L'esprit dans l'histoire: Recherches et curiosités sur les mots historiques
Voltaire, dans sa lettre à Collini sur l'affaire de l'incendie du Palatinat, rappelée tout à l'heure, a dit avec beaucoup de sens: «Les historiens ne se font pas scrupule de faire parler leurs héros. Je n'approuve pas dans Tite-Live ce que j'aime dans Homère.»
C'est très bien pensé, très bien dit. Pourquoi donc alors Voltaire s'empresse-t-il de prêter lui-même à Louis XIV des mots que, s'il fût allé aux informations, il aurait bien su n'avoir pas été dits par ce roi? Pourquoi, par exemple, écrit-il avec un si bel aplomb, au chapitre XXVIII du Siècle de Louis XIV:
«Lorsque le duc d'Anjou partit pour aller régner en Espagne, il (le roi) lui dit, pour marquer l'union qui allait désormais joindre les deux nations: «Il n'y a plus de Pyrénées.»
Voltaire alors avait pourtant déjà dû lire le Journal de Dangeau, dont, sans qu'il l'ait avoué, le manuscrit lui fut si utile pour son Histoire[476]; il devait par conséquent savoir déjà la vérité sur cette parole, qui ne fut pas dite ainsi tout à fait, et qui surtout ne le fut point par Louis XIV. Puisque en ne prenant pas le mot tel que l'auteur de l'exact Journal l'a donné, il ne s'est pas soucié d'être vrai, nous allons, nous, l'être à sa place, et sans beaucoup de peine. Il nous suffira de nous parer de ce qu'il n'a pas voulu ramasser.
[476] Comment Voltaire, en effet, ne l'eût-il pas connu, puisque le président Hénault, qui lui fournit tant de notes pour l'Essai sur les mœurs et pour le Siècle de Louis XIV, fut, avec M. de Luynes, qui en avait hérité, l'un des continuateurs du Journal de Dangeau. V. les Mémoires du président Hénault, E. Dentu, 1855, in-8º, p. 193.
Après nous avoir appris, sous la date du 16 novembre 1700, que le nouveau roi d'Espagne permit aux jeunes courtisans de le suivre dans ses États, Dangeau, qui écoute tout, qui n'oublie rien, qui n'attribue à chacun, même, notez ce point, même au roi, que juste ce qui lui revient d'esprit, Dangeau ajoute[477]: «L'ambassadeur d'Espagne dit fort à propos que ce voyage devenoit aisé, et que présentement les Pyrénées étoient fondues;» mot bien espagnol, n'est-ce pas? et qui porte avec soi toute sa couleur, sa pleine vraisemblance. Puisqu'il fut dit ainsi par l'ambassadeur, le roi n'avait plus à dire le sien, l'eût-il eu sur les lèvres: c'était le même, sauf la forme.
[477] Journal du marquis de Dangeau, publié en entier pour la première fois par MM. Soulié et Dussieux, t. VII, p. 419. Malherbe, comme l'a fort bien remarqué M. Lud. Lalanne dans sa belle édition, t. I, p. 415, avait d'avance paraphrasé le mot, quand il avait dit, à propos du mariage de Louis XIII et d'Anne d'Autriche:
Madame de Genlis comprit cela la première et, bien mieux, l'écrivit, mais en pure perte; elle n'avait pas autorité. «Ce qu'il raconte est vrai, assurait-on à madame Geoffrin, à propos de certain récit fait par un menteur.—Eh bien! pourquoi le dit-il?» s'écriait-elle, doutant toujours. Madame de Genlis en était là. Ce qu'elle disait, au lieu de faire la fortune d'une vérité, la gâtait presque. On ne fit pas la moindre attention à la note excellente que, dans son édition des fragments du Journal de Dangeau, elle consacra à la parole prononcée par l'ambassadeur. «Il est vraisemblable, dit-elle, que ce joli mot a fait supposer celui qu'on attribue à Louis XIV: Il n'y a plus de Pyrénées. Ce dernier mot ne serait qu'une espèce de répétition de celui de l'ambassadeur, et sûrement Louis XIV ne l'a pas dit[478].»
