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Histoire des légumes

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PERSIL

(Petroselinum sativum L.)

Dans la cuisine moderne, le Persil est la principale des fines herbes. La plante est excitante et stomachique comme toutes les herbes condimentaires. On en fait usage pour l’assaisonnement des viandes, pour aromatiser les potages. Quelquefois le Persil n’est plus qu’une garniture destinée simplement à orner certains plats et, plus haut, au chapitre Céleri, nous avons émis l’idée que l’emploi décoratif de l’Ache ou Céleri sauvage dans l’Antiquité a dû contribuer à cette coutume culinaire moderne.

Les auteurs anciens ont beaucoup parlé de l’Ache — Selinon des grecs, Apium des Latins, — tantôt plante funéraire que l’on plantait sur les tombeaux ; d’autrefois l’Ache entrait dans la confection des couronnes. Les Grecs couronnaient d’Ache verte les vainqueurs aux jeux olympiques. L’Ache faisait encore l’ornement des repas. On le voit par les vers de Virgile et d’Horace :

Neu desint epulis rosæ
Neu vivax apium, neu breve lilium[542].

[542] Horace, Odes 36, livre I.

« Que les Roses, l’Ache toujours verte et le Lis éphémère ne manquent jamais à vos festins. »

Sous le nom d’Ache, les Anciens ont compris le Céleri sauvage ou Ache des marais (Apium graveolens) et le Persil, autre espèce du genre Apium, qu’ils ont employé comme assaisonnement, mais beaucoup moins que nous. La plante servait surtout à couronner les vainqueurs aux jeux ou les convives dans les banquets, tandis que le Céleri sauvage ou Ache des marais a été seulement plante funéraire. C’était l’Ache véritable. Le Persil doit être l’Apium amarum et l’Apium viride de Virgile[543] et celui qu’Horace qualifiait de vivace.

[543] Eglogues VI, 68 ; — Géorgiques, IV, 121.

Théophraste (300 ans avant J.-C.) devait distinguer le Persil du Céleri, puisqu’il parle d’une variété d’Ache à feuilles frisées. Or il existe une variété de Persil dont le feuillage frisé est fort élégant. Toutefois la plante possédait déjà son nom spécial dans l’Antiquité. Dioscoride et Pline[544] ont parlé, l’un du petroselinon, l’autre du petroselinum, nom qui signifie selinon (Ache) des pierres, à cause d’une circonstance naturelle d’habitation. Le Persil sauvage se plaisant dans les endroits rocailleux. Ces auteurs ont considéré le Persil comme une plante officinale et quelquefois condimentaire. Galien, médecin grec, (164 après J.-C.), dit que le Persil est fort bon à la bouche et à l’estomac et que quelques-uns le mangent avec le Maceron et la Laitue. Apicius l’a aussi noté dans son traité culinaire sous le nom d’Apium viride (Ache verte).

[544] Hist. nat., l. XIX c. 37, 46 ; l. XX, c. 11.

Le Persil paraît cultivé chez les Romains. Columelle (Ier siècle de l’ère chrétienne) a connu une variété à feuilles larges et une à feuillage frisé. Palladius a observé, ce qui est vrai, que les vieilles graines de Persil germent mieux que les semences récentes.

A l’époque de Charlemagne, le Persil n’était plus que plante culinaire. Cet empereur le cultivait dans ses jardins. Albert le Grand, au XIIIe siècle, parle de l’Ache ou Petroselinum comme d’une plante très usuelle. Le Grant Herbier, encyclopédie du XVe siècle, en fait l’éloge : « l’herbe aussi mise cuyte avec les viandes conforte la digestion et oste les ventosités du ventre. »

L’Anglais Phillips dit que les jardiniers anglais ont reçu le Persil en 1548. Peut-on, raisonnablement, fixer une date d’introduction pour une plante aussi anciennement connue sur le continent ? Et pourtant, pour le Persil et d’autres plantes, de Candolle, Jacques et Hérincq, etc. ont cité les dates fantaisistes de Phillips comme articles de foi.

Le Persil passe pour être originaire de l’île de Sardaigne. Il est certain que cette Ombellifère est sauvage dans tout le Midi de l’Europe, depuis l’Espagne jusqu’en Macédoine. On l’a trouvée aussi à Tlemcen, en Algérie, et dans le Liban[545].

[545] De Candolle, Origine des plantes cultivées, 4e éd. p. 72.

Les modifications produites par la culture sur cette espèce végétale ont porté sur les feuilles et les racines. La variété commune ne diffère de la plante sauvage que par ses feuilles plus larges. La variété à feuilles frisées est très ancienne. Celle à feuilles de Fougère dont le feuillage est, non plus crispé, mais découpé en nombreux segments, indiquée comme nouveauté par les catalogues modernes des grainiers, était connue de Bauhin, au XVIIe siècle. Le Persil de Naples est une grande forme branchue ; comme le Céleri, on peut le faire blanchir. Ce doit être l’Apium hortense maximum de Bauhin. Nous avons parlé ailleurs du Persil dont la racine charnue est comestible.

Le mot Persil dérive du latin petroselinum par l’intermédiaire, du bas-latin petrosilium. On rencontre cette forme corrompue dans les textes du XIIe siècle. D’après le Glossaire de Tours : « Petrosilium, c’est en langue romane le perresit »[546]. Au XIIIe siècle, on trouve la forme presin[547]. Dans un traité de cuisine de l’an 1306, nous voyons perresil[548].

[546] Bibl. Ecole des Chartes, 1869, p. 327.

[547] Etudes Romanes. Remèdes populaires, p. 259.

[548] Bibl. Ecole des Chartes, 1860, pp. 216, 224.

Au XIVe siècle on écrivait présin et perrecin. Pércil se voit dans le Ménagier de Paris, qui date de la fin du XIVe siècle.

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