Le livre commode des adresses de Paris pour 1692, tome 1/2
SUCCEZ DES REMEDES
INDIQUEZ L’ANNÉE PRÉCÉDENTE.
L’Auteur étant persuadé qu’entre tous les besoins ausquels il s’est proposé de pourvoir, il n’y en a point de plus pressans que ceux qui concernent le rétablissement de la santé, il a jugé qu’on trouveroit ici, avec plaisir, une relation qu’il tient de son libraire par qui elle est certifiée véritable, puis qu’elle contient un grand nombre de cures merveilleuses opérées dans le courant de l’année précédente, par l’usage des remèdes spécifiques qui avoient été par lui annoncez.
Plus de trente personnes de l’un et de l’autre sexe accablées par des Rhumatismes habituels et inveterez, par la Sciatique, par les Gouttes des pieds et des mains, et par des douleurs causées par les panacés et autres poudres mercurielles, ont été parfaitement guéries en peu de jours, par l’usage des Etuves vaporeuses et de la liqueur anodine marquée à la page 51.
Autant en est-il arrivé à un paralitique qui avoit d’ailleurs au bras droit des nodus d’une prodigieuse grosseur, les membres paralitiques ayant été parfaitement rétablis, et les nodositez entièrement dissipées dans l’espace de cinq semaines.
Ces remèdes ont encore opéré dans un jeune homme à peu près dans le même espace de temps, la guérison de la Goutte des pieds et la dissipation de plusieurs Loupes et Tumeurs froides qu’il avoit aux deux genoux.
Un homme d’une particulière considération, en qui il s’étoit fait un effroyable dépôt d’humeurs sur les jambes, après avoir fini par le quinquina des vapeurs dont il étoit tourmenté, a été parfaitement guéri en six semaines par la liqueur vulnéraire, quoi qu’extraordinairement replet, non seulement de cette fluxion, mais encore de plusieurs grands ulcères qu’elle causa subitement avec mortification de la peau et des chairs, accompagnez d’une fièvre terrible et d’un vomissement continuel que le quinquina avoit causé.
L’un des domestiques de ce malade fût guéri dans le même temps d’une Hidropisie formée en deux prises d’un Sirop spécifique.
Plus de cinquante personnes ont été gueries de Décentes de Boyaux, les unes en un mois ou cinq semaines en faisant retraite à la pension de Pincourt, les autrefois mois ou environ, en vacquant à leurs affaires ; par les Bandages[80] et par les emplatres de la Manufacture royale.
[80] C’étoit une invention très-ancienne, ainsi que nous l’avons prouvé dans le Vieux-neuf, 2e édition, t. I, p. 133-134, note. En 1647, un charlatan avoit inventé un bandage dont il promettoit merveille. Les Annales du Bibliophile, t. I, p. 38, ont publié l’affiche qui en énuméroit les miracles.
Vingt deux malades accablez d’une longue suite de cours de ventre, de flux de sang et de dissenteries, ont été guéris sans retour et sans ressentir la moindre incommodité, avec une ou au plus deux prises d’un vin composé qui nourrit comme le vin ordinaire.
On a pareillement guéri un grand nombre de fébricitans par l’usage de la Liqueur fébrifuge.
On a d’ailleurs guéri par la Liqueur balsamique, en deux femmes différentes, un ulcère formé dans la matrice ; et par cette même liqueur aidée par les grains balsamiques, un grand nombre de personnes de Gonorrhées habituelles et de Pertes blanches.
Onze personnes ont été parfaitement guéries de la grosse maladie, sans régime et sans retraite par le seul usage du mercure d’or[81].
[81] Nous n’avons pas besoin d’expliquer ce que Blégny entend par « la grosse maladie ». En la guérissant par le mercure, il étoit arriéré. Locke, lorsqu’il vint à paris, vit, affichée sur les murs, l’annonce d’un « remède sans mercure », pour lequel le roi avoit accordé un brevet, dont le duc de Bouillon avoit le bénéfice, et qui datoit du 7 septembre 1667. Voy. dans la Vie de Locke par lord King, un extrait de ses Voyages à la date du 13 février 1679.
Rien n’est plus commun que de voir des gens guéris sur le champ et pour jamais de la douleur de la carie des Dents, par l’application de l’Essence végétale.
Une religieuse qui ne vivoit depuis quatorze mois que de trois cuillerées de bouillon par jour, chacune desquelles luy coutoit un martire par les sanglots et mouvements convulsifs qu’elle luy causoit pendant près d’une heure, et les douleurs d’estomach qu’elle ressentoit ensuite, fut soulagée très considérablement dès la première prise de l’opiate digestive, et se trouva après la deuxième en état de faire deux grands repas par jour sans aucune incommodité.
Deux poulmoniques ont été parfaitement guéris par l’usage de la Conserve pulmonaire.
Une fistule lacrimale accompagnée d’un flux de larmes involontaires, a été guérie en peu de jours sans opération par une simple pomade.
Quand l’Auteur connoitroit les personnes sur qui ces Cures ont été faites, il ne pourroit les nommer sans imprudence, mais les incrédules pourront s’assurer de la verité, par le témoignage de diverses autres personnes qui ont eu occasion de voir opérer le Medecin par qui elles ont été entreprises, et dont le Libraire qui débite cet Ouvrage, offre de donner les noms et les adresses selon l’exigence des cas.