[478] Abrégé des Mémoires ou Journal du marquis de Dangeau, 1817, in-8º, t. II, p. 208.
Voltaire se trompa donc où ne s'était pas trompée madame de Genlis; c'est du malheur, et, qui pis est, il y eut ici, de sa part, un cas d'erreur en récidive. On sait qu'il publia en 1770, avec des notes intéressantes, des extraits de Dangeau, sous ce titre: le Journal de la cour de Louis XIV. Dans le nombre, du reste assez restreint, il n'oublia pas le passage qui nous occupe. C'était pour lui le moment ou jamais de voir qu'il n'avait pas tout à fait dit vrai jadis. Il ne daigna pas y prendre garde malheureusement. Bien loin même de se laisser convaincre par la phrase qu'il transcrivait, il mit en note: «Louis XIV avait dit: Il n'y a plus de Pyrénées... Cela est plus beau[479].»
[479] C'était le même mot, encore une fois, et la preuve, c'est que le Mercure, rapportant la parole de l'ambassadeur, la donne telle que Voltaire l'attribue au roi: «L'ambassadeur se jeta à ses pieds et lui baisa la main, les yeux remplis de larmes de joie, et s'étant relevé, il fit avancer son fils et les Espagnols de sa suite, qui en firent autant. Il s'écria alors: «Quelle joie! il n'y a plus de Pyrénées; elles sont abymées et nous ne sommes plus qu'un.» (Mercure galant, novembre 1700, p. 237.)
Il y tenait: c'était son mot, ou plutôt, peut-être, ne voulait-il pas, après avoir fait dans ses précédentes notes un grand étalage de mépris pour l'auteur du Journal, se donner la honte de recevoir un tel démenti de ce «pied-plat,» de ce «laquais»; il n'appelle pas Dangeau autrement.
Ce n'est pourtant pas encore en ceci que la petite méchanceté de madame du Deffand aurait raison contre Voltaire: «Il n'a rien inventé, lui disait-on.—Rien! répliquait-elle, et que voulez-vous de plus? il a inventé l'histoire[480].» Ici, il l'a tout bonnement arrangée; il faut bien lui en tenir compte.
[480] Une fois, l'abbé Velly—c'était encore jouer de malheur—le prit en flagrant délit d'invention. L'abbé avait lu, au chap. LVII de l'Essai sur les mœurs, qu'en 1204, les Français, maîtres de Constantinople, «dansèrent avec des femmes dans le sanctuaire de l'église de Sainte-Sophie», etc. Il écrivit à Voltaire pour lui demander naïvement où il avait trouvé ce fait. Voltaire, non moins ingénument, lui répondit: «Nulle part; c'est une espièglerie de mon imagination.» (Coupé, Soirées littéraires, t. IV, p.240.) Il ne faudrait pourtant pas croire que Voltaire s'amusât continuellement de ces sortes d'espiègleries historiques, et, partant de là, lui faire un crime de son fameux mot: Mentez, mes amis, mentez, où l'histoire n'a rien à faire, quoi qu'on en ait dit. Il s'agissait de la comédie de l'Enfant prodigue, Voltaire ne s'en voulait pas avouer l'auteur.—«Mais si l'on vous devine? disaient ses amis.—Criez: L'on se trompe, ce n'est pas de Voltaire, mentez, mes amis, mentez!» Vous voyez, comme l'a fort bien remarqué M. Despois (Estafette, 21 juillet 1856), que l'histoire n'est ici pour rien, et qu'on est injuste quand on fait, pour ce mot-là, comparaître Voltaire pardevant elle.
