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Histoire des légumes

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CHERVIS

(Sium Sisarum L.)

Nous aurions pu classer le Chervis, appelé aussi Girole, parmi les légumes oubliés. C’est une Ombellifère vivace, généralement considérée comme originaire de l’Asie orientale ; mais, d’après le botaniste Maximowicz, elle serait seulement spontanée dans la Sibérie altaïque et la Perse septentrionale. La plante produit des tiges cannelées, hautes d’un pied ou deux, rappelant celles du Panais. Les racines sont nombreuses, comestibles, disposées en faisceau comme celles du Dahlia, blanches en dedans, d’un goût sucré et agréable.

C’est du moins l’avis de tous les anciens auteurs qui représentent le Chervis comme un manger délicat et friand. Olivier de Serres, le Jardinier françois et bien d’autres en ont fait l’éloge. On faisait subir à ce légume toutes les préparations culinaires en usage pour la Scorsonère : en friture, au beurre, à la sauce ou à l’huile. Le Cuisinier françois (1651) de La Varenne dit que le Chervis se sert sur les meilleures tables.

CHERVIS (XVIe siècle) d’après l’Histoire des plantes de Dalechamps.

Il paraît très en faveur dès le XVIe siècle et il était encore un peu cultivé au milieu du XVIIIe. Pourquoi a-t-il disparu des jardins modernes ?

On a généralement identifié le Chervis avec le Sisaron de Dioscoride et avec le Siser des Romains dont Tibère était si friand. Nous savons que cet empereur imposait aux Germains des bords du Rhin un tribut de racines nommées Siser, cette plante ne pouvant acquérir ses qualités que sous les climats froids.

De Candolle a examiné ce problème botanique avec son érudition habituelle et sans le résoudre. Il doute toutefois que les Grecs et les Romains aient connu le Chervis. La plante de l’empereur était peut-être le Panais. Pline dit que le Siser possède une mèche centrale ligneuse qu’on enlève quand il est cuit, ce qui se rapporterait bien au Chervis, mais aussi au Panais à sa deuxième année. D’autres botanistes proposent, comme équivalents du Siser, la Carotte et la Betterave. Au XVIe siècle, le nom Siser était appliqué au Chervis, à la Carotte et même au Panais.

Dans tous les cas, le Chervis ne paraît pas avoir été connu dans le haut moyen âge. Il est probablement venu vers le XVe siècle par l’Allemagne et la Russie.

Jacques et Hérincq, auteurs souvent cités, quoique sujets à caution pour leurs indications historiques, font remonter l’introduction du Chervis en Europe au milieu du XVIe siècle. Or Rabelais, dans le livre IV de son Pantagruel, nous a transmis une longue nomenclature des mets que préféraient ses contemporains. Ce livre a bien paru, en 1552, mais Rabelais, citant l’escherviz parmi les plantes potagères les plus vulgaires, indique assez qu’il était répandu et connu depuis longtemps déjà.

Dans les temps modernes, on a essayé de réhabiliter cette plante intéressante qui n’est plus que très rarement cultivée. Les auteurs du XVIIe siècle n’ont pas signalé cette « corde » qui existe dans la racine du Chervis et est un inconvénient pour l’art culinaire. N’étant plus cultivée depuis longtemps, la plante a dû retourner à l’état sauvage. Il serait facile de l’améliorer à nouveau.

Le Chervis figure dans le calendrier républicain en brumaire an II (1794 vieux style) à la place d’un saint, ce qui indique qu’il n’était pas encore oublié à la fin du XVIIIe siècle.

Le mot Chervis a une origine obscure. Godefroy et Darmesteter voient dans Chervis, ou Chirouis, une autre forme de Carvi, plante Ombellifère. Faut-il y voir une déformation de Siser, par l’intermédiaire d’un diminutif : serullum, servillum et chervillum ?

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