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Mélusine: Nouvelle édition, conforme à celle de 1478, revue et corrigée

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Comment l’evesque beneist le lict où Raimondin et Melusine estoient couchiés.

A ces parolles admenèrent Raimondin au pavillon, et fut assez tost couché ; et lors vint l’evesque qui les avoit espousé, lequel beneist le lict, et aprez chascun prist congié, et furent les courtines tirées. Et à tant se taist l’istoire sans plus avant parler de la matère, et commence à parler des aultres qui s’en allèrent les ungz coucher, et les autres dansser et esbattre tant qu’il leur pleut. Et aprez vous parlera l’istoire de Raimondin et de la dame comment ilz se gouvernèrent, et les parolles qu’ilz se disoient au lict quant ilz furent couchiés ensamble.

En ceste partie nous dist l’istoire que quant tout fut departi et les pans du pavillon furent joinctz, que Melusine parla à Raimondin en ceste manière : Mon treschier seigneur et amy, je vous mercie du grant honneur qui m’a aujourduy esté faict de vostre lignée et amis, et aussi de ce que vous celez si bien ce que vous m’avez promis en nostre première convenance. Et sachiés pour certain se vous le tenez tousjours aussi bien que vous serez le plus puissant et le plus honnouré qui oncques fut en vostre lignée ; et se vous faictes le contraire, vous et vos heritiers decherrez peu à peu de vostre estat et de la terre que vous tiendrez, quant vous ferez la faulte, s’il est ainsi que vous la facés, ce que Dieu ne vueille jà consentir, ne ne sera jamais tenue par nul de vos heritiers ensamble. Et adoncques luy va respondre Raimondin : Ma treschière dame, ne vous en doubtez mie, car ce ne m’aviendra jà, se Dieu plaist. Et lors la dame lui respond en ceste manière : Mon treschier amy, puys que ainsi est que je me suys mise si avant, il me convient attendre la voulenté de Dieu, et moy confier en vostre promesse. Or, vous gardez bien, mon treschier amy et compaignon, que vous ne me faillez de ce convenant, car vous serez celluy qui plus y perdrez aprez moy. Ha, ha, chière dame, dist Raimondin, de ce ne vous faut jà doubter, car à ce jour me faille Dieu quant je vous fauldray de mon povoir de convenant. Or, mon chier amy, dist la dame, laissons ester le parler, car pour certain de ma part n’y aura point de faulte que vous ne soiez le plus fortuné que oncques fut en vostre lignage, et en serez de tous le plus puissant, se il ne tient à vous. Et adonc en ce parti laissèrent aler de ceste matère, et pour ce nous dist l’istoire que en ceste nuyt fut engendré d’entre eulx deulx le preux vaillant Urian, qui depuys fut roy de Chippres, comme vous ouyrez bien cy aprez au long.

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