Le Siècle de Louis XIV est de tous ses livres celui où il a fait le plus de ces arrangements et le plus abusé des accommodements qu'on peut se permettre avec la vérité. Il l'écrivit de souvenir, d'après ce qu'il savait d'enfance, plutôt que sur bonnes preuves. Lemontey l'accuse quelque part[481] d'y suivre «les vagues réminiscences de sa jeunesse». Je crus d'abord l'accusation sévère, mais Voltaire lui-même vint me confirmer qu'elle est de toute justice. Dans sa lettre au président Hénault, du 8 janvier 1752, il convient qu'il a écrit de mémoire une partie du tome II de cet ouvrage. Or le mot dont nous venons de parler est dans ce tome II. Quelques mois après, le 29 avril, il écrivait encore à La Condamine au sujet de ce même livre, où il se souvient trop de ce qu'il n'a jamais bien su: «Et ignorantias meas ne memineris.» Le mot sur les Pyrénées était une de ces ignorances-là. Pourquoi ne s'en est-il pas repenti comme de bien d'autres qu'il corrigea[482]?
[481] Hist. de la Régence, t. I, p. 224, note.
[482] Pour son Histoire de Russie sous Pierre le Grand, ayant reçu de Lomonosoff plusieurs observations importantes, il corrigea son texte en beaucoup d'endroits, à l'édition suivante. On peut lire les remarques de Lomonosoff dans le Bulletin du Nord, publié à Moscou, juillet 1828, p. 326-330. Pour son Charles XII, il fit de même, comme on peut le voir par l'excellente édition classique, avec variantes, qu'en a donnée M. Geffroy, chez Dezobry. Le 16 juin 1746, il écrivait dans un billet à M. Dusson d'Alin, notre ministre en Russie: «J'ai écrit, il y a quelques années, une histoire de Charles XII sur des mémoires fort bons quant au fond, mais dans lesquels il y avait quelques erreurs sur les détails des actions de ce monarque. J'ai à présent des mémoires plus exacts.» Ses corrections furent faites d'après ces mémoires nouveaux. Le billet que nous venons de citer n'est dans aucune édition de la Correspondance. Il n'a été cité que par Lemontey, Histoire de la Régence, t. II, p. 393.—Un des passages qu'il eût dû modifier, et où il ne changea rien, est l'épisode de Mazeppa. On a su par les Mémoires du chevalier Pasck, ami du cosaque trop fameux, que sa cavalcade forcée ne fut que de quelque cent pas, à travers des haies d'épines, depuis la maison du mari qu'il avait outragé jusqu'à la sienne. V. un fragm. des Mémoires de Pasck, communiqué par Mickiewicz, dans le Magasin pittoresque, t. V, p. 370.
Ailleurs, il a fait mieux, j'en conviens.
Sans doute, ainsi que J.-J. Rousseau aimait à le répéter, il a pu dire à ses amis qui lui reprochaient les mensonges dont il a farci ses histoires: «Moi, je n'écris pas pour être vrai, mais pour être lu[483].» En revanche, il n'a jamais du moins passionné l'histoire en calomnies, comme il accusa si justement La Beaumelle de l'avoir fait[484], et comme il en eût accusé bien mieux encore Saint-Simon, «le plus avide glaneur de contes apocryphes[485]», s'il eût pu connaître ses Mémoires. Être plus occupé de ce qui peut être «glorieux et utile... que de dire des vérités désagréables...[486]», telle fut sa doctrine en histoire. De cette façon sans doute, il lui fallut sous-entendre bien des sévérités, et nous donner l'idéal des choses bien plus que leur réalité; mais il ne tomba pas non plus, avec ce système, dans l'excès qui substitue les petits bruits et les commérages à la grande voix de l'histoire, et fait si vite de l'historien un calomniateur. Sa faute, du moins pour ces temps, fut l'indulgence. Or, comment ne pas pardonner ce qui n'est au fond que trop de tendance au pardon?
[483] Souvenirs de J.-J. Rousseau dans la Biblioth. univers. de Genève, janv. 1836, p. 89.
