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Mélusine: Nouvelle édition, conforme à celle de 1478, revue et corrigée

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Comment le conte de Poetiers demanda au conte de Forestz d’avoir Raimondin, lequel luy accorda.

Et au departir de la feste le conte de Poetiers demanda au conte de Forestz qu’il lui laissast Raimondin son nepveu, et qu’il ne luy chaussist jamais de luy, car il le pourvoiroit bien. Et le conte luy ottroia ; et demoura ledit Raimondin avec le conte de Poetiers son oncle, qui bien l’ama ; et aussi s’en partist la feste moult honnourablement et amoureusement. Et cy s’en taist l’istoire de parler du conte de Forestz qui s’en alla luy et ses deux enfans et toute sa compaignie qu’il avoit amené avec luy, et commence nostre histoire à proceder avant et à parler du conte Aimery et de Raimondin.

L’istoire nous certiffie, et aussi les aultres vrayes croniques, que celluy conte Aimery fut grant père sainct Guillanen qui fust conte et delaissa possessions mondaines pour servir nostre createur, et se mist en l’ordre et religion des Blancs-Manteaulx ; et de ce ne vous veulz-je faire grand location, mais veulz procéder avant en nostre histoire et parler du conte Aimery et de nostre vraie histoire et matère. Et l’istoire nous dit que celluy conte fut merveilleusement vaillant chevalier, et qu’il aima toujours noblesse, et fut le plus saige en astronomie qui fust en son temps né depuys Aristote. En celluy temps que le conte Aimery regna, l’istoire nous monstre que de moult de sciences estoit plain, et specialement de la science d’astronomie, comme j’ay dessus dit ; et sachiez que il aimoit tant Raimondin que plus ne povoit, et aussi faisoit l’enfant luy, et s’efforçoit moult de servir le conte son oncle, et de luy faire plaisir en toutes manières. Or est bien vray que le conte avoit moult de chiens, oyseaux, braches, levriers, chiens courans et limiers braconniers, oyseaulx de proye et chiens de grosse chasse de toute manières. Advint, si comme l’istoire dit, que l’ung des forestiers vint denoncier que en la forest de Colombiers avoit le plus merveilleux porc que on eust de longtemps veu, et que ce doibt estre le plus beau deduit que on eut pieça veu. Par ma foy, dist le conte, il me plaist bien ; faictes que les veneurs et les chiens soient prestz demain, et nous irons à la chasse. Monseigneur, dist le forestier, à vostre plaisir ; et tout ainsi s’en partist du conte, et apresta tout ce qu’il apartenoit à la chasse et pour chasser à l’eure qu’il avoit ordonnée.

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