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Les yeux fermés : $b roman

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XCVIII

Le lendemain matin, Michelle était souffrante.

— Ne t’inquiète pas, me dit-elle. Ce n’est pas grand’chose.

Mais pendant six jours elle fut silencieuse. Elle ne se plaignait pas. Je la sentais triste. Je comprenais, ou je croyais comprendre. Le septième jour, j’avais décidé d’employer le seul remède efficace : j’engageai Michelle à changer d’air. Elle protesta. Je fis semblant de me fâcher. La discussion ne s’éternisa pas. Michelle est partie. Elle est partie depuis un mois. Je lui avais ordonné le repos absolu. Elle ne m’a écrit qu’une fois par semaine, de courts billets en braille, auxquels j’ai répondu sans m’étendre davantage. J’ai peut-être eu tort. Je le saurai peut-être demain. C’est demain que Michelle devrait revenir. Reviendra-t-elle ? Je ne sais pas. Le drame qui fut le nôtre, ne le fut-il que dans mon imagination d’aveugle ? Je voudrais le croire. S’il fut réellement, que pense Michelle depuis un mois, et que va-t-elle faire ? A quoi va-t-elle se résoudre ? Écoutera-t-elle la voix de la bande joyeuse, qui l’appelle vers tout ce que je ne puis, moi, lui offrir ? Ou bien, fidèle à elle-même, reviendra-t-elle près de moi, qui ai besoin d’elle ? La nuit est noire autour de moi. Je pense à ma mère, dont je n’ai pas de nouvelles. Je pense à Michelle, qui fut, pendant dix années, le soutien et la grâce de ma vie. Je pense à Georges, emporté dans le tourbillon d’Odette. Je pense à Jacques qui navigue vers ses rêves. Je pense à mon père qui est mort héroïquement après avoir sacrifié l’affection de sa femme et de son fils. Comme la nuit est noire autour de moi ! Et que me réserve demain ? Aurai-je, demain, le télégramme que j’espère, oui, que j’espère de Michelle ?

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