[484] V. à ce sujet, dans le Recueil des Lettres donné par M. de Cayrol, t. II, p. 117-118, ce qu'il écrivait le 7 septembre 1767, à M. de Chenevières, sur le mauvais effet produit en Europe par les livres de La Beaumelle, où se trouve ce que nous avons retrouvé depuis dans Saint-Simon: l'empoisonnement de Louvois par Louis XIV; l'entente secrète du duc de Bourgogne et du prince Eugène pour trahir la France, et «un tel coquin, dit-il, fait plus d'impression qu'on ne pense dans les pays étrangers. Il est cité par tous les compilateurs d'anecdotes, et la calomnie qui n'a pas été réfutée passe pour une vérité.»
[485] Ce sont les propres expressions de Lemontey, qui eut si souvent occasion de le prendre la main dans un mensonge ou dans une calomnie. (Hist. de la Régence, t. II, p. 398.)
[486] Lettre à M. de Noailles, du 28 juillet 1752.
Voltaire a souvent aussi évité les bourdes grossières dans lesquelles sont tombés ceux qui le suivirent et arrangèrent à leur tour ses récits arrangés.
Raconte-t-il la chaude journée de Fribourg, au chapitre III du Siècle de Louis XIV, il se garde bien d'écrire que M. le Prince, alors duc d'Enghien, jeta dans les retranchements son bâton de maréchal. Il savait trop bien que Condé, prince du sang, n'était pas, ne pouvait pas être, ne fut jamais maréchal de France. Il mit: «Le duc d'Enghien jeta son bâton de commandement, etc.» S'il eût dit: «jeta sa canne», il eût mieux fait encore, car il faut appeler les choses par leur nom, quel qu'il soit, et c'est en effet sa canne—il la portait partout, selon l'usage du temps—que Condé lança par-dessus les palissades ennemies. Voltaire en employant le vrai mot, aurait été dans la pleine vérité du fait, et il eût, en outre, sauvé d'une lourde erreur ceux qui vinrent après lui. Ils ne comprirent rien à ce bâton de commandement, et, pour simplifier la question, ils le métamorphosèrent en bâton de maréchal. Quant à en faire ce que c'était en effet, une canne très prosaïque, fi donc! ils n'y songèrent pas. Depuis lors, où n'a-t-on pas dit, où n'a-t-on pas imprimé, même officiellement, que le prince de Condé était maréchal de France?
Les fréquents anathèmes que Voltaire s'est permis contre les historiens qui font parler leurs héros, l'ont du moins souvent tenu en garde contre la même manie, et l'ont empêché de tomber dans un des ridicules d'invention les plus absurdes en histoire: le mensonge de la déclamation et de la harangue. Par exemple, il s'est bien abstenu de faire dire par le prince de Condé à ses soldats, avant la bataille de Lens, cette banalité héroïque tant répétée partout: «Souvenez-vous de Rocroy, de Fribourg et de Nordlingue[487].»
[487] Lisez Nordlingen; de même que, parlant du combat naval de la Hogue, dites toujours la Hougue. V. le Magasin pittor., t. IX, p. 131.
Sa défiance pour ces harangues guerrières, pour ces discours préliminaires des batailles, semble même en cette occasion lui avoir trop fait dédaigner les véritables paroles qui furent dites par le prince; il ne les cite pas, bien qu'elles le méritassent plus qu'aucunes, comme vous allez en juger. C'est madame de Motteville[488] qui les rapporte:
[488] Mémoires, collection Petitot, 2e série, t. XXXVIII.
«Le prince de Condé, à son ordinaire, se trouva partout, dit-elle, et le comte de Châtillon conta à la reine que, pour toute harangue, il avoit dit à ses soldats: «Mes amis, ayez bon courage; il faut nécessairement combattre aujourd'hui: il sera inutile de reculer; car je vous promets que, vaillants et poltrons, tous combattront, les uns de bonne volonté, les autres par force.»
Voilà qui est parlé, cela, et non pas déclamé: c'est net et franc, et tout à fait selon le précepte de notre ancienne discipline militaire. Il semble qu'on voit brandir dans ces dernières paroles la canne jetée à Fribourg et retrouvée derrière les retranchements.
De Condé à Turenne il n'y a que la main, et de Turenne à Villars la distance n'est pas longue. J'ai, à leur sujet, à m'expliquer sur deux mots, l'un qui est vrai, l'autre qui ne l'est pas.
