphine[52] ; Bertet, Isle Notre Dame ; Chaperon, cour du Palais ; Martin, rue des saints Pères ; Terrier, prés les Innocens, etc.[53].
[49] Il étoit maître de la musique de Notre-Dame, et, comme on le voit ici, logeoit auprès. Il étoit aussi, à son temps perdu, grand amateur de bouts rimés. C’est lui qui, en 1682, avoit proposé un prix à quiconque rempliroit le mieux à la louange du roi les rimes de pan, guenuche, etc., qui pendant une saison entière occupèrent toutes les sociétés. (Menagiana, t. I, p. 35.)
[50] « Colasse, rue Sainte-Anne, Lorenzani… » Edit. 1691, p. 62. — Ce dernier est nommé dans les Caractères, au § 29 du chapitre de la Mode : « on sait que Lorenzani fait de beaux motets. » Il en publia quelques-uns, en 1693, chez Ballard. Lulli s’étoit opposé de tous ses efforts à sa célébrité. Sénecé, qui l’appelle Lorenzain, parle ainsi de cette jalousie du Florentin dans le libelle qu’il fit contre lui, Lettre de Clément Marot, etc. : « Je t’atteste encore, célèbre Lorenzain, à qui un mérite connu de toute l’Europe n’a servi qu’à blesser les yeux du jaloux Lulli… »
[51] Jean-François Lalouette, qui passe pour avoir travaillé aux opéras de Lulli, son maître, mais qui fut surtout célèbre pour ses motets. Il étoit maître de musique de l’église Saint-Germain-l’Auxerrois, près de laquelle nous le voyons logé ici.
[52] Marc-Antoine Charpentier, que son logement place Dauphine mettoit à proximité de la Sainte-Chapelle, où il étoit maître de musique. Il enseigna la composition au Régent, et fit avec lui l’opéra de Philomèle, qui ne fut ni joué, ni imprimé.
[53] A la suite de ces « habiles compositeurs de musique », on lit dans l’édit. précédente, p. 62 : « le sieur Jolly, rue des Rosiers, près la vieille rue du Temple, l’enseigne avec une grande facilité. »
Maîtres pour l’Art de Chanter[54].
[54] Ils étoient, depuis quelques années, en grande faveur. « — Fais-toi plutôt maître à chanter, dit Colombine. On te donnera deux louis d’or par mois, et tu trouveras peut-être quelque écolière à qui tu ne déplairas pas : car voilà la grippe des femmes d’aujourd’hui… On est de tous les bons repas ; jamais de promenade sans le maître à chanter. » (Regnard, La descente de Mezzetin aux Enfers, acte I, scène 1re.)
Massieurs Dambruy, rue Betizy, du Buisson, rue Dauphine, du Bousset, rue des Fontaines, Hallé, rue des Marais saint Germain, du Parc, rue de la Savaterie : Saint Germain, près la Madelaine, Chevalier, rue ; la Pommeraye, prés saint Leu de saint Gilles : de Lair, rue saint Honoré : Gillier, rue de Berry[55] : Bonnamy, rue Tictonne, etc.
[55] C’est le père de Gillier qui fit tous les divertissements de musique à la Comédie et aux Italiens pour les pièces de Dancourt, Regnard, etc.
Messieurs Hallin frères sont renommez pour le Jeu de la Trompette et des Timbales qu’on trouve de la meilleure Fabrique chez le Sieur Crestien, rue de la Ferronnerie, à la Ville de Vernon.
Les Cordes de Rome pour les Instrumens, se vendent en gros rue saint Denis aux trois Maillets, et en détail chez tous les faiseurs d’Instrumens, entre lesquels le Sieur Offlard[56], rue de Bussy, et les Sieurs Cheron[57], rue Dauphine et rue de la vieille Bouclerie en ont un grand assortiment.
[56] Il faut, je crois, lire « Offland. » Nous trouvons, en effet, un Jean Offland parmi « les maistres faiseurs d’instruments de musique », dans un compte du commencement du siècle. (Bulletin archéolog., t. II, p. 542.)
[57] « Luttier. » Edit. precéd., p. 112. Ces deux Chéron étoient sans doute frères. L’édit. précédente n’indique que celui de la rue Dauphine, qui figure déjà plus haut parmi les maîtres de guitare. Un Nicolas Chéron, comme nous le voyons par un acte de baptême, étoit déjà « faiseur d’instruments de musique », en 1658. Peut-être étoit-ce le père de celui-ci.
Il y a une fabrique pour l’Orgue et pour le Manicordium[58], rue saint Julien des Ménetriers[59].
[58] Sorte de petite épinette à sons amortis par du drap étendu sur les cordes. On l’appeloit aussi épinette sourde.
[59] « Les musettes et les autres instruments à vent, se vendent chez les sieurs Dupuis, carrefour de l’Ecole, Le Breton et Froment, rue de l’Arbre-Sec, Héron, près le cadran Saint-Honoré, et Du Buc, rue de Richelieu. » Edit. 1691, p. 49. — La musette étoit alors à la mode. Nous avons vu, dans une note précédente, comment Van-Dyck peignit le libraire Langlois jouant de cet instrument. La vielle le remplaça. Sous Louis XV, tout le monde en jouoit. V. aux Mss. de la Biblioth. Nat. les Stromates de Jamet, t. II, p. 2050.