J'avais douté longtemps que M. de Saint-Hilaire, dont un bras fut emporté par le boulet qui tua Turenne, eût pu trouver assez de force pour dire à son fils, qui était tout en larmes à la vue de l'horrible blessure de son père: «Ah! mon fils, ce n'est pas moi qu'il faut pleurer, c'est la mort de ce grand homme.» Le témoignage du fils lui-même, dans ses Mémoires, m'a prouvé que je doutais à tort[489].
[489] Mémoires de Saint-Hilaire, 1766, in-12, t. I, p. 205.—Le P. Griffet est d'avis que pour tout ce qui se rapporte aux circonstances de la mort de Turenne, assez inexactement racontée par les historiens, le récit de Saint-Hilaire est celui qu'on doit préférer. (Traité des différentes sortes de preuves, p. 126.)—Saint-Hilaire a fait lui-même indirectement la critique de ces relations où les circonstances de la mort de Turenne sont faussement présentées. «Tous ceux, dit-il, qui en ont écrit, n'ont pu le savoir comme moi.» (Mémoires, t. I, p. 204.)
En revanche, le mot de Villars, qui, près de mourir dans son lit, aurait envié Berwick, tué sur le champ de bataille, ne m'avait jamais semblé devoir être mis en doute[490]. C'était encore une erreur; M. Sainte-Beuve me l'a prouvé dans son article sur Villars, dans les Causeries du lundi[491]. Il mourut, dit-il, le 17 juin. Le prêtre qui l'exhortait au moment de la mort lui disait que Dieu, en lui laissant le temps de se reconnaître, lui faisait plus de grâce qu'au maréchal de Berwick, qui venait d'être tué devant Philisbourg d'un coup de canon. «Il a été tué! s'écrie Villars, j'avais toujours bien dit que cet homme-là était plus heureux que moi.» Berwick étant mort seulement le 12, et si loin de là, Villars n'aurait eu que juste le temps d'apprendre la nouvelle et de dire le mot.
[490] Il se trouve dans la Vie du maréchal de Villars, t. IV, p. 350.
[491] T. XIII, p. 107-108.
«Mais, ajoute M. Sainte-Beuve, indulgent pour la vraisemblance, le mot est si bien dans sa nature, que, s'il ne l'a pas dit, il a dû le dire[492].»
[492] On lui en prête un autre des plus cyniques, à propos des ministres à qui, «tant qu'ils sont en place, il faut tenir le bassin, qu'on leur verse sur la tête dès qu'ils sont tombés». (Corr. secrète, t. XI, p. 181). Son esprit ne gagnait guère à ce mot, sa mémoire aura du profit à le perdre. Il n'est pas plus de lui que du maréchal de Villeroy, à qui il fut aussi prêté (La Place, Pièces intér., t. III). On l'avait fait sous Louis XIII, quand Baradas était tombé; plus tard, Boursault l'avait mis en vers (Lettres nouvelles, 1703, in-12, t. I, p. 244-245).
Un autre doute élevé sur ce même fait, et bien plus grave, car il s'agit de la mort même de M. de Berwick, n'a pas été davantage éclairci. D'où partit le boulet qui lui emporta la tête? C'est ce qu'on se demanda sur le moment même, et ce qu'on se demande encore. «C'est, écrivit Marais à Bouhier le 25 juin, par conséquent treize jours après[493], c'est quelque chose de beau que le pyrrhonisme historique, Monsieur; nous ne savons pas si M. le maréchal de Berwick est mort de notre canon ou de celui des ennemis[494].»
[493] Corresp. inédite de Marais avec le président Bouhier, t. II, p. 255.
[494] J'ajouterai ici, pour en finir avec les grands généraux de Louis XIV, que le mot sur le maréchal de Luxembourg, se rendant au Te Deum, à Notre-Dame, après la victoire de Marsaille: «Laissez passer le tapissier de Notre-Dame», est du prince de Conti. V. Lettres de J.-B. Rousseau, 1re édit., t. III, p. 112.